"L'espionnage à la française"

Il est difficile pour nombre de jeunes (vingtaine et moins, trentenaires également) de s’intéresser un tant soit peu aux productions télévisuelles françaises. La faute est sans doute à imputer au florilège de productions américaines de qualité très diverses et à la médiocrité de nombreuses séries françaises. Alors quand j'ai entendu parlé d'une série française discutant d'espionnage aussi bien notée, produit par Canal + et avec Mathieu Kassovitz en première ligne j'ai foncé.
Il fut difficile dans un premier temps de me remettre à l'ambiance à la française. Le rythme, la présentation des personnages, la mise en place du cadre scénaristique sont très différents des productions internationales. Cela est tout à fait normal et donne une caractéristique extrêmement différentiable par rapport aux séries du reste du monde. Néanmoins, le style français tant au niveau de la narration que de la mise en scène met du temps à se mettre en place. Et après le visionnage des 4 saisons, on se rend vite compte que la 1ère n'est rien d'autre qu'une immense introduction au reste :
Le manque de dynamisme est bien évidemment volontaire mais peut à de nombreuses reprises vous faire très vite passer l'envie de continuer. Parfois, l'impression d'être dans une entreprise dans laquelle on pourrait sans aucune difficulté postuler pour un stage de 1ère apparait de manière flagrante. Les scènes de discussion au restaurant de la DGSE autour d'un vulgaire steak petit pois masquent et gâchent la gravité des débats et des décisions prises à ce moment là. Je ne parle évidemment pas de certaines facilités scénaristiques utilisées pour mettre à mal notre génial "Malotru" qui n'aurait jamais pu faire (tel qu'il est présenté) de telles erreurs. L'histoire d'amour qui donne le début du bordel que va foutre Guillaume Debailly au sein des Services Secrets français est pour moi une erreur qui fait passer au second plan tous les enjeux de la politique extérieur française tant qu'au milieu de la saison 1 on a plus l'impression d'être dans un film d'amour sur fond d'espionnage.
Tous ces éléments font de la 1ère saison du Bureau des Légendes une saison ratée mais assez intéressante sur plusieurs points pour malgré tout avoir envie de regarder la saison 2.
Cette saison tout comme la 3ème sont en revanche bien meilleures, on se concentre beaucoup plus sur l'espionnage, on met l'histoire d'amour au second plan, le rythme est bien plus dynamique, le suspense très présent et on apprend beaucoup plus de choses sur ce qui se passe dans le monde. Une série sur les Services de Renseignements se doit de nous faire découvrir un tas de pays (et de langues) où les enjeux sont importants et déterminants pour le futur et c'est exactement ce que ne faisait pas la saison 1 et ce que fait la 2ème et la 3ème.
Globalement le jeu des acteurs et correcte mais on reste sur une production française : jeu très minimaliste et parfois très cliché. Énorme point positive : la présence de Mathieu Kassovitz, exceptionnel et Sarah Giraudeau, impeccable dans le rôle de l'innocente.
La 4ème saison est également de bonne facture bien qu'un peu en dessous des deux précédentes.

Globalement, Le Bureau des Légendes est une bonne série avec son identité bien française qui peut rebuter au début pour de nombreux jeunes qui ont l'habitude des séries rythmées américaines. Néanmoins, la surprise est au rendez-vous et l'on se laisse gentiment au fond du canapé pour en apprendre plus sur le rôle parfois controversé que pourrait avoir la DGSE dans l'échiquier de l'espionnage mondial.
Comparé au reste des séries internationales je ne mettrais que 6 ou 7 mais en tant que série française un 8 s'impose tant la différence avec nos autres productions domestiques en terme d'enjeux et d'histoire est flagrante !