Car le feu qui me brûle est celui qui m'éclaire, disait, dit, dira, La Boétie.
Celui qui sait tout, donc, ne finirait-il pas par tout trouver brûlant ?
Rick le grand-père de Morty est un scientifique génial, plus génial encore que le Doc de Marty.
C'est simple, Rick a à peu près déjà tout percé les grands mystères de l'univers. À vingt ans probablement connaissait-il déjà l'intégralité du nombre Pi, à deux ou trois décimales près... ça fait beaucoup pour un seul homme. Tant beaucoup qu'il boit en proportion, et manque d'empathie autant qu'il boit... simplifions : il est à deux doigts du breakdown existentiel, alcoolique c'est peu de le dire, et probablement pas loin d'être un psychopathe.
Rick a fabriqué un véhicule de téléportation, source de son génie ou consécration, dur à dire, c'est un petit pistolet avec lequel on traverse le temps et l'espace, et les dimensions parallèles, comme on passe une porte. Rick parcourt l'univers dans ses long et dans ses larges, spatiaux et temporels, partout et depuis presque toujours donc, et y obtint, fut - ou sera - un temps et un lieu, à n'en pas douter les deux trois décimales qui lui manquaient.
Rick, s'il ne peut concevoir l'infini, faut pas rêver, s'est tout de même donner les moyens de le visiter. Épisode sur épisode, l'on constate un univers aux limites toujours repoussées, des créatures toujours plus folles, des mondes toujours plus labyrinthiques... pire, nous constatons avec effroi comme, dans ce dessin animé, tout ce qui est parallèle, les êtres comme les choses, est manifestement interchangeable... pire de pire, force est d'admettre que tout cela n'est pour Rick que sentiers battus...
Celui qui vit la contingence de l'existence comme une banalité peut-il échapper à la stupeur ? Peut-il être heureux ? Peut-il vivre avec les autres sans les désespérer ?
À mesure en tout cas que son univers s'offre à nous et s'élargit, le gouffre existentiel qui ronge Rick s'ouvre à nos yeux aussi.
Rick a cette fameuse catchphrase d'un autre langage qu'il clame pendant presque toute la saison 1, sur un ton enjoué à l'image des enfantines sonorités qu'elle contient :
Wubba lubba dub dub !!!
les fans savent ce qu'il en est.
Rick a toujours gardé ses distances avec sa fille. Désintérêt du génie infini ? Ou sacrifice de celui qui se craint plus qu'il ne s'aime ?
Rick offre chaque jour en pâture son petit-fils à la science. Sacrifice ? Ou transmission ?
Les émotions parfois percent chez Rick, souvent simulées, et toujours mathématiquement utiles à la résolution du problème en cours...
à Rick de répéter épisodes sur épisodes, tant que la supercherie n'est pas dévoilée :
Wubba lubba dub dub.
Il tente parfois de nous rassurer, mais ça sent la diplomatie, toujours si sournoise et si géniale que s'en est dramatiquement hilarant.
On n'en chiale de rire. L'humour éternel de cette série infinie m'effraie.
Le personnage a la fin de la troisième saison reste toujours insondable...
quoique l'on semble trouver un début d'explication au niveau de la sauce piquante,
aussi piquante qu'une phrase que j'ai lue aujourd'hui :
il n'y a pas que du noir et du blanc. Il n'y a que du gris. Tout dépend de ce qu'on tolère.