Cette citation tirée de l'ouvrage "Pantagruel" de l'écrivain et humaniste français Rabelais est sujette à plusieurs interprétations, mais pourrait très bien s'appliquer à ce drama. Mouse n'est pas qu'un simple polar, c'est aussi une part non négligeable de thriller d'épouvante, de drame psychologique reposant sur un narratif de science fiction dont la réalité n'est pas aussi éloignée qu'on veut nous le faire croire. Il y aussi des éléments mystiques et spirituels à prendre en considération, comme également un fait sociétal qui ouvrira matière à débat sur le devenir de l'espèce humaine. Cette série très longue comprend 20 épisodes, à laquelle il faut ajouter un téléfilm bonus trouvable en VOST anglais, et qui s'insère entre les épisodes 15 et 16. Mais à quelques exceptions près, vous n'allez jamais trouver le temps long. Je tiens à vous prévenir que si la réflexion, l'exigence d'un scenario en béton armé et complexe ne sont pas une priorité pour vous, ce n'est même pas la peine de visionner Mouse.
Notre histoire débute en 1995, lorsque le "décapiteur", un assassin psychopathe est enfin arrêté au bout de un an, après avoir commis 18 meurtres, sur une erreur qui va lui être fatale. L'horreur sera à son comble quand on apprendra qu'il s'agit du plus grand neurochirurgien de Corée, le professeur Han Seo-Joon qui faisait des expériences sur les cerveaux. Dans le même temps, son meilleur ami, le docteur Daniel Lee, a réussi à isoler le mutagène qui rend une personne psychopathe dès sa conception, et propose au cabinet présidentiel de faire voter une loi à l'Assemblée Nationale pour faire avorter toutes les femmes susceptibles de donner naissance à des monstres potentiels. Condamné à mort, Seo-Joon croupit toujours en prison en 2020, date à laquelle l'action principale va vraiment commencer. C'est l'année où une série de meurtres en série angoisse le pays. Tous les soupçons se portent sur Sung Yo-Han(Kwon Hwa-Woon), un médecin qui ne serait autre que le fils de Seo-Joon. Deux policiers, un chevronné alcoolique, dénommé Ko Mu-Chi(Lee Hee-Jun) et un autre débutant, Jung Ba-Reum(Lee Seung-Gi) vont être amenés à travailler ensemble pour arrêter ce monstre.
Ne vous étonnez d'être un peu perdu ou décontenancé durant les 6 premiers épisodes, çà m'a fait cet effet. J'ai même failli arrêter au 8eme vu que je croyais que l'affaire était close, et qu'on allait nous faire du remplissage. J'avais tout faux, car en fait Mouse est découpé en plusieurs parties. Il faut garder un minimum de concentration pour bien suivre l'enquête et ne pas être perdu, car le contenu est très dense. Certains éléments vous sont donnés durant l'intrigue, mais on passe facilement et involontairement à coté. C'est assez frustrant mais c'est voulu. Mais la chose à toujours garder à l'esprit c'est de ne jamais prendre pour acquis tout ce que l'on veut bien vous montrer.
Pourquoi l’assassin a toujours un coup d’avance sur la police? Lisez attentivement les ST, regardez bien certaines scènes, on vous donne beaucoup d’informations, mais qui ne sont pas évidentes à décoder la première fois. Il semble être protégé.
Car l'histoire multiplie les fausses pistes de manière extraordinaire, subtile et probante. Tous les personnages qu'on vous montre dans le passé comme dans le présent sont tous liés d'une manière ou une autre, ils ne sont pas là par hasard. Tout le scénario est construit de manière logique, et les évènements s'accélérant dans le dernier tiers du drama, on ne pourra plus décrocher, comme dans une soif d'en savoir plus. Les attitudes et les comportements de certains personnages évoluent au fil du temps. Dans le dernier tiers, le polar va prendre une autre tournure puisque des éléments extérieurs à toutes ces affaires vont venir s'imbriquer et la partie thriller prendra le dessus. Et si tout cela n'était en fait que le sommet de l'iceberg? Quelqu'un tirerait-il les ficelles de cette affaire qui prend en définitive sa genèse en 1995?
Vers la fin on va en effet apprendre que si le tueur a pu commettre autant de meurtres sans être inquiété, c'est qu'il est protégé et couvert par une personne qui contrôle de près ou de loin
Dans ce polar, nous sommes confronter à toute l'horreur d'un homme qui n'en a plus que le nom. Car le scenario va faire ressentir en nous tout un panel d'émotions que ce psychopathe est incapable de ressentir, étant privé de toute empathie, suivant sa propre logique depuis son enfance. Logique qui prend aussi sa source dans sa non rencontre avec Dieu, mais je n'en dirais pas plus. Disons que la partie mystique n'étant pas à négliger durant le récit puisqu'elle fait aussi partie intégrante du fil conducteur, cet élément étant récurrent dans bons nombres de k-dramas, la Corée étant de culture mixte chamanique et chrétienne.
