Annoncé il y a un petit moment, Penny Dreadful poursuit la voie initiée par d'autres séries d'horreur telles que The Walking Dead, Hemlock Groves ou American Horror Story. Si la deuxième saison de cette dernière m'avait laissé une impression particulièrement forte, je dois dire que la troisième m'avait plutôt laissée sur ma faim malgré ses indéniables qualités. J'attendais donc Penny Dreadful au tournant pour me procurer à nouveau quelque chose de plus ... premier degré.


À l'instar de la collection "1800" publiée chez Soleil (dont je recommande fortement le diptyque "Grand Anciens"), on retrouve ici un habile mélange des mythes du XVIIIe siècle et des légendes urbaines de l’Angleterre victorienne. Les références aux grands classiques de la littérature fantastique sont nombreuses mais chacune est savamment mises en scène, en ayant l'intelligence de ne pas hurler sa source au spectateur dès la première seconde, lui laissant le temps de deviner ce qu'il a sous les yeux grâce aux indices disséminés ça et là qui sauteront à la gorge des lecteurs amateurs de ce genre très particulier de littérature.


Autant l'avouer immédiatement, le fantastique est un genre littéraire que j'affectionne tout particulièrement et face à un tel cri d'amour au genre qui fut tant malmené ces dernières années (http://michaelallanleonard.files.wordpress.com/2012/11/goon-34-fc-fnl-copy.jpg), je risque de manquer fortement d'objectivité, vous voilà prévenus. On a là une série qui connais les ténors du genre et entends bien leur rendre hommage avec respect. Servi par un casting d'exception, le show pose lentement ses bases mais sans oublier ses origines "pulp"; on alterne ainsi des séquences lentes à l'esthétique léchée avec des scènes plus dynamiques saupoudrées de suspense. Le rythme n'est pas sans rappeler la lecture de Bram Stoker ou Mary Shelley.


Concernant l'aspect horrifique en soi, la mise en scène se base sur des ficelles certes connues mais maîtrisées. Oui la plupart du temps on voit venir ce qui va se passer, mais c'est exécuté dans les règles de l'art. Les producteurs n'ont pas lésiné sur le gore et POUR UNE FOIS la nudité n'est vraiment, mais alors vraiment pas là pour satisfaire la libido d'ados prépubères dont le but est de baver sur des abdos bêtement déballés (du moins dans le pilote, pas sûr que ça reste purement macabre par la suite). On a donc une série qui ose et qui maîtrise, je ne peux qu'espérer que le niveau se maintienne pour la suite et qu'on obtienne un rendu de qualité similaire pour les séries du genre à venir que sont "The Strain" et "Constantine". Mon seul regret est l'intuition que mes deux ouvrages fantastiques préférés ne seront probablement pas abordés car peu communs avec le reste des classiques évoqués. Ce qui ne m'empêchera pas de suivre avec le plus grand intérêt ce qui s'annonce comme une splendide lettre d'amour de ce pan du 7e art à la section du 6e qui l'as tant nourri. Car après tout, les plus vieux classiques du cinéma d'horreur ne doivent-il pas leur existence aux romans dont ils sont directement inspirés ? Le cinéma de genre ne serait probablement pas ce qu'il est aujourd'hui sans l'influence des écrivains qui l'ont précédé.


EDIT 16/05/2014 : Épisode 2


Penny Dreadful continue sur sa lancée avec des références toujours plus jouissives à la littérature fantastique. Les performances d'acteur de Timothy Dalton m'impressionnent encore davantage de par la palette d'émotions qu'ils parvient à véhiculer avec son visage (j'en viens à rêver de le voir jouer le rôle principal des Montagnes Hallucinées pour qui je voyais peu d'acteurs capable d'exprimer la terreur absolu d'un simple regard). Eva Green n'est pas en reste avec une performance bluffante bien que volontairement grand-guignolesque tandis que Billie Piper qui m’insupportai dans Doctor Who semble avoir gagné en expérience ce qu'elle a perdu en pudeur. Peut-être que la compagnie du fondateur des seigneur du temps l'a davantage assagie que celle du plus excentrique que nous connaissons tous.


Quoiqu'il en soit, mon appréciation de l'épisode peut se résumer à :


"J'aime vraiment ce qu'ils ont fait du personnage de Victor, on ressent toute la mélancolie qui émane de "l'autre" même si j'aurais préféré quelque chose de plus proche de l'originNOOOLLYSHIT !"


