Captif...

Il y avait ici , fort probablement, un avertissement de la part du défunt chanteur. Bien qu'il ait lui-même parlé d'un exutoire concernant cette pièce, il apparaît maintenant plausible que devant l'objectif, il ait eu besoin de se faire rassurant donc feignant l'expulsion du venin. Toutefois, à l'intérieur, ça devait faire mal à un point tel qu'il a du s'enlever la vie pour faire taire ses démons. Son sourire nous trahissait, ses mots, cependant, sonnaient l'alarme. Et ce titre en est sans doute la preuve.

Chanson plus ou moins significative dans sa forme puisqu'on ne réinvente pas le style qui se rapproche du punk , de l'alternatif. Par contre, son fond lui ne laisse aucune place au doute. On pousse assez fort sur le mal de vivre jusqu'à lancer un cri révélateur de 17 secondes maintenu en hauteur et en colère. Celui-ci fera d'ailleurs partie des plus longs dans le milieu musical. Hormis sa longueur, j'y ajouterai son authenticité. On y croit. Ça fait mal et par ce hurlement, je te fais savoir que j'en ai plein mon cul. On connaît tous la suite...

Contextualisation (!): Lorsqu'on dit que l'art offre la meilleure catharsis, on parle justement de ce genre de cri. L'écriture envoie le message global et la voix fait sortir la merde prise à l'intérieur. Malheureusement, ce n'est pas donné à tout le monde de pouvoir se libérer de la sorte. Plutôt, le profane gardera tout en dedans et ira même parfois jusqu'à surcompenser en offrant sourire et gentillesse afin de cacher la tempête qui sévit en dedans. Bien que la charge mentale de l'homme ne se compare en rien à celle de la femme, celle de ce dernier est lourde de sens. Il se doit d'être fort ( à la limite de l'invulnerabilité) , pas trop de larmes ( trop sensible, faiblesse) et capable de tout traverser sans fléchir ( lorsqu'on le lit, on voit mieux le caractère presque impossible de la mission). Il représente une sécurité pour l'entourage donc, s'il démontre de l'insécurité, il sera relayé en bas de la hiérarchie de la meute un peu comme les vieillards dans le règne animal ainsi que les balafrés. Perçus vulnérables, ils seront cible faciles sinon, laissés derrière comme de vulgaires appâts. Voilà pourquoi on ne démontre jamais la détresse. Mais, comme le dit St Exupéry : "... L'essentiel est invisible pour les yeux". C'est d'ailleurs une des raisons expliquée en psychologie concernant les " bads boys " qui attirent les femmes malgré des comportements toxiques. Comme celui-ci connaît probablement la violence ou du moins sait ce que représente le danger, la femme se sentira bien plus en sécurité que si elle traversait une ruelle sombre avec un mec aux allures comptable avec un balai dans le cul. Logique. Loin d'être sain mais logique.

J'ai déjà eu des commentaires désagréables en lien avec ma sensibilité. Pas normal, trop, j'ai un problème et j'en passe. Et ce, parce que je pleurais ma propre mère ( deuil) à retardement. Or, lorsque la vie devient trop dure pour un homme ( lire ici Chester), il aura deux choix devant lui. Soit il passe par-dessus avec tous les stratagèmes que ça implique ( faire semblant, résilience, consultation, recherche d'aide, communication...). Rarement les hommes s'y rapportent. Statistiquement, la majorité attend le fond du baril avant d'évoquer leurs difficultés. Soit ils abandonnent. La corde, les médicaments, le Glock 17, le grill pain, le saut en bungee sans le bungee. Ils se sentent captifs d'une tête qui n'en finit plus de tourner en merde tout ce qui existe autour. Et pour se libérer de cette prison mentale, pour faire taire cette tête, ils choisissent de lui fermer la gueule avec une balle de 9mm. Ils " give Up".

C'est le choix qu'a fait Chester. Captif de sa tête, de ses démons, d'une souffrance qu'il cachait derrière un sourire. Je comprends.