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S1 (Juillet 2015).


C’est un postulat de départ très enthousiasmant, parce que très simple, efficace autant qu’improbable : Piper entre en prison pour quinze mois. Pour une vieille affaire vieille de dix ans, où elle fit la mule par amour, avec succès. Et aujourd’hui, alors qu’un invité mystère l’a balancé, la voilà en taule aux côtés de son ex, une histoire aussi vieille de dix ans, avec laquelle elle a partagé ce qui l’amène aujourd’hui en prison.


 La série s’intéresse à tous ses personnages, creusant chacun au moyen de flashback, qui s’insèrent avec un bel équilibre entre les séquences du présent, en prison. Chaque épisode suivra d’ailleurs l’une des incarcérées (ayant le plus de rapport avec Piper, évidemment) pour nous montrer le pourquoi de sa présence ici. Quant aux lieux : Douches, réfectoire, cour extérieure, dortoirs, trou… la série cartographie avec aisance et punch chaque recoin de l’établissement.
Ce qu’il y a de génial c’est de voir comment la prison est le reflet de la société, avec ses clans, ses réseaux, ses jeux de pouvoirs, ses conflits, ses discriminations. C’est bien plus compliqué qu’une simple opposition dichotomique même si c’est ce qui s’en dégage en apparence. Blancs, noirs, hispaniques, vieux, religieux. Les clans se forment de cette manière-là. On y décrète même, après vote, une représentante dans chaque groupe de détenues. La série prend même le temps de travailler les relations hiérarchiques au sein de la prison (j’adore Caputo), ainsi que la vie en dehors pour Larry (Jason Biggs), le fiancé de Piper.
Orange is the new black brosse le cliché en le détournant au maximum, usant de nuances, d’étoffe dans les relations, qu’elle abreuve, qu’elle détruit. C’est passionnant. D’autant plus que le mélange entre la comédie et le drame est savamment dosé. C’est à la fois hyper violent (humiliations, viol, suicide…) tout en trempant dans un climat de « feel good movie » en permanence.
Et puis il y a du monde donc de la matière. Aussi bien d’un côté que de l’autre, prisonnières autant que matons. Si l’écriture continue d’être à ce point dense ça peut vraiment devenir top. Sans oublier que c’est addictif à mort. On a dévoré les treize épisodes en trois jours. Bref, je suis archi confiant. Et puis bon, deux acteurs d’American Pie, j’étais déjà en terrain familier. Hâte de retrouver Crazy eyes et les autres.

S2 (Août 2015).


Je suis un chouia moins enthousiaste que pour la première saison que j’avais quasi regardé d’une traite. Là je reconnais avoir un peu décroché par instants, j’avais l’impression d’un truc un peu plus mécanique et attendu (J’ai vraiment tout vu venir). Peut-être que je suis déçu d’avoir un peu perdu la Piper des débuts. Là d’une part elle passe derrière (tout ce qui tourne autour de Vee & Taystee) et d’autre part elle traverse vraiment une période super violente. Cette saison est d’ailleurs nettement plus dark et du coup moins séductrice – à l’image de cet épisode d’entrée en matière très déstabilisant et ce d’autant plus qu’il fait apparaître la Tyler (Lori Petty) de Point Break, 20 ans de plus au compteur, grosse douleur en ce qui me concerne. Néanmoins j’adore les flash-back, je les trouve vraiment plus beaux que lors de la première saison. Ainsi que tout ce qui se trame plus haut, entre Caputo et Figueroa, avec les détournements d’argent, tout ça. La tempête tropicale vers la fin, vécue de l’intérieur, c’est vraiment très chouette. Et puis faut quand même reconnaître que ça se regarde pépère, aisément en binge-watch.


S3 (Septembre 2015).


Cette saison s’éparpille, en bien. Il n’y a plus vraiment de fil conducteur, de groupe plus imposant qu’un autre et la série creuse (au moyen de flashbacks « Un épisode, un personnage » désormais coutumiers) enfin certains personnages qu’elle avait tendance à délaisser : Norma, Caputo, Big Boo, Chang, Leanne.


