The Deuce
7.8
The Deuce

Série HBO (2017)

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Bienvenue dans le New York des 70's !


Dans ce monde underground où l'homme est le chasseur/dresseur, la femme en est réduite à être la proie/l'esclave.
Horrible plongée dans l'univers sordide de la prostitution, The Deuce (surnom de la 42ème Rue) est une peinture de cette faune nocturne qui court après l'argent.


Les pimps sont des êtres amoraux exerçant une violence psychologique infernale sur leurs gagneuses et paradant tels des coqs dans la cour des miracles.
Les flicaillons palpent des billets pour fermer les yeux, tandis que les mafiosis profitent de l'essor de la pornographie autorisée, sous couvert du 1er Amendement de la Constitution US;


Tout ce petit monde est imbriqué dans l'explosion industrielle du sexe vulgaire et tarifé, au sein d'une ville tentaculaire qui plonge irrémédiablement vers le fond.


"New York, New York", chantera fièrement Liza Minelli dans le film homonyme sorti en 1977. Mais cette Big Apple est vérolée jusqu'au trognon: la misère s'étend dans les ruines fumantes du Bronx, la police est corrompue jusqu'aux os et les criminels ont pratiquement pignons sur rue,
Central Park est un coupe-gorge, la 42ème Rue fourmille de prostituées tandis que les cinémas pour adultes poussent comme du chiendent, le long des trottoirs défoncés, la cocaïne s'y répand comme un virus, via la French Connection...


C'est dans cet univers glauque, que David Simon et son collaborateur George Pelecanos ont décidés de planter le décor de leur nouvelle série.
Co-produit par Maggie Gyllenhall et James Franco, ce show dépressif n'est rien d'autre qu'une tranche de vie dans ce quartier de Manhattan. Tranche de vie gangrénée par le vice, cela va sans dire.


Interprétée par une palanquée d'acteurs(rices) excellent et bénéficiant d'une reconstitution des 70's très soignée, cette série ne cherche pas la provocation inutile et se contente d'énoncer des faits historiques.


L'épisode pilote est un peu lent à suivre (du fait de son format de 84 minutes), mais dès le second épisode, on nous balade entre flics, macs, prostituées qui se mêlent tous sans distinctions dans un bar tenu par un mec réglo, bossant quand même pour la mafia locale.


L'on y verra les dangers d'avoir un "protecteur" ou de ne pas en avoir...Le résultat est le même: la femme se vend pour une poignée de dollars aux hommes frustrés dans leurs quotidiens sexuels.
pour autant, -et ce, malgré que ce soit un show HBO- il n'est nul question d'étalage de sexe gratuit (sans jeu de mot) mais plus du quotidien miteux de cette population qui cherche à gagner le plus d'argent possible.
Les différents personnages sont suffisamment nuancés pour que l'on s'intéresse à leurs sorts: que ce soient les prostituées, le barman et son personnel, les mafieux et même les pimps, chacun a sa personnalité bien définie.


Mais avant tout, The Deuce nous cause du New York authentique. Celui où régnait bien sûr la violence, la misère, l'exploitation humaine certes, mais aussi le New York vivant, celui où tout était possible, ou surnageait l'espoir de meilleur lendemain et où la 42nd Street représentait toute la population underground avec leurs histoires profondément humaines.
Toutes les couches sociales se rencontraient à l'abri des regards le long de cette grande avenue si particulière: les riches cotoyaient les pauvres, les Blancs cotoyaient les Noirs, les hétéros trainaient avec les homos, les désespérés liaient connaissances avec les plus optimistes...


Mais cet univers bien à part a fini par être balayé par deux "bad guys" implacables: le SIDA et les investisseurs.


Pour le premier, ce fut la fin des années d'insouciances pour toutes personnes désirant exprimer sa sexualité - consentantes j'entends - lors de nuits endiablées où les codes de moralités rigides étaient oubliés en un clin d'oeil. Dès lors que ce fléau apparut, les victimes augmentèrent proportionnellement tout autant que les attaques virulentes de certains conservateurs dévots, stupides et ignorants, cela même qui baptisèrent le SIDA comme étant le "cancer gay" et niant une criante vérité: le virus HIV s'attaquait autant aux hommes qu'aux femmes, aux homos comme aux hétéros.
Et certaines personnes en profitèrent pour faire le grand ménage, comme le maire Ed Koch, soupconné de s'être retourné contre les gays pour masquer sa propre homosexualité.


Pour le second, c'est le Capitalisme avec un grand "C" (peut-être le vrai cancer de l'Amérique à cette époque) qui s'abattit sur la 42nd et ses alentours.
Il n'y a qu'à voir ce qu'est devenu le Meat Pack (ancien abattoirs devenus le haut-lieu des night-clubs gays comme le Crisco Disco, le Hellfire Club, le Eagle's Nest, le Mineshaft illustrés pour certains d'entre eux dans l'excellent Cruising de Friedkin en 1980), le CBGB dans l'East Village, le Studio 54 à Midtown...pour se convaincre que Koch et ses successeurs (dont Rudolph Giuliani) ont transformé le vrai New York en une espèce de Disneyworld (mes étudiants US from NYC sont d'accord avec moi) réservé aux touristes (Time Square est devenu un gros spot publicitaire, 100 ,fois plus que durant la première partie des 80's) et où les résidents sont tous de la Classe Supérieure...


Je m'égare, j'en conviens mais ce n'est qu'un amer constat...


Bref, cette série parle de tout ça mais évidemment aussi de sexe.
Celui qui fait vendre, celui qui permet à certaines femmes de survivre quand d'autres sont obligées de s'y plier par désespoir ou parce qu'elles y sont forcées par quelques connards (excuse my French) sur les trottoirs de Time Square.
Il y a aussi l'industrie du sexe plus "légale" qu'est la pornographie. Mais quelques fois, il est assez difficile de faire la distinction entre la prostitution et le porno, tout dépend qui tire les ficelles...


Il est intéressant de constater que les scènes de sexe présentes dans la série sont légitimes de par son sujet, au contraire de celles de GoT qui sont totalement gratuites, donc inutiles.
De quoi appuyer les dires que le sexe se vend toujours autant mais en prime-time, maintenant...
La 42nd a été "nettoyée" mais on pourrait plutôt dire qu'elle a été déplacée...à la télévision et ce, de manière tout à fait légale.


Quant à l'épisode final, il est tout simplement émouvant puisque non seulement New York a été vendue aux gros investisseurs, mais aussi parce que tous les personnages que nous avons cotoyés finissent par tous disparaitre, exception faite d'un vieux Vince qui arpente la 42nd en 2019 (celle qui ressemble à une attraction made in fucking Mickey) et qui croise les fantômes du passé au détour d'un écran plasma géant dans la nouvelle rue "clean"...

Franck_Plissken
9
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le 25 oct. 2017

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