Keep Your Hands off Eizouken!
7.8
Keep Your Hands off Eizouken!

Anime (mangas) NHK (2020)

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En 2014, un anime dénommé Shirobako nous avait plongé dans la réalité de la création d’animes japonais, un sujet périlleux et fascinant. Six années plus tard (le temps passe), Eizouken ni wa te wo dasu na (alias Eizouken) aborde le même thème mais réussit, non sans panache, à nous faire découvrir l’art de l’animation sous un nouvel angle.


Alors que Shirobako déploie ses efforts pour montrer, avec candeur et humour, les défauts d’une industrie, Eizouken contraste en embrassant l’idylle d’une jeunesse optimiste et au potentiel illimité. De bout en bout, cet anime est l’histoire de trois adolescentes réalisant leur rêve dans le monde de la japanimation.


Hormis la patte visuelle distincte du studio Saru, la série commence sans originalité autour de l’établissement d’un club scolaire. L’échelle plus réduite choisie pour cette oeuvre, par rapport à un réel studio d’animation, permet une approche centrée sur trois rôles spécifiques qui sont incarnés par les trois personnages principaux. Nous avons d’abord, Midori Asakusa, la réalisatrice du groupe, réservée mais possédant une imagination débordante. Ensuite vient Tsubame Mizusaki l’animatrice top-modèle énergique qui est obnubilée par le mouvement. Enfin, Sayaka Kanamori la pragmatique du triptyque endosse l’étiquette de productrice et canalise l’énergie de ses deux compères pour faire avancer les intérêts du club.


Il y a également quelques autres acteurs secondaires, qui viennent s’ajouter de manière plus anecdotique pour combler les besoins en son et en arrières-plans des différents projets du trio. Cependant, l’objet de dévotion principal est sans aucun doute l’animation en elle-même, ce qui est par ailleurs assez paradoxal pour une oeuvre basée sur un manga. Eizouken s’engage avec passion dans de nombreuses séquences informatives et divertissantes qui nous montrent les subtilités de la discipline et la beauté de voir s’animer ses créations, sans oublier quelques trucs et astuces pour faciliter le dynamisme et l’illusion du mouvement.


Mais le plus grand charme de la série reste sa manière d’exposer le processus créatif qui mène à ces animations. Eizouken est à l’opposé de ces oeuvres de fiction où des artistes sortent des chefs-d’oeuvres de l’éther, et arrive ici à nous faire comprendre comment des toiles aussi vivaces que riches en profondeur peuvent jaillir de canevas vides. Pour représenter comment la magie s’opère, la série propose de nombreux moments d’onirisme, où l’imaginaire des protagonistes prend le dessus sur la réalité, devenant un exutoire où se déversent des idées qui s’entremêlent, se nourrissent entre elles et engendrent finalement une vision concrète que les héroïnes infusent dans leurs projets. Ces passages de rêveries constituent généralement le moment fort de chaque épisode, grâce à leur contenu mais aussi leur forme très travaillée, ainsi que leur ambiance planante réussie.


Eizouken est définitivement plus confortable dans sa nature fictive que devant tout sens de réalisme. Que ce soit par l’architecture de la ville dépeinte, très stylisée et hors de toute norme urbaine standard, l’outrance de Sayaka dans la résolution de problème ou bien encore dans le portrait caricatural de ses « antagonistes » (gardes du corps de Tsubame et conseil des étudiants). Sur ce dernier point, l’anime ne s’appesantit pas sur les confrontations et évite généralement toute forme de drama, qui ne se prête pas à l’atmosphère optimiste et l’énergie irradiant du club d’animation.


Les remarques susmentionnées résument suffisamment Eizouken et arrivé à la fin du premier arc narratif, après quatre épisodes, on pourrait penser avoir fait le tour de l’oeuvre. Honnêtement, c’est en grande partie le cas et j’ai trouvé que la série perdait de son lustre, surtout lors des épisodes cinq et six, alors qu’elle reprenait les mêmes formules sans réelles innovations.


Cela dit, cela ne l’empêche pas de demeurer de bout en bout intéressant, surtout quand les personnages sont confrontés à des sujets plus complexes ; les divergences quand plusieurs artistes ayant une vision différente travaillent sur même oeuvre par exemple, ou comment aller plus loin que simplement dessiner des choses « cools ». Les protagonistes gagnent également plus de personnalité durant les épisodes tardifs lorsque l’anime explore, avec une sensibilité surprenante, leur passé et leur motivation profonde. Il y a donc suffisamment de renouvellement pour éviter qu’Eizouken devienne trop répétitif.


Un dernier atout à mentionner est l’adaptation elle-même. Le travail de Studio Saru sur l’anime est méritoire, même si pas toujours impeccable, et malgré les difficultés, qui ont contribué au burnout de son réalisateur, Masaaki Yuasa, l’on peut dire que lui et son équipe ont su donner vie à l’oeuvre, au point d’avoir bien du mal à s’imaginer se mettre au manga après en avoir fait l’expérience. Pour beaucoup, l’aspect visuel d’Eizouken sera un point d’attraction majeur.


En conclusion, j’ai apprécié ce qu’Eizouken avait à offrir : sa passion pour le sujet de l’animation et sa capacité à dépeindre l’inventivité de cerveaux féconds. L’oeuvre subit, de mon point de vue, un léger essoufflement en cours de route et je n’ai pas été suffisamment impressionné pour en faire un incontournable mais je recommande tout de même à tout ceux intrigués, même vaguement, après cette lecture.

Skidda
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le 19 déc. 2020

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