Nouvelle époque, nouveau Lupin

Lupin : dans l’ombre d’Arsène est une toute nouvelle série produite par Netflix et Gaumont Télévision, crée par George Kay, qui a déjà occupé ce post pour le studio au N rouge avec la série d’anthologie Criminal, réalisé en partie par Louis Leterrier (L’incroyable Hulk, la série annulée Dark Crystal : l’âge de la résistance) et Marcela Said (Narcos : Mexico, L’été des poissons volants). Omar Sy joue Assane Diop, qui va venger de son père, jugé pour un vol qu’il n’a jamais commis. En s’intéressant au fil des années au livre de Maurice Leblanc, il devient un cambrioleur aguerri, rusé et gentleman. Sa première cible : le Collier de la Reine. La première partie de la saison 1 est sortie le 8 janvier, pour un résultat surprenant, malgré quelques défauts.

Le cambrioleur insaisissable

Netflix est connu pour trop rallonger ses séries sur des épisodes trop nombreux et/ou trop longs, mais Lupin : dans l’ombre d’Arsène ne joue pas dans ces deux catégories. Le nombre d’épisodes et le temps sont bien jaugés. De plus, c’est une série qui sait vraiment où aller, qui y va sans tourner autour du pot (enfin si on met de côté les nombreux flashbacks, dont on en reparlera dans un petit instant). Dès le début, la série va se montrer généreux en termes de spectacle, le rythme s’accélérant quasi sans répit. Le réalisateur Louis Leterrier a déjà côtoyé des blockbusters dans sa filmographie, il a déjà exploré le monde du cambriolage avec les deux Insaisissables (lequel il va glisser une petite référence dans l’épisode 2) avec plus ou moins de succès, mais ici, il maitrise l’action d’une bonne manière. La mise en scène est plutôt efficace, et donne une grande dynamique au tout ; aussi, certaines transitions entre deux scènes sont plutôt sympas visuellement. Les décors sont divers et variés, et font évoluer les personnages dans plus endroits. Mais ce ne sont pas les meilleurs épisodes de la saison : ce titre revient de droit à la réalisatrice Marcela Said, qui se concentre moins sur l’aspect rusé de son personnage principal, mais son interaction avec son entourage. Sa gestion des flashbacks est beaucoup pertinente et ne gêne aucun autre élément du récit, et le montage, plus fluide.

Ce qui m’amène à l’une des grandes qualités de Lupin : tout ce qui concerne Assane et sa famille. Le scénario est classique, assez typique pour le genre, mais le fait d’avoir développer cette facette du protagoniste est franchement bien vu. D’une part, on humanise le personnage. D’autre part, cela nous permet de regarder Assane d’un point de vue différent, celui de sa compagne Claire (jouée avec charme par Ludivine Sagnier). Cette perspective va questionner sur son intégrité dans la famille, si son « métier » peut avoir un impact dans son entourage. Sur ce point, on peut remarquer qu’il ne mène pas vraiment une véritable double-vie, il laisse transparaitre quelque peu son autre facette, par moments. Le choix d’Omar Sy pour incarner le cambrioleur est plutôt censé : il est connu des français depuis belle lurette, il a ce côté humble, et peut être assez imposant. Ici, il s’en sort plutôt bien, malgré le petit manque de finesse. Mais certains ne vont pas trop aimer sa présence, le voyant plus dans des comédies. L’épisode 4 présente aussi un autre personnage, une des victimes de l’antagoniste, qui se montre assez émouvante et convaincante, qu’incarne parfaitement l’actrice Anne Benoît. Enfin, la musique de Mathieu Lamboley (Minuscule : les mandibules du bout du monde) n’est pas mémorable, mais retranscrit assez bien l’univers de la série.

Le passé est passé

Le problème avec cette série c’est le manque de finesse dans sa construction. L’agencement des flashbacks dans la première moitié de cette saison est assez confus et ne semble pas être optimal avec ce genre de scénario. L’élan que donne Louis Leterrier dans les scènes rythmées est parasité par les flashbacks, qui essayent tant bien que mal de se fondre dans la masse, sans succès. Ce mauvais mélange de séquences d’action/flashback (déjà employé à fond la caisse dans une autre production Netflix, La Casa de Papel, pour un résultat assez similaire) nuit un peu aussi au développement du protagoniste. On comprend son parcours, c’est assez bien démontré, mais il manque cet impact dramatique pour lui donner de l’importance. De plus, certaines scènes de flashback auraient pu sauter (la première fois qu’Assane voit Juliette). En parlant d’aspect dramatique, l’arc narratif concernant la compagne d’Assane, malgré qu’il soit montré dans le récit, est repoussé un peu trop sur la fin de saison, ne préférant pas se mêler aux premiers épisodes, ce qui est dommage, car l’ajout de cet élément, au fur et à mesure des épisodes, aurait ajouté une certaine nuance, au lieu de se pencher trop sur Assane.

L’antagoniste joué par Hervé Pierre n’est pas intéressant en soi, il est assez stéréotypé, et il n’est pas aidé par son écriture. Juliette Pellegrini (Clotilde Hesme) ne semble pas si importante dans l’histoire, mais peut-être que la deuxième partie va lui donner plus d’envergure. Le dialogue manque de subtilité et de naturel (un personnage dit à propos du père d’Assane qu’il est plus malin qu’un singe…). Les raccourcis scénaristiques sont présents, sans grande surprise. On peut se questionner sur certains tours de passe-passe d’Assane, ou encore des pouvoirs de l’antagoniste. Quelques moments sont attendus, par exemple l’un des enquêteurs qui assemble des preuves solides, mais ces collègues ne le croient pas. Enfin, le rythme assez soutenu du récit peut faire perdre le spectateur.

Conclusion :

Une première partie de saison convaincante dans son ensemble, aidée par ses acteurs, une mise en scène dynamique, et des arcs narratifs intéressants. Des qualités qui peuvent combler ça et là quelques défauts scénaristiques sans grand impact, et un rythme un poil trop soutenu.

La note du cambriolage : 6.5/10