Feud
7.4
Feud

Série FX (2017)

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Saison 1

Feud est une série qui annonce la couleur.
Elle part du principe que querelle il y a entre les protagonistes et n'en démord pas.

Cependant, la-dite querelle entre Bette Davis et Joan Crawford n'est pas aussi bien documentée que ça. En effet, les articles mentionnés dans la série écrient par Hedda Hooper n'existent pas.
Ceux réellement écrits pas cette dernière sont, au contraire, axés sur l'entente entre les 2 actrices lors du tournage.
C'est une vérification rapidement faite.
Dès le premier épisode tout un tas de petits détails qui pourraient être justes sont faux et remettent en question la qualité de la série et sa crédibilité, pour moi.
En effet, comme souvent dans ce genre, elle assène ses révélations comme des vérités sans aucune subtilité ni aucun recul.

Ryan Murphy, grand fan auto-proclamé de ces 2 légendes, distille des mensonges et des exagérations avec un aplomb qui ne force pas le respect.
D'autant qu'il avoue lui même ne pas avoir contacté Olivia de Havilland, encore en vie, elle, contrairement à beaucoup d'autres protagonistes de cette histoire, pour avoir ne serait-ce qu'un moignon de témoignage, pour ne "pas la déranger ou être intrusif" ....
Elle poursuivra d'ailleurs la production pour son inexactitude et aussi parce qu'elle n'appréciait pas d'être montrée comme une garce.
Pas sûre qu'Olivia soit blanche comme neige de tout commentaire malheureux à l'encontre de sa soeur mais la façon dont Catherine Zeta Jones l'interprète la montre clairement comme une langue de vipère.
Par ailleurs, elle n'aurait peut-être pas été totalement franche dans son récit des évènements mais cela aurait certainement été plus proche que les inventions flagrantes de Ryan Murphy.
Le pire, c'est qu'un peu d'attention à quelques détails et le reste pouvait passer sous le radar.

Ce qui fait tiquer également, c'est le fait qu'il transforme 2 forces d'Hollywood, totalement aptes à naviguer ses eaux troubles depuis longtemps, aguerries à la négociation et aux rapports de force ou d'alliance avec des moguls tels que Jack Warner, il transforme donc ces 2 légendes en faibles femmes facilement manipulables par tous et tout.
Bette Davis et Joan Crawford ne se sont pas maintenues au top pendant des décennies en se laissant aussi bassement manipuler, pas inconsciemment en tout cas, à mon avis.

Le message féministe est bien évidemment passé à la truelle avec ses commentaires sociaux anachroniques mis dans la bouche même des personnages. Pas que les femmes ne se plaignaient pas, je suis sûre qu'elles se plaignaient mais les termes utilisés sont clairement ceux du post metoo plutôt que ceux des années 50 et 60.

Le tournage de Baby Jane s'est notoirement déroulé sans accrocs, Bette et Joan n'ayant aucune raison de se bouffer le nez comme des adolescentes. Elles étaient de grandes professionnelles, très dissemblables dans leur façon d'aborder leur carrière et leur rapport à leur métier, mais des professionnelles totalement conscientes de la chance de tourner un tel film à ce moment de leur carrière, consciente de cette dernière chance et elle n'allaient pas la gâcher pour des balivernes ou l'attention du réalisateur.
Le portrait de Robert Aldricht est lui intéressant entre veulerie bonhomme et charme empoisonnant. Il a le mérite de ne pas être manichéen et même Jack Warner s'en tire avec un peu de sympathie.
Le dernier épisode est une aberration de bons sentiments et de guimauve qui jure avec l'acidité des épisodes précédents où la mésentente est rendue inéluctable. C'est faux, mais au moins il y a une ligne directrice et la fin n'est pas en ligne avec le reste.