 J’avais assez mal vécue une partie de la saison précédente, qui ressemblait davantage à une version féminine d’Un prophète, avec comme leader Vee accompagnée de ses officiers dépassés (Taystee) ou dévoués (Suzanne). C’était intéressant sur le papier, mais j’avais beaucoup de mal à y croire. Il fallait aussi faire le deuil d’une Piper mise sur la touche. Là, elle reprend une place plus confortable sans pour autant retrouver sa ligne de conduite « gentille blonde innocente » de début de série. L’épisode Pennsatucky l’a vraiment changé quand on y pense.
So, comment rebondir sur autre chose, surtout avec le retour attendu d’Alex (qui, franchement, sentait la naphtaline) ? Et bien la série craque un peu. Et j’aime bien ce craquage. Je pense que nombreux sont ceux qui ont trouvés les storylines bien pathétiques cette année. Résumons : On a une infestation de punaises, Red qui fait tout pour reprendre les rênes de sa cuisine, Suzanne qui profite d’une célébrité soudaine avec ses écrits pornos et Piper qui se met à la tête d’un trafic de petites culottes portées. Oui, c’est à peu près n’importe quoi.
Mais dans le même temps, toutes ces intrigues superficielles alimentent avec énergie ce que la saison aura trouvé comme point de convergence : La reprise de la prison par une richissime compagnie, qui n’a que faire des multiples demandes (prisonniers comme geôliers) tant que la gérance lui permet de se mettre des millions dans la poche. Tout ce qui tourne alors autour de Caputo est passionnant je trouve. C’est vraiment un super personnage, le looser ultime, génial, qui ne voudrait faire que le bien mais se heurte sans cesse à sa hiérarchie ainsi qu’à ceux qu’ils dominent. L’épisode qui lui est dédié est probablement le plus beau de la saison, l’épisode Norma Rae, en gros.
Et puis il y a ce dernier épisode, à la fois dans la continuité schizophrène de la saison autant qu’il brise l’équilibre sur le fil qu’il avait jusqu’ici installé. D’une part car longueur de 90 minutes aidant, il était prévisible de le voir multiplier les flashbacks à plusieurs personnages comme il l’avait fait dans le premier épisode de la saison, sauf qu’ils n’en font cette fois strictement rien, tous sont extrêmement courts, quasi sans intérêt, aussi bien pour Boo, Flaca, Healy que les autres. D’autre part car cet épisode vire presque au ridicule et laisse toutes les storylines en stand-by.
C’est une série que j’aime bien pour plusieurs raisons mais force est de constater que son potentiel est souvent gâché. Tout y passe : Piper est en plein crise Corleonienne, Cindy se convertit au judaïsme, Soso manque son suicide quand Morello se marie et que les matons font grève, occasionnant un WTF final absolu. Je regarderai la saison 4 avec plaisir mais ce virage invraisemblablement spectaculaire, dorénavant bien installé, n’augure rien de bon.

S4 (Août 2016).


Globalement (TRES) déçu par la première moitié de saison, qui comme je l’avais pressenti ne sait pas quoi faire de cette fin de saison 3 complètement abracadabrante. Et surtout par une poignée de flashbacks inutiles (Maria, Maritza, Healy…) et des situations passionnantes trop peu ou mal exploitées (Je pense surtout à tout ce qui tourne autour de l’institution pénitentiaire : Caputo, les nouveaux gardiens, les responsables de MCC) ; Je reconnais avoir été plus séduit par les suivants et notamment les trois derniers qui sont parmi les meilleurs épisodes que la série aura offert. Le dernier surtout, la série n’avait jamais fait cela, en tant qu’épisode centric je veux dire (Le cliffhanger au sein de la prison est aussi grandiloquent que sans intérêt, en revanche) c’est un des mieux foutus à ce niveau. D’ailleurs je trouve les quatre derniers bien gérés dans leurs focalisations sur un personnage. Le 10 il y a un beau changement car pas de flashback mais on suit JeSaisPlusSonNom (Et tant mieux, pas de spoiler) le jour de sa sortie de prison, on croirait presque un épisode Lostien avec flash sideway. Le suivant sur Suzanne est classique mais beau. Mais faut les mériter. Et oublier les affreux épisodes Piper et les nazis, bien lourdingues. C’est quoiqu’il en soit une saison très sombre, qui aura fait naître deux monstres : Une guerre raciale imparable et un groupe de matons infects (Enfin, surtout un capitaine particulièrement infâme). Et au sein de cette noirceur (Dernier épisode d’une tristesse absolue) la série aura retrouvé ces moments à deux avec Piper & Vause (Même si soyons honnêtes, ces deux-là ne servent plus vraiment à grand-chose), Poussey & Soso, Suzanne & Maureen. Du coup j’en viens à réhabiliter ce que j’ai vu avant et à me demander si ce n’est pas la saison la plus « intéressante » depuis la une. Bizarre.


