Bourreau des tueurs

Saison 1 (9/10) :

De tous les idées originales ayant pu apparaître à la télévision ces derniers années, « Dexter » est peut-être la plus jubilatoire. En effet, peu de monde aurait osé donner le premier rôle de sa série à un serial-killer légèrement pervers sur les bords, même si, identification minimum oblige : celui-ci tue des très très méchants ! Ce n'est toutefois nullement un problème tant James Manos Jr. rend d'emblée le propos incroyablement subtil et intelligent, d'autant que ce dernier s'appuie sur une forme souvent renversante, à l'image de cette voix-off hypnotisante ou encore des apparitions furtives du père de notre héros.

Il n'est d'ailleurs pas si courant de voir une série s'appuyer sur des personnages aussi intéressants et divers, le tout soutenu par des dialogues de haute tenue et d'une intrigue incroyablement dense et complexe. Chaque épisode va ainsi plus loin dans la tension et le suspense à couper le souffle, d'autant que les différents rebondissements ont de quoi nous laisser souvent stupéfaits. Comment oublier d'ailleurs cet éblouissant affrontement final, superbement réalisé et provoquant un malaise indescriptible ? Pas de doute, nous sommes ici dans le summum de la créativité et du brio, superbement interprété et doté d'une puissance indescriptible : grandiose.

Saison 2 (9/10) :

Jamais facile de confirmer après une première saison aussi passionnante que démentielle à bien des égards. Ces douze nouveaux épisodes de « Dexter » réussissent pourtant le pari avec panache et brio, continuant d'explorer des pistes plus captivantes les unes que les autres. Peuplé de personnages troublants et inquiétants pour diverses raisons (Doakes, la sensuelle Lila), cette seconde saison continue de creuser de manière fascinante le portrait d'un serial-killer presque attachant, conscient de la monstruosité de ses actes et toujours interprété remarquablement par Michael C. Hall, et ce sans jamais que la série ne tombe dans le morbide ou la violence gratuite. Un grand moment de télévision, époustouflant d'intelligence, de noirceur et de brio : la suite, vite!

Saison 3 (8/10) :

S'il y a une raison qui m'empêche de mettre la note suprême à cette troisième saison, c'est bien son dénouement. Fade, banal et digne d'un polar insignifiant, elle empêche l'ensemble de terminer sur une note positive, et c'est bien dommage car Dieu sait si le reste est à nouveau remarquable. C'est même un nouveau festin auquel nous convie James Manos Jr., qui va toujours plus loin dans l'exploration sombre et glauque de son héros serial-killer, « confronté » ici à l'amitié, sentiment qui l'amènera dans une position plus qu'inconfortable tant celle-ci va repousser les limites du malsain et de la justice personnelle.

C'est par ailleurs toujours aussi brillant, complexe, riche, remarquablement écrit et joué, très loin de la répétition crainte, d'autant que les nouveaux personnages (le plus qu'ambigu Miguel Prado en tête) venant parfaitement se fondre dans l'univers de cette série qui ne ressemble définitivement à aucune autre. Du coup on pardonne plus facilement à ce troisième volet de se terminer de façon aussi facile, en espérant que le quatrième saura nous combler du premier au dernier épisode. Bonne nouvelle : celui-ci passe pour un grand cru parmi les grands crus...

Saison 4 (9/10) :

Après une troisième saison brillante entachée d'un final très décevant, Dexter revient et il est plutôt content. Heureusement, cette banalité familiale ne va pas durer et laisser place à l'un des plus beaux joyaux jamais offerts par la télévision. Difficile pourtant de se renouveler après avoir déjà abordé tant de thèmes originaux : c'était sans compter sur le génie de James Manos Jr., qui nous offre pour l'occasion un scénario d'une rare richesse, aux rebondissements jubilatoires et dont personne ne sortira vraiment indemne.

C'est que les surprises sont nombreuses, et nul doute que plusieurs scènes vous resteront gravés en mémoire, dont certaines parfois d'une rare violence... Il y a tellement de choses à dire quant aux nouveaux personnages, aux habitués, à cette voix-off ensorcelante toujours aussi brillamment exploité, à ses situations incroyables que personne d'autre n'oserait... Derrière cette apparente bonhomie de l' « American Way of Life » se cache ainsi quelque chose de très sombre, de presque malsain, à l'image de la relation particulièrement trouble qu'entretient le héros avec le redoutable Trinity.

À ce propos, depuis combien de temps n'avions-nous pas vu un méchant de cette trempe ? Inquiétant, perturbant, violent, imprévisible voire presque touchant : il est peu dire qu'on ne sait sur quel pied danser face à cette figure maléfique inclassable, magistralement interprété par un John Lithgow au sommet de son art. Enfin, si le précédent dénouement ne m'avait franchement pas satisfait, difficile de faire la fine bouche devant une fin qui restera sans doute comme l'une des plus audacieuses et marquantes jamais réalisées... Bref, derniers retardataires, précipitez-vous sur ce véritable chef-d'œuvre, l'un des suspenses les plus haletants de l'Histoire télévisée. Plus que jamais, merci Showtime, et vive « Dexter ».

Saison 5 (7/10) :

Sept ans et demi. Sept ans que je ne m'étais pas replongé dans la série du tueur en série le plus célèbre de la télévision. Peut-être que la quatrième saison avait mise la barre tellement haut qu'inconsciemment, je ne voyais pas comment celle-ci pourrait rivaliser, ou simplement beaucoup entendu que le reste n'était pas à la hauteur, ce qui revient un peu au même. Toujours est-il que globalement, ce nouveau volet fait plutôt bien le travail. Certes, l'effet de surprise ne joue clairement plus et certains détails qui faisaient depuis longtemps le sel de l'œuvre (la voix-off, notamment sur des commentaires très courts) deviennent presque des faiblesses ici.

Il n'y a plus le même plaisir, la même délectation qu'il y avait à voir Dexter s'opposer à ses ennemis, les personnages « historiques » n'étant pas spécialement mis (positivement, du moins) en valeur. Maintenant, je trouve cela quand même efficace. L'ambiance, la réalisation, le suspense : sans apporter quelque chose de réellement nouveau vis-à-vis des précédentes saisons, il y a un vrai savoir-faire pour nous prendre dans le sens du poil, et quitte à trouver ça légèrement improbable, c'est assez plaisant à regarder.

Bien qu'expédiée un peu vite, la sous-intrigue autour des

n'est pas mal, tandis que les nouveaux venus sont clairement l'attraction de ce cinquième volet :

Enfin, malgré quelques réserves, la relation qu'entretient notre héros avec Lumen (Julia Stiles, assez touchante) est relativement intéressante et un minimum complexe, notamment dans les derniers épisodes. Bref, si cette saison cinq est clairement la moins bonne de la série, elle fait toutefois preuve de professionnalisme pour qu'on se laisse encore tomber dans les filets de notre cher serial killer : reste à savoir si la suite, et notamment ce « tournant » religieux opéré par son successeur, nous donnera raison d'avoir voulu perpétué les crimes jusque-là.