Ozark
7.3
Ozark

Série Netflix (2017)

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Critique écrite en Avril 2020


Marty Byrd est un expert comptable, co-associé avec son meilleur ami dans une boîte de gestion de patrimoine. Marié, deux enfants, grande maison à Chicago, rien d’anormal dans leur vie. Si ce n’est qu’ils partagent tous un petit secret. Cela va faire dix ans qu’ils blanchissent de l’argent pour le second plus gros cartel de Mexico, sans aucun désagrément jusqu’à maintenant … jusqu’à ce que l’un d’eux se pense capable de doubler le cartel à leur insu. Quelques barils d’acides plus tard, voici la famille Byrd dos au mur, obligée de promettre la création du plus gros système de blanchiment d’argent des USA dans une petite ville perdue du Missouri, à Ozarks.
Sans aucun confiance de la part de leurs employeurs, et encore moins vis à vis des locaux, les voici lancé dans le grand manège de l'extorsion, chantage, intimidation et rachat, dans un monde ou le stockage même de l'argent est problématique tellement le liquide coule à flot, et ou mensonges et trahisons sont monnaie courante. Parce que tout le monde ne peut pas gagner, et que la table est trop petite pour accueillir tous ces joueurs, il y aura forcément des laissés pour compte…


J’avais regardé la saison 1 quelque temps avant la sortie de la saison 2, il y a un an, et j’ai re-regardé la série entière ces 3 derniers jours pour enchaîner sur la 3e saison.
Chaque saison comporte 10 épisodes, de 1h chacun, avec une exception pour le dernier épisode de la saison, qui atteint les 1h20.
Le ton général de la série est sérieux et anxiogène ; la famille Byrd est oppressée de toute part, que ce soit les menaces de mort du cartel, le FBI, les dealers locaux ou les rednecks du coin, chaque rencontre et discussion peut mal tourner. C’est sans compter sur les tensions familiales, qui ne cessent de remonter à la surface, sous forme de vérité cachée ou d’adultère, et l’on essaie de tenir bon sous le dogme sacré de "protéger sa famille”. La mort plane au-dessus des Byrd, les carcasses d’animaux s’amassent sur leur parvis, le vieillard mourant s'enterre vivant au sous-sol, et des cadavres remplacent leurs interlocuteurs.


Marty Byrd est un homme froid, calculateur, qui ne laisse que très peu transparaître ses émotions. L’acteur, Jason Bateman, connu principalement pour son rôle dans Arrested Development, incarne parfaitement ce personnage au profil amical et lambda, mais qui ne sait plus offrir que des remarques acérées, et n’a que des sourires crispés comme signe de son humanité. Le parallèle maladroit pourrait être fait avec Breaking Bad, sur plusieurs points ; les cast principaux, qui viennent tous deux de sitcoms populaires, et sont mis dans des contextes dramatiques ou ils doivent faire face à leur double vie de dealer de drogue … Sauf que ça s'arrête là. D’un point de vue scénario, la ou Breaking Bad s’intéresse à la descente aux enfers progressive d’un Walter White tout puissant perdant toute notion d’éthique, c’est toute la famille Byrd qui donne tout et se démène pour survivre un jour de plus ; lorsqu’il est question de prise de pouvoir, ce n’est que trop souvent une fuite en avant pour tenir un peu plus longtemps face au piège qui peut, au prix d’efforts constants, être retardé, mais jamais arrêté.


Du côté du style, on est sur du méthodique : la caméra se tient à distance des personnages, les mouvements de caméra à l’épaule se comptent sur les doigts de la main, les plans sont fixes et une couleur “dollar sale” vient refroidir l’image en absorbant toute chaleur et signe de vie à l’écran ; la photographie est simple et soignée, pour ne pas éloigner notre attention des dialogues extrêmement riches et cyniques qui sont délivrés en rythme continu. La VO est un must, les accents de la région des Ozarks sont à savourer (big up à Ruth).


La série se veut plutôt cérébrale, et fonctionne principalement grâce à ses personnages approfondis. La saison 1 est pour moi la meilleure : on prend plaisir à découvrir d’épisode en épisode la construction tumultueuse d’un réseau de blanchiment d’argent, les solutions sont risquées et inattendues, la tension est palpable tout du long et atteint un final d’exception. Et si l’on a apprécié, on en redemande, et la saison 2, bien qu’elle ait du mal à démarrer, se renouvelle et continue de faire évoluer ses personnages dans des directions toujours intéressantes, et la mise en avant du cast féminin est bien amené. Ce qui m’a déplu c’est le changement de focus : la ou dans la saison 1, on avance à taton, sans solution précise, la saison 2 se fixe un objectif à atteindre dès le départ, ce qui éclaircie la trame principale mais allège l’investissement personnel du spectateur. La saison 3 enfin, nous promettait un changement de focal et un changement de fonction parmi les personnages ; elle s’essouffle malheureusement assez vite, avec des dénouements prévisibles, et en tombant dans des facilités plutôt … inattendues, et on se demande si certains choix étaient appropriés.


Je recommande à tout amateur de série dramatique froide, calculatrice, avec une emphase sur l’écriture et les personnages. Elle ne révolutionne rien dans le genre, mais ce qu’elle fait, elle le fait très bien. Assez bien pour que j’en regarde 30h en 5 jours. Et puis, qui n’aime pas regarder des sociopathes manipuler d’autres sociopathes ?

LeSerpentMarrant
8

Créée

le 13 janv. 2022

Critique lue 43 fois

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