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C'est du pur cinéma d'auteur, en l’occurrence celui très singulier de Nicolas Winding Refn, qui s'étale ici en format série sur plus de 12h30 de contenu (4*1h30, 5*1h15, 1*30min). Alors, effectivement, il faut apprécier un minimum le style excessif du Danois qui prend à nouveau à revers son canevas avec ces durées d'épisodes farfelues, mais aussi en profitant de ce temps d'écran pour prendre littéralement son temps.


Tout d'abord, on peut facilement affirmer qu'il s'agit d'une des plus belles mises en scène du petit écran. Dans la droite lignée d'Only God Forgives, l'esthétique est léchée, minutieuse. Les cadrages sont évocateurs, avec une composition des plans où l'espace autour des personnages se fait tellement ressentir qu'il en devient une entité à part entière. La lumière et le photographie sont parfaite, donnant des contrastes très marqués avec les séquences nocturnes nimbées de néons. En un sens, c'est grâce au rythme excessivement lent que toute cette richesse visuelle devient si pertinente.


C'est vrai que lorsqu'on se lance dans ces deux premiers épisodes de 90min, on ne peut s'empêcher de bailler (surtout sur le 2ème) ; les scènes s'éternisent dans l'immobilité, les mots sont éparses, les plans se figent. Et puis, cette lenteur en devient hypnotique, finissant par créer une hallucination surréaliste qui nous happe dans cet univers d'ultraviolence et de lascivité. C'est une ode au vide et au silence qui semble seoir parfaitement à cette œuvre neo-noir qui voit des figures immuables se dresser au milieu de l’urbanisme criminel et des cartels. Il est bon de préciser que l'habillage sonore, signé Cliff Martinez, est une des clés majeures de la réussite de ce spectacle. Avec des synthés rétro, une électronique suave, des digressions saturées malsaines, et des coupures plus Rock/Pop, le compositeur donne vie à l'atmosphère dépeinte par Winding Refn.


Sans parler des acteurs qui, tous, sont incroyables et impeccables dans chacune de leurs scènes. Il y a de nombreux monologues récités avec brio. Et ils jouer l'immobilisme et la contemplation tels que présentés ici montre l'entièreté de leur talent. On peut noter que le personnage de Teller est très semblable à ceux de Gosling dans les films du réalisateur, et ceux de Jena Malone et Cristina Rodlo, totalement captivants. Parsemée en sus de cynisme, de représentations satiriques, et de quelques réflexions philosophique, la série développe ainsi une ambiance singulière, riche en métaphores et spiritualisme, où les informations se révèlent d'elles-mêmes, jusqu'à envahir tout l'espace.


Too Old To Die Young est plus une expérience sensorielle, d'un Refn qui a peaufiné son art. Ce n'est pas pour autant exempt de longueurs dans la narration, ou de scènes de voyeurisme pervers dispensables ; la logique scénaristique est également mise de côté au profit de la transcendance symbolique des protagonistes. Néanmoins, c'est ce qui fait l'essence du cinéma du Danois, et qui rend cette œuvre télévisuelle si difficilement catégorisable.

AntoineRA
8
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le 4 oct. 2020

Critique lue 123 fois

2 j'aime

AntoineRA

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