Il est dommage que plus d'attention n'ai pas été apporté au scénario car le reste tient plutôt bien la route.
Jessica Lange fait très attention à ne pas refaire Faye Dunaway à tel point qu'elle est un peu fade parfois. Néanmoins, Joan Crawford était connu pour son personnage affable et bien élevé (il aurait été plus intéressant d'explorer la création d'une image parfaite que cette légende de guéguerre) et son hygiène maladive. Ce sont des aspects qui sont parfaitement connus et documentés (le livre façon Nadine de Rotschild est vrai d'ailleurs).
Elle offre tout de même un belle performance même si j'ai du mal à retrouver Joan Crawford.
Susan Sarandon est bien meilleure en Bette Davis, elle manque un peu de piquant parfois, Bette étant notoirement connue pour son venin et son franc parlé.
Alfred Molina est un très bon Robert Aldricht même si je ne peux pas prouver ou infirmer qu'il ait été rongé d'insécurité vis à vis de son talent et Stanley Tucci est toujours parfait quoi qu'il fasse quoi qu'il joue. Son Jack Warner manque un peu de bassesse, il est connu pour être une sale ordure quand même.

Il est intéressant de noter que pour interpréter des femmes entre 50 et 55 ans à l'époque, on a choisi des actrices de 68 ans (en 2017). Une réflexion sur le rajeunissement de l'apparence des femmes, sur le fait qu'aucune actrice de 50 ans n'a envie d'avoir l'air d'avoir 50 ans? Sur les dégâts de la chirurgie esthétique? Et ce n'est pas parce que personne d'autre ne pouvait jouer ces rôles. Le mimétisme et l'exactitude n'étouffe pas la série non plus.

On a ensuite Catherine Zeta Jones en Olivia de Havilland et Kathy Bates en Joan Blondell. Cette dernière lance 3 phrases et puis s'en va, incarnant une légende des année 30 mais qui n'a vraiment aucun rapport avec l'histoire.
Et quant à Catherine Zeta Jones, c'est une de ses plus mauvaises prestations. C'est une actrice que j'aime beaucoup et à qui je trouve beaucoup de talent mais là, c'est une véritable catastrophe. Je pense sincèrement que c'est la direction d'acteur qui pèche plus que son talent. Il est clair qu'on lui a demandé d'imiter Olivia mais en l'occurence elle imite plutôt Joan Fontaine dans ses intonations. Ses dialogues sont des aberrations sans fondements et en contradiction totale avec de Havilland. Exemple : "il faut se rappeler que c'était avant le mouvement de libérations des femmes, que j'admire beaucoup d'ailleurs ... sourire niais et ton sirupeux". Bon sang, Olivia de Havilland a une loi qui porte son nom car elle a poursuivi la Warner en justice à cause de son contrat (1 ou 2 ans après que Bette Davis ait perdu le sien d'ailleurs mais elle n'avait pas attaqué par le même flanc) et a gagné, libérant ainsi les acteurs du joug des studios et mettant fin à un système indécent. Tous les acteurs d'Hollywood savent ce qu'ils doivent à Olivia de Havilland qui a fait ça toute seule en 1943! Cette femme ne dirait jamais qu'elles ne pouvaient rien faire! Elle l'a fait!
Olivia de Havilland a perdu le procès qu'elle a intenté à la production de Feud, elle en demandait trop, mais elle a bien fait de s'insurger contre cette masquarade!

Côté réalisation c'est assez classique. J'ai noté quelques costumes mal coupés et mal montés mais ce n'est pas atrocement atroce.

Un beau gaspillage d'argent et de talent voilà ce que c'est. Au lieu de raconter les vies de ces 2 femmes exceptionnelles, on a droit à une bagarre de cours d'école entre 2 perdreaux qui semblent de l'année.

La seconde saison se fera sans moi, je n'ose même pas imaginer en quoi sera transformé l'histoire de Charles et Diana (mais au moins là, la querelle est réelle et documentée).

Anilegna
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le 1 mars 2021

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