Cowboy Bebop
8.5
Cowboy Bebop

Anime (mangas) TV Tokyo (1998)

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Cowboy Bebop n’est plus à présenter et reste un étalon du genre malgré les années. Les personnages de cet animé ravageur et jazzy aiment se lancer à l’aventure, pour sans doute fuir un passé qui va les rattraper tôt ou tard.


En premier lieu, ce qui attire le regard dans Cowboy Bebop, c’est la diversité de son environnement visuel. Nous faisant passer d’un bar à jazz nappé de rouge à une course poursuite dans l’espace entre vaisseaux mitrailleurs, de ruelles urbaines à la Ghost in the Shell à une baie littorale apaisante, de tranchées sableuses de guerre à l’intérieur baroque d’une grande cathédrale, son architecture fait toute la richesse intrinsèque d’une oeuvre protéiforme, qui au travers de ce décorum endiablé, accroit toute sa synergie. D’un épisode à un autre, d’une scène à une autre, les lieux et les décors changent, mutent, s’accumulent et s’additionnent sans qu’il y ait de fausses notes ou de fautes de gouts, dans une ambiance « blues » et lascive. C’est passionnant de détails et de trouvailles en tout genre, avec cette fusion entre une modernité accrue (la cryogénisation) et les derniers vestiges d’une humanité tremblante (les VHS).


Ce perpétuel agencement graphique est aussi dû à la multitude de genres dans lesquels la série avance. Du film noir au space opera, du western à la SF, du road movie aux films de gangsters, de la comédie au drame, Cowboy Bebop tire son épingle du jeu par ce mouvement incessant, parfois difficile à suivre, mais qui fait tout le sel d’une série aux nombreux reflets. Sans jamais perdre conscience et sans jamais sortir de son ambition première. On pourrait croire que son histoire puisse stagner, qu’elle soit sans fil conducteur propre, qu’elle ne tienne que sur les épaules charismatiques et décontractées de ses personnages, ou qu’elle puisse s’étioler par le biais de cette répétitivité narrative qui consiste à voir ces chasseurs de primes partir à la recherche de cibles et d’argent, mais chaque épisode est une possibilité pour Cowboy Bebop de partir à l’aventure, de quitter ce quotidien morne, de s’amuser en perdant l’équilibre, d’accentuer sa singularité puis d’aller et venir dans des contrées spatiales ou terrestres inattendues. Que cela soit Pierrot le fou, Glen, Vicious, les Dragons rouges, le homard muté, Andy, Asimov, Julia et d’autres, la série ne manque pas d’antagonistes iconiques et variés qui feront avancer le récit par petites touches.


Dans cette quête d’aventure et de virées cosmiques, l’animation de Shin’ichirō Watanabe y est pour beaucoup dans l’affranchissement et la renommée de la série. Chose qu’on retrouvera quelques années après, auprès du célèbre animé Samurai Champloo. Les deux séries ont en commun cette capacité qu’a l’artiste à manier le chaud et le froid, de naviguer à sa guise, nous permettant de ressentir le vide et la complexité des protagonistes afin de mieux les incorporer dans une mise en scène qui rend l’action extrêmement fluide et la violence sèche. Les traits portraitistes, le foisonnement des lieux, l’expressionnisme marqué de certains plans, la tension des enjeux, ces innombrables regards fuyants font de Cowboy Bebop une épopée rugueuse qui ne laisse pas indifférent.


Dans les rouages de cet équipage haut en couleur – le virevoltant Spike, la furie Faye, le téméraire et paternel Jet, un chien tout mignon et la jeune hackeuse Edward -, la série parle d’une humanité en friche, obsédée par le contrôle (sectaire, capitaliste, écologique, télévisuel, galactique, de gangs..) mais surtout dessine des êtres solitaires, mis en pièce par le destin ou la peur de l’abandon et dont le regard est rivé vers le passé et non vers un futur en pointillés. Un passé difficile, oublié, amputé ou dissimulé, souvent distrait et détruit par des amours contrariés, à l’instar du premier épisode avec le personnage de Katrina ou celui portant sur Alisa et Jet. Tout comme le matérialise Spike, étouffé par le fantôme de Julia et dont le rêve est d’épouser la mort, il n’est pas question de trouver un refuge confortable ou un endroit où se sentir en sécurité, mais bel et bien de se sentir encore vivant dans un monde comateux.


Article original sur LeMagducine

Velvetman
9
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le 15 févr. 2021

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Velvetman

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