GITS : SAC Solid State Society est le troisième long-métrage adaptant le manga Ghost in the shell de Masamune Shirow. A la différence des deux chefs d'oeuvre de Mamoru Oshii, le film de Kenji Kamiyama (ancien collaborateur de Oshii, notamment sur ses propres adaptations du manga original) fut produit pour une chaîne câblée de la télévision japonaise et n'eut donc pas les honneurs à l'époque d'une sortie en salles. Ce qui ne veut pas dire que cette troisième itération n'a pas bénéficié de moyens conséquents (à peu près le même budget que le film de 1995, à quelques yens près) et d'une qualité d'écriture et de production à la hauteur des attentes.


L'intrigue se situe directement dans la continuité des deux saisons de la série Stand Alone Complex. Plusieurs mois se sont passés depuis l'affaire des Onze Individuels et le Major Motoko Kusanagi a démissionné de la Section 9. En son absence, un nouveau hacker dénommé Le Marionnettiste pirate les ghosts de terroristes militaires, les poussant à commettre des actes homicides et suicidaires. En enquêtant sur cette vague de piratage, la section 9 met au jour une sale affaire impliquant la disparition inexpliquée de dizaines d'enfants et dont les ramifications remontent jusqu'aux plus hautes sphères du gouvernement. Bientôt Batou croise la route du Major laquelle se contente de le mettre en garde contre le "Solid State" avant de disparaître.


Dès la première saison de la série Stand Alone Complex dont il fut l'ordonnateur, l'apport du réalisateur Kenji Kamiyama à la franchise GITS aura éludé une bonne part de la portée méta-physique du diptyque d'Oshii pour privilégier une approche socio-politique plus pragmatique. Ce qui eut pour effet de décevoir les admirateurs de l'oeuvre d'Oshii ainsi que les animefans avides d'action, d'humour et de fantaisie (pour cela, mieux valait qu'ils se rabattent sur les multiples déclinaisons d'Appleseed).
Solid State Society, tout comme les deux excellentes saisons auquel il fait suite, s'inscrit pleinement dans une optique de SF réaliste et high-tech. De fait, l'intrigue de ce troisième opus se démarque d'autant plus de l'approche stylistique et thématique du diptyque d'Oshii en adaptant de manière plus fidèle le manga de Shirow dont le fil conducteur n'était autre que cette fameuse traque du marionnettiste déjà relatée dans le tout premier long-métrage. Mais qu'on ne s'y trompe pas, Solid State Society est moins un remake qu'une variation du manga original, un véritable thriller politique digne de l'oeuvre de Shirow.


Le scénario déroule ainsi une intrigue aux ramifications apparemment complexes mais finalement plus simple qu'elle n'y paraît, impliquant cyber-terrrorisme, complot politique et critique sociale. Ce dernier point participe grandement à différencier l'oeuvre de Oshii de celle de Kamiyama, celui-ci abordant de manière bien plus évidente que son prédécesseur et non sans précaution, la question délicate du nationalisme japonais et de ses dérives probables via les incessants progrès de la technologie informatique et les dangers qu'elle représente, tels l'assujettissement de l'individu. C'est peut-être cette dimension politico-sociale qui amoindrit probablement l'impact du film (comme de la série) de Kamiyama sur le public occidental. Et c'est probablement pour cette raison que certains spectateurs se désintéresseront rapidement de cette intrigue ouverte à de trop nombreuses interprétations pour ne pas paraître un rien nébuleuse, voire parfois contradictoire.


Toujours est-il que chez Kamiyama comme chez Oshii, la question fondamentale du rapport de l'homme à la technologie reste prépondérante, l'humain et la machine n'ayant jamais été aussi proches de la fusion totale que dans l'univers de Ghost in the Shell. Preuve en est ici, cet énigmatique Marionnettiste en lequel on retrouve à un degré moindre les itérations thématiques cristallisées par le Puppet Master du film de Oshii, la dimension intello-philosophique en moins.


Tout comme l'oeuvre du réalisateur d'Innocence, le film de Kamiyama interpelle autant qu'il fascine le spectateur par la beauté de son animation et l'intelligence de son questionnement. Et si Solid State Society ne rivalise jamais avec l'excellence artistique du diptyque d'Oshii, force est de reconnaître les qualités indéniables d'une oeuvre qui concluait de manière fort magistrale la série Stand Alone Complex.

Buddy_Noone
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le 13 févr. 2019

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Buddy_Noone

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