Re:Cutey Honey
7.6
Re:Cutey Honey

OAV (2004)

Les deux premiers OAV sont splendides. Le studio qui fait cette nouvelle version de Cutie Honey s'est transcendé, mais le niveau baisse progressivement avec un troisième OAV plus décevant et une vraie difficulté scénaristique quand l'histoire se veut plus sérieuse, plus psychologique et sombre.
Il ne s'agit pas tellement d'un remake du manga ou de la série d'origine, car l'histoire suit sa propre évolution. En revanche, il y a une fantastique assimilation de l'esprit Go Nagai et de l'esprit Cutie Honey à la fois dans l'esthétique et dans le traitement de l'héroïne. On a eu une vraie immersion dans la culture pop flashy (l'héroïne s'appelle Honey Flash) des années 60. On a droit à des personnages de cartoons avec la note particulière des policiers miniatures qui sourient tout le temps sans raison et qui sont Go Nagaïsques en double, surtout si on pense à la caricature que faisait Go Nagai de lui-même pour commenter les cases de Mazinger Z et Cutie Honey. Le traitement caricatural et dynamique est à la fois une somme du cartoonesque de la fin des années 90 et du début des années 2000, et bien sûr d'un cartoonesque plus rétro des mangas japonais, époque Tezuka, Go Nagai, Leiji Matsumoto. Ce cartoonesque apparaît encore quelque peu dans City Hunter ou Dragon Ball, mais il s'est complètement réduit comme peau de chagrin et aujourd'hui le cartoonesque n'est pas du tout selon les mêmes modalités, quand on regarde le chibi ou les sorties caricaturales d'un style autre dans Dr Stone, Demon Slayer ou Full Metal Alchemist. Je ne sais pas trop comment expliquer les différences en deux lignes, mais elles y sont, et donc cet animé est une modernisation avec les possibilité dyanmiques de l'animation actuelle du style cartoonesque des mangas sinon des animés des années 60 et 70. Pour faire cela, Cutie Honey est idéal, car la série a de vrais motifs d'influence tardive des sixties sur le Japon du début des seventies.
On a droit donc à des images qui nous sortent complètement du "réalisme" des animés japonais des trente dernières années, par réalisme j'entends un traitement qui fuit l'ancienne impression de caricatures, de rigolades bon public, d'images qui s'avouent des images au lieu de se faire discrètes ou charmeuses dans le récit non perturbé par leurs saillies. On a droit évidemment à du mouvement, à des jeux sur la perspective, et on se régale. On a aussi un jeu sur les traits appuyés délimitant nettement les pourtours du personnage, ce n'est pas la ligne claire à la Tintin quand même, mais c'est rétro. On a aussi les déformations très agréables sur les bâtiments avec des impressions ludiques. L'humour est potache et s'aligne sur les bases de Go Nagai. une méchante fait de sa poitrine deux missiles qu'elle tire et qui vont s'écraser sur celle de l'héroïne qui lui explique qu'elle les a bien plus fermes. On a un autre monstre qui a un canon à la place de l'entrejambes avec sexualisation métaphorique confirmée pour pas mal de situations de combats.
Pas facile de reprendre de nos jours ou récemment, le personnage de Cutie Honey qui doit être à la fois coquinement enjoué et innocent. Nous sommes habitués à des animés qui se permettent d'aller franco de port dans le grivois, pas évident de retrouver l'équilibre du passé. C'est pas simplement de faire du pervers à la Go Nagai : il y a une alchimie à respecter, car Cutie Honey est dans une touche de pervers bon enfant, une espèce d'absence de pudeur qui n'exclut pas la délicatesse. Cette Cutie Honey est exceptionnelle et rivalise même avec la figure originale du manga lui-même. J'ai adoré aussi la sensualité subtile du coeur sur la joue. C'est vraiment un érotisme chou, sulfureux, mais pas choquant, un truc sympathiquement contagieux qui ne fait pas vulgaire. C'est très accrocheur et ça séduit naturellement. On a aussi ce jeu sur les visages d'ingénue de Cutie Honey, parfois bien évidemment dans les situations les plus improbables.
