Trop cliché, manque de subtilité. Divertissant malgré tout

Comédie pour ado, Genera+ion s'inscrit dans la lignée des fameux sex education ou encore heartbreak high.

J'aime beaucoup la réalisation type « mise en abîme » qui reprends des éléments des scènes précédentes à chaque introduction d'un nouveau personnage, ce n'est pas nouveau comme schéma narratif, mais ça fait son petit effet !

Attention, la critique qui suit contient des spoils.

La scène de masturbation très crue n'était franchement pas nécessaire...L'écoeurant n'est pas symptomatique de l'adolescence ou de la jeunesse en général. Surtout que de ce que j'ai compris, il s'agit du personnage bisexuel (Nathan), donc ce n'était pas nécessaire de l'afficher de la sorte, surtout qu'il regardait un porno dans lequel il y avait un plan à trois. Pour une introduction de personnage bisexuel, c'est sacrément cliché et ça file un haut le cœur. Il y avait sûrement plein d'autres manières de le suggérer que celle là, je ne sais pas si c'est une paresse scénaristique ou simplement une grosse maladresse, toujours est-il qu'il y avait plus réaliste comme manière de faire que de montrer un bisexuel hypersexuel. De même qu'il y avait des manières plus subtiles de faire comprendre qu'il recevait des nudes que de montrer frontalement un (probablement faux) pénis en érection glabre sur l'écran de son téléphone.

Bref, c'est pas très prometteur, de prime abord ça ne me paraît pas ace-friendly (j'ai entendu dire qu'il y aurait un personnage asexuel dans cette série justement). J'aurais aimé que la sexualité et les questionnements qu'elle peut engendrer soit découverte de manière plus subtile... On rappelle qu'il s'agit ici de jeunes lycéens qui n'ont pas à être sexualisés par l'oeil des adultes. Bien sûr, la sexualité d'adolescents de 16 ans peut être découverte de manière franche et crue, mais ça ne représente pas la façon majoritaire dont les ado la découvrent. J'aurais aimé qu'il y ait un épisode sans sexe, mais visiblement c'est trop dur pour des scénaristes. C'est la vie des ados qui devait être représentée, pas celle de la majorité des adultes.

Les ficelles sont assez grosses, je commence personnellement à me lasser du trope du jeune gay qui se lie d'amitié avec son conseiller d'orientation qui surprise, est empathique parce qu'il est aussi gay (on a déjà vu ça dans heartstopper, mais aussi dans d'autres séries pour ado, c'est un peu redondant). Il y a un manque de rythme et il faut au moins attendre l'épisode 3 pour qu'il y ait plus de développement au niveau du caractère des personnages, mais on se centre beaucoup trop à mon goût sur Chester (Qu'en est-t-il d'Ariana ou de Delilah, qui avaient un bon « terreau » mais qui n'ont même pas eu droit à un épisode entier consacré à elles, alors qu'il y avait plus de matière à explorer dans leur personnalité ? Alors que Chester, le gay un peu extravagant, est super prévisible, et donc un peu ennuyeux.)

Je trouve cependant intéressant qu'on suive le pdv de la mère qui est dans le déni complet de ce que vit son fils Nathan, ca rajoute un relief qui manquait. C'est aussi intéressant de voir les stéréotypes qui planent en particulier sur les hommes bi, ca rajoute un réalisme et un intérêt (enfin) à cette série : celui de la sensibilisation, qui n'était dès lors que très faible jusqu'ici. Je commençais à peine à penser que ça relevait le niveau (il y avait un début de romance sans sexualité...mais non, il a fallu qu'il y ait un dirty talk. Dommage, et toujours pas de personnage explicitement asexuel à l'horizon.) De plus, je sais que les personnages bisexuels sont prétendument compliqués à écrire, mais je déplore cette manie qu'ils ont à les faire papilloner. Encore une fois, il y a des façons moins stéréotypées de les montrer.

Un autre défaut, c'est qu'on a pas l'impression que toutes les classes sociales sont représentées : le contexte est particulier, il ne représente que des jeunes venant de familles qui s'en sortent plutôt bien, je ne suis pas sûre que ca parle forcément à la jeunesse queer de manière générale (où le principe d'intersectionnalité est d'autant plus présent). La série fait presque totalement fi des problématiques de coming-out, de précarité et de solitude, on a à faire quand même à des ados qui peuvent se permettre d'avoir des immenses voitures décapotables et d'aller à des soirées quand ils le souhaitent ; est-ce bien représentatif de la jeunesse queer américaine ? C'est pratique, ils peuvent s'échapper des situations difficiles quand ils le veulent. De plus, il n'y a quasiment pas de personnage introverti.

Je sais que la série se voulait « feel good », mais si on fait un parallèle avec Heartbreak High, on se rends compte du problème : cette dernière au moins introduisait des personnages qui avaient ces problèmes liés à la solitude, au doute quant à sa sexualité tout en conservant ce côté « feel good » (si je prends sex education, même remarque).

Je ne sais pas si c'était volontaire de faire l'impasse sur ces sujets pour en aborder d'autres, mais c'est sûr que ca aurait mérité d'avoir d'autres saisons pour fouiller ces sujets là liés à l'identité.

En parlant d'identité, ca aurait apporté quelque chose de faire en sorte que le seul personnage qui semble être asexuel le dise, ou du moins que le mot soit prononcé à un moment donné : la série à beaucoup répété les termes de gay et bi, brièvement la transidentité, non-binarité et le lesbianisme, mais l'asexualité, bien que présente et pas si mal représentée, elle, n'est pas nommée, ce qui est bien dommage. Aïe !

C'est certain que ca ne relève pas le niveau d'un heartbreak high ou d'un sex education, mais ca reste pas mal et divertissant. Pour la note globale, je mettrais 6/10, à l'image de « Please Like Me » que j'ai vu l'année dernière, qui avait certains éléments intéressants mais une sexualisation à outrance des personnages homos et bis. Sauf que dans cette dernière, ils étaient plus âgés, ce qui justifie un peu plus ce fait.