Mouse c'est aussi une réflexion métaphysique de toute beauté. Sommes nous tous déterminés dans nos choix depuis la conception, ou bien c'est notre environnement et notre entourage qui font ce que nous sommes et nous serons? Es ce que si la partie science fiction du drama (la possibilité d'identifier si un fœtus est porteur d'un mutagène ou du génome de la psychopathie) devenait une réalité dans les années à venir? Tous les psychopathes ne passent pas à l'acte violent et meurtrier, mais devrions nous éviter un tel risque par n'importe quel moyen pour nous en préserver?
Les personnages principaux sont construits de manière épatante, les bons comme les mauvais. Sous leur carapace, ils portent tous en eux le poids de leur enfance torturée, meurtrie par des souffrances extrêmes, qui en font tous des êtres à fleur de peau et instables psychiquement. Leurs relations est logiquement sans cesse conflictuelle. Et c'est là qu'intervient la justesse dans le jeu des comédiens. Lee Hee-Jun, Park Ju-Hyun et Kyung Soo-Jin sont très bons, mais que dire de la prestation extraordinaire de Lee Seung-Gi? Cet acteur aux multiples talents est épatant et porte de manière magistrale et bluffante son personnage complexe de Jung Ba-Reum. Je pense sincèrement que sans lui, le drama perd une partie de son substrat. On vit à travers lui. Dans Mouse les relations entre les protagonistes sont complexes, reposant souvent sur de faux semblants, des mensonges et des non dits. Il n'y a que très peu de temps mort, et le rythme est soutenu du début à la fin malgré la longueur du drama.
L'ambiance générale qui se dégage est très spéciale, envoutante et prenante. La mise en scène est de toute beauté, les dialogues aux petits oignons, bien servie par un OST et une photographie de qualité(mais quelques ratés quelques fois). Les flashback ne sont jamais lourds et sont là pour étoffer le propos ou une situation présente. Alors oui, tout n'est pas parfait, à commencer par une chose récurrente dans les dramas coréens : l'âge des comédiens. En effet les personnages de 1995 qui avaient déjà la quarantaine, n'ont quasiment pas vieilli en 2020, ce n'est pas très crédible. Parfois, on a aussi tendance à vouloir donner trop d'explications de manière scolaire que ça en devient confus. Ou alors c'est le contraire comme ici :
Pourquoi les deux femmes, l'infirmière et la femme du "décapiteur" ont accepté aussi facilement d'échanger leur bébé à la naissance en 1995? Prouver qu'un psychopathe ne deviendra pas forcement un meurtrier? Surtout qu'on apprendra que l'un des deux n'en est pas un.
Et le floutage des couteaux, des scènes gores ou des opérations chirurgicales que le diffuseur coréen avait fait, a été malheureusement gardé par Amazon, dommage, cela nuit à 'immersion. Il y a aussi certains raccourcis (certes peu nombreux) pour faire raccorder des scènes entre elles.
J'ai volontairement éludé certaines parties du scenario pour ne pas vous spoiler. Si vous voulez vraiment savoir de quoi il retourne pour avoir des éléments de réponse en plus, sans pour autant vous flinguer l'intrigue, vous pouvez lire cela:
Le postulat de Mouse repose sur une conspiration au sein des rouages de l'Etat qui remonte en 1995, quand la loi sur l'avortement des fœtus présentant le gêne de la psychopathie ne fut pas présentée à cause du refus du Président. Le tueur en série n'est pas seul et fait partie d'un programme d'assassins suivis depuis leur enfance, car listés. D'abord tuant au hasard des innocents, certains sont "reprogrammés" pour tuer d'autres assassins.
Vous allez forcement ressortir ému et bouleversé de Mouse, et peut être même avoir de la compassion (sans pour autant excuser ses atrocités), quand de psychopathe, le tueur ressent enfin des émotions pour la première fois de sa vie, qui implique une construction totale de sa psyché avec toutes les conséquences qui en découlent. Il y a de quoi devenir fou quand la conscience qui était absente de notre être nous envahi subitement. Je n’ai jamais vu autant de rebondissements dans un scénario, même à la fin quand on croit tout savoir, on se trompe encore. La conclusion est logique, car même si le tueur est mis hors d'état de nuire et condamner à mourir de toute façon, ceux qui tiraient les ficelles dans l'ombre ont gagné et ont obtenu ce qu'ils voulaient.
En dehors du polar en lui même, c'est surtout des sujets sociétaux et philosophiques qui sont mis sur le tapis comme l'eugénisme, la manipulation mentale ou tout simplement la condition humaine. Mais n'oubliez pas que l'histoire se déroule dans une réalité alternative, sinon vous allez parfois refuser certaines situations. (comme par exemple l'émission de TV ou des évolutions scientifiques). Vous en voulez encore plus? Visionner Mouse: The Predator qui s'intercale entre les épisodes 15 et 16 de la série(uniquement en VOST anglais). Pour finir, pourquoi le titre Mouse? D'après vous dans les laboratoires les souris sont destinées à quoi?
Main Theme: Sojung - It's Okay
Additionnel OST: OST Playlist