La femme policière est un atout neuf de cette adaptation, puisqu'elle ne vient pas du manga lui-même, mais c'est un peu celle qui commence en Javert avec une conception intraitable de la justice puis qui évolue en femme bien prête à donner tout son coeur, même si la scène lesbienne du second OAV tombe un peu comme... une surprise, on va dire une surprise (il n'y a pas de cheveu dans la soupe). Les scènes de nudité sont vraiment réussies, c'est tout à fait l'érotisme des 70's et on a vraiment le cachet dont on ne saurait s'offusquer, c'est loin du ecchi actuel, etc., là on a un érotisme qui plaît, qui passe crème, qui réjouit sans fausse note, et pourtant il y a de la nudité, de la sensualité, du jeu. C'est très coquin tout en étant regardable en famille. Il n'y a pas ce moment cru, à part pour la scène "lesbienne", où la sexualité n'est une chose claire que pour les adultes.
Dans le second OAV, deux patronnes ennemies sont en rivalité, la petite peut inquiéter un peu avec son côté gamine chibi machiavélique hyper puissante tout en étant un gros bébé, mais heureusement le traitement a été impressionnant de justesse, résultat impeccable. La fin du second OAV nous la joue pouvoir régénérant de l'amour, mais ça passe. En revanche, le troisième OAV a un côté plus rushé et les images cartoonesques deviennent moins inspirées, plus quelque chose de mécanique pour poursuivre sur une lancée. L'histoire se prend un peu plus au sérieux, avec une discussion du côté de la douche entre les deux héroïnes qui vaut son pesant de cacahuètes. C'est l'OAV de trop ou alors les réalisateurs ont cru à une progression d'épisode en épisode, mais pour moi ça ne le fait pas, c'est moins bon, la transition n'est pas bien faite et cette dernière tonalité n'est pas maîtrisée, les idées sont tout de suite moins bonnes.
J'allais oublier de parler des méchantes, les panther claws. Go Nagai n'est pas un si grand dessinateur que ça au plan technique, mais c'est un inventif de folie, il a un feu intérieur qui lui fait créer des choses d'une puissance de suggestion phénoménale, et c'est bien sûr le cas avec ses démons et aussi avec les expressions faciales ou les vues en contre-plongées avec les superpositions du dominé et de la tête géante du monstre un peu en oblique comme une direction d'attaque à 45°, etc. Il y a quelques images saisissantes de Jill. Dans le second OAV, une méchante en tenue moulante bleue, bien que sa tête soit hideuse, est rendue très sensuelle avec l'élan de son corps et les deux pointes sur sa tête, en tout cas quand on la voit de dos. On a une efficacité fantasmatique à la Go Nagai, un rendu des terreurs de visages menaçants à la Go Nagai, qui vient compléter la réussite du visage ingénu et désireux d'être aimée de la penaude Honey Kisaragi.
La célèbre musique Honey Flash est également utilisée comme un leitmotive, mais chacun des trois épisodes fait près de 45 minutes, et comme la musique a une sorte de retrait pas tout à fait entraînant, ça marche bien sur les 20 premières minutes du premier OAV, mais continuer d'y recourir abondamment ensuite, c'est pas du plus bel effet, ça crée une sorte d'ennui alors que ce qu'on voit n'est pas ennuyant. Je pense que se modérer de temps en temps aurait été mieux.
Bref, même si le scénario n'est pas toujours au top, c'est un régal esthétique et un excellent rendu érotique de la série de Go Nagai avec une très bonne expression métaphorique d'une puissance au combat qui naît donc de la pulsion érotique... C'est réussi, c'est artistique et original !

davidson
8
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le 22 sept. 2020

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davidson

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