Carnival Row
6.7
Carnival Row

Série Prime Video (2019)

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En attendant d’investir les immensités de la Terre du Milieu, Amazon Prime Video s’offre un tour de chauffe dans la dark fantasy avec Carnival Row, bonne surprise steampunk, entre Narnia et Bioshock, qui fait des Fées l’allégorie des réfugiés.


Game of Thrones est mort, le trône de la fantasy télévisuelle n’attend qu’un nouveau souverain. Et celui-ci risque fort de venir non pas de la vieille TV câblée, mais de la VOD. Dans la guerre de position entre les différentes plateformes de streaming, les yeux sont rivés sur le futur rouleau-compresseur Disney+ ou guettent, inquiets, la réaction du roi Netflix. Mais ce serait un peu vite oublier Prime Video. Le service VOD d’Amazon a de l’argent. Et de l’ambition. Après le succès critique de The Boys, et avant le très attendu Seigneur des Anneaux, le service de Jeff Bezos termine son été en beauté avec Carnival Row.


D’emblée, le show de Travis Beacham impressionne. Là où trop de séries fantastiques semblent fauchées dès l’épisode pilote, la série nous fait instantanément croire à la Burgue, où se déroule l’action. Soit un Empire humain fictif, d’inspiration victorienne (même si le tournage a eu lieu à Prague, les plus attentifs reconnaîtront le Pont Charles), avec ses demeures bourgeoises, ses venelles coupe-gorges, son métro aérien steampunk… Et ses créatures de contes de fées. Car dans ce monde, Centaures, Faunes et Fées ont été découverts sur des îles lointaines, que les empires - la Burgue et son ennemi juré, le Pacte -, en bonnes puissances occidentales impérialistes, se sont empressés de coloniser.


Si le Pacte a opté pour le génocide vis-à-vis des êtres féériques, la Burgue s’est alliée à eux pour guerroyer contre son ennemi. Mais, défaite, elle a maintenant à gérer les milliers de créatures réfugiées qui fuient leur pays natal en quête d’un monde meilleur et viennent s’entasser à Carnival Row, un ghetto explosif où chaque critch (du nom raciste donné aux créatures) essaie de survivre de petits métiers - domestiques, prostituées…


Bons baisers de Burgue


Dans ce monde injuste, nous suivront la Fée Vignette (Cara Delevingne, qui convainc de plus en plus à chaque rôle), fraîchement exilée du pays des fées ; et Philo (Orlando Bloom, qui va enfin pouvoir capitaliser sur autre chose que Legolas et Pirates des Caraïbes), inspecteur de police, tentant tant bien que mal de rendre la vie des « critchs » moins pénible. Les deux ont un passif en commun, un amour ancien datant de la guerre, de ceux qui transcendent les races. Roméo et Juliette version dark fantasy, ils vont se retrouver impliqués dans une sordide affaire de meurtres, dont on murmure qu’elle serait causée par une mystérieuse entité...


Manquant d’un soupçon d'originalité dans sa narration, alignant des twists convenus dans ses derniers épisodes, Carnival Row enfile aussi des gros sabots pour faire de ses êtres de contes des métaphores des réfugiés et de l’immigration. Une fois fait le deuil de la subtilité, cette allégorie s’apprécie néanmoins, notamment parce que les directeurs artistiques redoublent d’efforts pour rendre ce monde et son climat social palpables et crédibles. L’univers fourmille de détails, de cultures, de religions, d’intrigues politiques et intimes. Et, si la longueur de 8 x 1 heure ne se justifie pas dans le script, elle permet au moins de prolonger l’immersion dans un monde passionnant.


Déjà renouvelée pour une saison 2, Carnival Row a encore mille ressources à faire valoir, à condition d’être un peu plus créative dans ses enjeux. Car sur la ligne de front de la fantasy, on s’active. Netflix répliquera cet hiver avec The Witcher, adaptation du jeu-vidéo éponyme. Le trône est loin d’être acquis.

Cyprien_Caddeo
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le 6 sept. 2019

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Cyprien Caddeo

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