Nombreuses sont les séries américaines qui ont tenté de nous faire plonger dans le contexte des guerres contemporaines mais ça finissait par nous énerver en se détachant trop du réel.
Alors que penser de cette série française ? L’histoire se profile en Irak, où le commando 45 des forces spéciales françaises envoyées à l’étranger a pour mission d’exfiltrer la fille et le petit-fils d’un important émir de Daech en contrepartie d’informations (l’histoire est inspirée de l’opération menée par les forces spéciales françaises à Mossoul en 2016 sur le territoire irakien).
Dès le premier épisode, le ton est donné, l’immersion totale : le rendu est très réaliste en passant par la vie sur le camp de base jusqu’à la manière d’opérer afin de mener au mieux cette exfiltration. Nos nerfs sont vite mis à rude épreuve (lors du passage du tunnel notamment), et le casting est plutôt sympa avec un Nicolas Duvauchelle particulièrement touchant (le seul film où j’avais aimé son jeu d’acteur remonte à quelques années avec « Polisse », sur le coup dans cette série je n’ai rien à dire), Thierry Godard (« Engrenages ») et d’autres acteurs que je ne connaissais pas, tels que Marie Dompnier, qui sont plutôt bons. Le casting a d’ailleurs été spécialement préparé pour l’occasion, avec un entrainement complet dispensé par le 13ème régiment de dragons parachutistes, et ça se retrouve dans l’action des combats ainsi que les équipements qui coïncident avec ce qu’on peut trouver dans d’autres films.
La série est intéressante surtout quant à la qualité de la réalisation, signée par le libanais Ziad Doueiri (« Baron Noir »), dont on sent le goût pour la scène d’action. Elles sont réussies parce qu’elles respectent un rythme assez lent, acceptent de représenter l’attente (par exemple l’assaut final dans un village la nuit, qui dure le temps d’un épisode tout entier). On voit l’équipe s’installer, attendre la nuit noire, se placer. Pendant plusieurs minutes la caméra suit le placement de la sniper, refusant au spectateur le plan large et l'occasion de voir, comme la sniper, le danger arriver. J’ai d’ailleurs repensé au film « Novembre » avec Jean Dujardin, où l’on retrouve ces longs moments de surveillance, à traquer ses cibles avant d’intervenir.
Les changements de rythme m’ont maintenu dans un état d’attention plutôt constant, certains rebondissements étaient prévisibles mais d’autres nous surprennent. La tension est quasi permanente à travers cette recherche qui est pour le moins nerveuse. Seul écueil à une parfaite adhésion, ce défaut, hélas très contemporain dans la production télévisuelle : l’usage trop prononcé de la musique dramatique, enlevant le côté « sec » de la mise en scène (certaines musiques n’allaient pas trop avec les scènes, notamment celle où ils sont à la recherche de Salwa et tombent dans un piège).
Néanmoins, axer une série sur des militaires français peu connus, ceux des forces spéciales à l’étranger, est un parti prix, qui à mon sens, a marché : l’action majeure reste la plupart du temps en hors-champ (il ne faut pas s’attendre non plus à un documentaire sur la guerre, ce n’est pas le but et tout n’est donc pas exploitable) ; et comme dit plus haut, la série se porte sur une poignée de militaires dont l’un est médecin, un autre est spécialiste des drones, une autre sniper, et un autre encore piégeur, à l’arrière quelques officiers supérieurs et une petite unité multi-tâche, hyper mobile et adaptable, qui fait un peu tout, du renseignement à l’assaut. J’ai particulièrement accroché à ce choix-là car notre regard se penche sur la réalité du terrain, sur les décisions difficiles à prendre pour répondre aux enjeux urgents, parfois à contre-courant de sa hiérarchie, et tout ce que cela implique par derrière : le dépassement de leur fragilité propre pour accéder à un esprit de solidarité indispensable dans de telles mission. Sans compter qu’entre les arrangements politiques et les erreurs humaines, de nombreux éléments viennent ajouter un supplément de suspense.
Les décors naturels ajoutent de la vraisemblance à l'histoire, avec une belle photographie qui participe aussi au plaisir que l’on a de suivre ces aventures tendues.
Les questions qui pourraient tout de même être soulevées sur cette série sont l’insertion de femmes au sein d’un commando (ce n’est pas impossible mais quelques doutes subsistent car dans la réalité il n’y a pas assez de candidates pour que l’une d’entre elles se retrouvent directement au sein d’un commando), et certaines pistes, qui sont ouvertes mais pas explorées jusqu’au bout (comme la débâcle dans les tunnels du premier épisode, dont on s’empresse d’oublier la recherche des causes).
Cette série est quand même à voir ! A voir comment la saison 2 est amenée…