Nigra Sum
Depuis le 2 Décembre 1643, dans l'église des Frari à Venise –
vous savez, cette splendide église qui abrite
trois œuvres du Titien dont l'exceptionnelle Assomption de la Vierge -
sur la tombe de Monteverdi ,
mort quelques jours auparavant,
chaque jour, une rose fraîche...
Est-ce la même femme qui la dépose depuis ?
Ce serait tellement beau...
Une femme qui sortirait de sa tombe
pour, chaque jour, fleurir celle de Monteverdi...
Peut-être est-ce plus prosaïque,
mais toujours aussi fascinant,
comme l'est cet extrait des Vêpres de la vierge, Nigra sum,
début du Cantique des cantiques:
'Je suis noire, mais belle, filles de Jérusalem...'
Dans les mêmes années,
(celles de Monteverdi, pas celles du Cantique)
Shakespeare reprenait ce thème:
'In the old age black was not counted fair,
...That every tongue says beauty should look so.'*
Puis les siècles ont passé,
la fascination n'a cessé de jouer,
des écrits, des adaptations pour ténors et sopranos (Pablo Casals,...)
des chansons, de Bashung à Rodolphe Burger (très belle adaptation
bilingue avec la chanteuse Israélienne Ruth Rosenthal.
C'est une soirée pour laisser filer nos rêves,
ceux de ces merveilleuses histoires d'amour -
la jeune fille et le garçon du cantique,
l'amoureuse sans cesse renouvelée de Claudio -
devenues les derniers remparts
qui nous protègent de ce vaste monde
d'avidité et d'ennui...
Une réussite de bonheur.
Jadis, on ne tenait pas le noir pour beau
...toute beauté devrait être de cette couleur.
(Sonnet 127 premier et dernier vers)