Désamorcer la haine

Avec son logo très fistinière, la série des engageays pose le ton d'office. Un ton qui me faisait très peur vu l'unilatéralité qu'un tel titre, au vu d'un contexte politique évidemment tourné vers le milieu LGBT. On pressentait un manichéisme qui risquait clairement de nous faire lâcher l'affaire. Le premier épisode est totalement dans cette tendance, à savoir des militants LGBT ultra agressifs dans leurs revendications et en face des politiques de droite unilatéralement catégorisés homophobes, magistrats durs, vilipendés avec des discours flous à grands renforts de chiffres n'existant nulle part... Bref, je m’apprêtais à mettre 2/10 quand le second épisode commence à creuser un peu plus ses personnages. Et enfin, on commence à mieux y voir.

Déjà en divisant la communauté, qui finit d'ailleurs explosées en individus tous très différents, chacun avec ses conceptions et ses idées. Ainsi, les deux pôles de la série seront Thibault, militant radicalement pro-lgbt (la série ose avec lui quelque chose d'inhabituel dans les 2 derniers épisodes de la première saison, un truc assez audacieux pour être relevé sur le terrain politique de l'associatif), et Amaury, employé comme porte parole de la mairie et défendant une politique de discrétion du milieu (c'est à dire d'empêcher la gay pride, ou tout du moins encadrer son organisation). Ainsi, la série fait finalement le choix d'enrichir son sujet en montrant de nombreux échanges argumentaires opposants ces deux visions, régulièrement poussées dans la radicalité et portées par des personnages plus ou moins pétris de contradictions. En variant régulièrement les points de vues de son approche (on parle du milieu associatif, mais aussi de son utilisation par les politiques), Les engagés parvient à dépasser l'écueil du manichéisme, tout en parvenant à apporter des nuances à une palette colorée et loin d'être unie. Bien évidemment, quelques petites lourdeurs seront à accepter (la prise de position pour le port du foulard sous l'angle de la solidarité féministe, l'incessante nécessité d'être agressif dans les médias pour occuper le terrain en face de la droite qui monte...), mais le ton a tendance à rechercher l'honnêteté, et la mise en scène plante un quotidien plutôt honnête pour le milieu homosexuel.

Cette absence de manichéisme est à la base du titre, puisque la vulgarisation n'idéalise finalement ni les causes, ni les acteurs militants. Elle introduit une distance qui manque régulièrement au cinéma LGBT qui se revendique politique/social (ici, la manif pour tous est défendue par certains homosexuels, impliquant déjà des divergences sur le mariage). Ce parti pris, inhabituel, permet à la série d'emporter plus facilement le morceau. Pas garanti que cette légère neutralité (puisque la cause lgbt est au coeur des préoccupations, et donc nécessairement prioritaire) soit conservée dans le ton du récit, mais tout de même, l'effort français est noté dans cette tentative, qui s'essaye par moments à la stylisation visuelle de ses éclairages à base de couleurs et de musiques électro.