S5 (Novembre2019).


Repousser le visionnage d’une saison et/ou la fin d’une série peut vouloir dire qu’on ne veut pas que ça se termine, que l’on souhaite trouver l’instant propice de la retrouvaille. Il m’arrive ça avec The wire : Je rêve de voir la dernière saison et dans le même temps, j’aime l’idée qu’il me reste toujours une partie de The wire à découvrir. Pour Orange is the new black, que je suivais assidument jusqu’à la diffusion de la quatrième saison, c’est autre chose. J’avais aimé cette saison mais déjà j’y ressentais un essoufflement et la crainte qu’elle ait trouvé son émouvant climax avec l’émeute générale et la mort de l’une de ses détenues phares.


 Trois ans plus tard, alors que la série vient de faire ses adieux après sept saisons, je me lance finalement dans cette retrouvaille tardive. Mais dès les premières minutes, je sens que moi, je suis passé à autre chose. Ce n’est pas le cas de la série, malheureusement, qui n’aura jamais été aussi paresseuse, suffisante, étirant les répercussions de cette émeute soit le siège de la prison par les détenues, sur une saison toute entière. Non, ce n’est pas une blague. Les quatre premiers épisodes vont jusqu’à se dérouler durant la toute première nuit. Si encore on utilisait à dessein cette temporalité resserrée, qu’il y transpirait une vraie sensation de chaos, mais ce n’est jamais le cas. Litchfield fait davantage office de cours de récréation qu’autre chose. Il parait que l’action de ces treize épisodes s’étale sur trois jours, mais on ne ressent jamais cela.
La série continue de faire comme d’habitude, un épisode centré sur un personnage, où l’on continue de découvrir son passé au moyen de flashbacks, de façon à ce que ça résonne avec l’action du présent. Mais le problème c’est que la plupart de ces flashbacks n’ont aucun intérêt tout simplement parce qu’ils sont écrit par-dessus la jambe. Le cœur n’est plus dans ce qui faisait la force de la série à savoir le développement étoilé. Si encore on était ravi de retrouver Litchfield, mais non. Ca n’avance pas. On fait du surplace. On regarde ça d’un œil lointain, pour ne pas dire éteint et si l’on tient c’est en grande partie car on apprécie encore chacun de ces personnages, quand bien même ils n’aient, pour la plupart, plus grand-chose à raconter. Piper n’est plus que l’ombre d’elle-même – Mais quel intérêt de lui octroyer encore un flashback ? A contrario, Taystee est devenue le vrai personnage pivot, l’héroïne de la saison, ne serait-ce que pour sa colère, sa tristesse et ses prises de positions. C’est elle qui tient ici le visage de la révolte.
Heureusement les deux derniers épisodes sont meilleurs, ils sauvent un peu les meubles. Mais c’est un peu tard. Bref, je ne m’étais pas trompé : La fin de la saison 4 marquait un vrai tournant, dramatique, créatif. Le reste ne serait plus que du remplissage – J’espère me tromper, évidemment et retrouver Litchfield en pleine forme. Je verrai les deux saisons restantes à l’occasion, mais bon, la série est clairement passé de « J’aime bien, mais ce n’est pas une priorité » à « Si vraiment y a rien d’autre à faire ». C’est triste.
JanosValuska
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le 8 oct. 2015

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