Les Liaisons Dangereusement revisitées

Vu les deux premiers épisodes. Isabelle, après avoir été dépucelée par un libertin, se retrouve à devoir se marier avec le marquis de Merteuil, à la fois pour se venger mais aussi pour conquérir Paris !

S’il devait avoir une petite déception au Festival de la Fiction 2025, ce serait malheureusement cette série. Malheureusement parce que les acteurs, la mise en scène, les décors, les costumes et mêmes les idées sont brillants ! Mais hélas ! tout ça pour ça ! (pour le moment)

En fait, le problème est que l’intrigue part très rapidement dans une direction inattendue et je n’arrive à savoir si c’est une bonne chose ou pas ! Là où je m’attendais qu’Isabelle ne devienne marquise qu’à la fin de la saison 1, en fait, elle le devient à la fin de l’épisode 1. Et d’une manière si rocambolesque et simpliste que je me suis un moment demandée s’ils avaient pas sauté une partie du récit. Ce qui semblait, à mon sens, être l’enjeu principal de la série (ou à défaut des premiers épisodes), a été rapidement résolue, créant d’autres enjeux, tout aussi intéressant que celui-là… mais, du coup, on se demande s’ils vont être résolus avec une même agilité, du moment que le scénario a besoin de passer à autre chose.

Du reste, les pistes qu’on propose avec cette arrivée de nouveaux personnages sont franchement très intéressantes, mais était-ce vraiment nécessaire de tous les introduire dans les deux premiers épisodes ? Je veux dire, il y a certains personnages, je ne m’attendais pas à les voir avant au moins une saison 2… Au demeurant, il y a plein de petits éléments un peu bizarres : les noms qui sont mal prononcés pendant une bonne partie des deux premiers épisodes (la continuation de cette habitude à ne pas articuler les dialogues, je suppose), un duc s’appelle « Royan » (une ville qui devait être un petit village à l’époque, alors la possibilité que ce soit un duché…), quelques détails de costumes étranges…

Bref, j’en attendais beaucoup et suis peut-être déjà déçue…

En fait, le problème vient aussi d’une conversation que j’ai eu avec une scénariste juste avant la séance : la Marquise de Merteuil est un des meilleurs personnages féministes de la littérature française pour la simple et bonne raison que c’est une garce. Et une sacrément belle ! C’est même probablement la seule qui soit à ce point si vicieuse, si cruelle, si horrible qu’elle en devient un de ces personnages d’une complexité rarement égale dans la culture mondiale (oui, carrément) ! Voir deux mini-séries, en l’espace de trois ans (Dangerous Liaisons avec Alice Englert dans le rôle de la marquise), s’attaquer aux origines des protagonistes déviants en comptant leurs origines… de l’héroïsme à la perversion a quelque chose de profondément frustrant ! Même si l’exercice est réussi, cela ne change pas cette… simplification outrancière de deux des meilleurs personnages de la littérature française ! C’est transformer un personnage des plus diaboliques en princesse féministe incomprise à cause du patriarcat. Soyons honnête : Merteuil est une princesse féministe incomprise à cause du patriarcat dans le bouquin… mais elle est aussi une reine cruelle et sadique qui a repris les codes misogynes patriarcales à son propre compte pour mieux les détourner. S’est-elle perdue en chemin dans sa quête effrénée de pouvoir ? Pas sûre.

Et c’est là tout le problème avec ce genre de série : parce que même en montrant Merteuil comme déjà sûre de son désir avant de découvrir le libertinage, même en la montrant comme ambitieuse dès son plus jeune âge, par essence, on la présente comme une figure sympathique promise à un destin tragique à cause des hommes ! Et c’est dommage… surtout quand la série a l’air de lentement mais sûrement se diriger vers un « en fait, c’était ça la véritable histoire de Merteuil ; c’est ça ce qui s’est vraiment passé… le roman s’est gourré sur toute la ligne (alors qu’en plus, c’est un roman épistolaire) ».

Ps : Au moins la série en fait une vraie noble et non une fille du peuple qui réussit à épouser un marquis, à une des époques les plus conservatrices et fermées de l’Histoire de France.