Critique rédigée au terme de la série (octobre 2013).
Selon Freud, en nous s’affrontent deux pulsions, Eros, la pulsion de vie (auto-conservation) et Thanatos, la pulsion de mort (destruction). Walter White, sans cesse tiraillé entre Eros et Thanatos, est la plus belle illustration que je connaisse de ce concept freudien.
Depuis le premier épisode de la première saison, tout s'écroule lentement et irrémédiablement autour de Walter White. Mais Eros le pousse en avant, lui permet de continuer à vivre, à avancer. Au cours de sa longue descente aux enfers, Walter White a toujours le choix de mettre un terme à la destruction de son entourage. Mais Thanatos le pousse systématiquement à s'enfoncer plus profondément dans la mort. "Breaking Bad" est donc la perpétuelle alternance de Thanatos et Eros, la premiere pulsion enfonçant Walter White dans la destruction, et la seconde le poussant malgré tout à l'auto-conservation.
Walter White est le seul acteur de "Breaking Bad" en ce sens qu'il en est le personnage agissant. Ce qui arrive aux autres n'est que la conséquence des choix qu'il fait. Il suffirait que Walter White se sacrifie pour mettre un terme à la destruction égoïste de ses proches. Mais Eros - la combinaison de son ego, de sa mauvaise foi et son désir de pouvoir - est trop fort. Pourtant, c'est finalement Thanatos qui l'emporte dans les dernières minutes de la série, après avoir détruit l'entourage de Walter White dans sa chute.
Critique rédigée lors de la diffusion du début de la dernière saison (août 2012).
Voilà une série de la trempe des meilleures de HBO (« The Sopranos » et « Oz »). On plonge dans un univers qui est traité d’une manière nouvelle, avec des personnages qui sont des gens normaux, qui pourraient être vos collègues, voisins, parents, etc. Le pitch de départ est assez original pour attirer l’attention tout en étant plausible. Les premiers épisodes présentent des situations loufoques car absurdes et inattendues.
L’univers présenté, celui de la production et du trafic de drogue, est sombre comme le sont ceux de la mafia dans « The Sopranos » et de la prison dans « Oz ». Le rythme lent de la série, les problèmes abordés (famille, parenté, handicap, maladie, dépendance, suicide, illégalité, etc.) et leur traitement réaliste rendent la série tout à fait captivante et attachante. L’évolution des personnages est à peine perceptible tandis que leur psychologie constitue sans doute l’aspect le plus intéressant de la série.
La musique est souvent pertinente et bien fondue dans l’action. Le fait de commencer de nombreux épisodes par une situation catastrophe qui clora les quarante-cinq minutes ajoute au suspens. Les acteurs sont bons et la mise en scène se perfectionne au fil des saisons (les plans ont une certaine « patte »).
A mon avis la meilleure série actuellement en cours de diffusion.