(Épisodes 3 à 6 à développer ultérieurement)


EDIT 25/06/2014 : Épisode 7


Mon incapacité à m'exprimer avec modération est sans doute de nouveau à l’œuvre, aussi je m'excuse de sonner une nouvelle fois comme un fanboy sans la moindre objectivité mais je ne me souviens pas avoir jamais vu autant d'acteurs et d'actrices effectuer des performances aussi sidérantes au sein d'un seul épisode d'une même série. Je suis conscient qu'il y bien d'autres séries soutenues par des castings tout aussi talentueux mais le cumul de talent étalé ici dans une suite de scènes hautement dérangeantes m'a juste sidéré. Même si certains qualifieraient cela plutôt comme du surjeu, la prestation d'Eva Green est à couper le souffle, littéralement terrifiante.


Un point qui me sidère toujours quand je discute cinéma est de voir revenir l'argument du physique des acteurs/actrices intervenir dans leur popularité davantage que leur talent. Je ne dis pas non plus que tous les doués sont nécessairement moches, bien au contraire, mais quand une actrice est souvent acclamée pour sa beauté et qu'elle parvient à vous inspirer un profond dégoût à s'en décrocher la mâchoire dans un rictus d’écœurement, là je dis chapeau.


Sa performance glaçante est ici accentuée par les réactions non moins terrifiantes des autres protagonistes tous interprétés avec la plus extrême justesse. Timothy Dalton fait à nouveau usage de l'incroyable palette d'émotions dont est capable son visage pour accentuer encore davantage l'ignominie qui se déroule sous nos yeux horrifiés tandis que Josh Hartnett exprime à la perfection ses moments de doutes ou à l'inverse : de détermination pure. Ajoutez à cela le jeune Harry Treadaway qui incarne Victor avec beaucoup plus de talent que je ne l'aurais cru ainsi que des personnages secondaires qui parviennent à se hisser au niveau des têtes d'affiches et vous obtenez un tableau baroque d'une beauté à la fois sidérante et profondément dérangeante, à l'image de "La leçon d'anatomie du docteur Tulp" de Rembrandt où l'on s'extasie devant le talent des coups de pinceaux avant de réaliser qu'on a sous les yeux un corps refroidi en cours de dissection.


EDIT 02/07/2014 : Épisode 8


Un final parfait qui prend toutes les bonnes décisions.
La première saison trouve ici son point culminant à tout point de vue, les différentes intrigues entremêlées se rejoignent plus que jamais pour une conclusion grandiose aussi bien sur le plan visuel qu'émotionnel. Les plans sont toujours aussi lents et calculés avec ce méthodisme d'une froideur cadavérique qui met si bien en avant le tragique des situations, on ressent au plus profond de soi l'extrême détresse dont les personnages font tour à tour l'expérience avant de pouvoir espérer une quelconque rédemption. Une fois de plus, le talent des acteurs à véhiculer des émotions est d'autant plus saisissant qu'il est présent aussi bien pour les têtes d'affiches que pour les seconds rôles. L'intrigue principale voit la tension monter de manière phénoménale avec un suspense palpable au point d'en retenir sa respiration. Le tout suivi d'un épilogue parfaitement abouti là où de nombreuses œuvres s'étalent parfois jusqu'au superflus. Ici rien ne manque et rien n'est de trop.
Jusqu'à la dernière phrase...
La dernière question...
Et la plus parfaite des réponses.


EDIT 13/05/2015


Loin des ficelles faciles de la frayeur frénétique glorifiée par les films fantastiques sans véritable fond, Penny Dreadful prône une lenteur aussi réfléchie et calculée que son atmosphère froide et méphitique.


Si l'odorat faisait parti des sens sollicités par le visionnage de cette série, notre cerveau ne saurait probablement pas distinguer s'il s'agirait de champs de roses agrémentés de lavande ou des entrailles d'un nouveau né délaissé par des loups après avoir prit une bouchée. Probablement un mélange tordu des deux.


L'esthétique de cette série, aussi bien visuelle que sonore, est tellement parfaite et dérangeante que j'ai encore du mal à croire qu'elle puisse exister. C'est le genre de bijou qu'on imagine pas une seconde passer l'aval des producteurs avides d'argent. Et pourtant, par un miracle cosmologique qui dépasse mon entendement, cette série est bel et bien là, et elle semble partie pour durer plusieurs saisons avec ça.


EDIT 07/07/2015 (Saison 2)


La photographie de Barry Lyndon, la mise en scène de Shining, le développement narratif délibérément lent de 2001 L'odyssée de l'espace, le trash de Full Metal Jacket, l’amoral d'Orange Mécanique et le malsain d'Eyes Wide Shut, le tout au service des plus grands classiques de l'horreur du cinéma fantastique des années 30.


Je commence à comprendre pourquoi cette série me fascine tant. La dernière fois qu'une œuvre m'a évoqué à ce point la perfection des films de Stanley Kubrick, c'est quand j'ai découvert la filmographie de Nicolas Winding Refn.

VincentMotte
9
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Créée

le 5 mai 2014

Modifiée

le 1 juil. 2014

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Vincent Motte

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