Travail d'artisan.

Edward Ez avait été le demi-finaliste d'un concours "faites votre 3615", de l'époque bénie du *36**15 Usul* sur le site jeuxvideos.com.
Il a monté une première chronique intitulée L'histoire du jeu vidéo, dans laquelle il incarnait un prof d'histoire remplaçant qui décidait de tenir ses élèves en leur faisant un cours sur le seul sujet qui e passionnait vraiment : le jeu vidéo. La chronique avait le mérite de marier harmonieusement fiction et contenu (ce que n'arrivait pas à faire Maxime Robinet dans Le fonds de l'affaire).

En 2016, jeuxvideos.com a décidé de faire le ménage dans ses chroniques, en imposant à tous ses contractuels de trouver de nouvelles idées de chroniques. Edward Ez a en fait grugé en intitulant sa nouvelle chronique Rétrodécouverte. En réalité, il n'y a pas de formule prédéfinie, on trouve différents formats d'émission sous ce même nom. Partons des moins originales vers les plus originales :

Dans certaines (sans doute les moins captivantes), Edward continue de faire l'historique d'une console, d'une franchise (Luigi, Boo, les Simpsons...) dans le jeu vidéo.

Dans d'autres, il fait des tops.

Ces deux formats sont les moins originaux. Il faut dire que le sillon commence à être sérieusement creusé sur le net. Edward Ez essaie cependant de proposer une forme plaisante et un tant soit peu originale.

D'autres chroniques exhument des jeux oubliés et réservent parfois quelques surprises (il faut dire qu'à la différence d'Edward, j'ai décroché depuis longtemps de Retrovision.

Plus fort, il arrive souvent qu'Edward prenne contact avec d'anciens développeurs français, qu'il interviewe (Yannick Cadin, créateur du premier jeu Ubisoft ; Pierre Gilhodes, créateur de Woodruff ; Serge Payeur, celui de Peur sur Amityville, etc...). Ce sont des épisodes émouvants et baignés de nostalgie et de respect.

Enfin, certains épisodes se lâchent et sont de vrais petits courts métrages dans lesquels Edward se met en scène. Il y en a toujours pour cracher dessus sur jeuxvideos.com (et sa commmunauté dégueulasse), mais ils sont très propres et représentent un vrai travail de cadrage, d'étalonnage...

D'aucuns n'aiment pas trop le style d'Edward, sa diction bien plus soignée que beaucoup de vidéastes, ses vannes un peu doudou-fan-de-BD-Dargaud-étriqué. Je peux le comprendre. Mais on ne peut nier qu'il fournit un travail important et soigné, un vrai travail d'artisan, qui sait se renouveler, tant dans l'écriture (ses vidéos ont un vrai sens du rythme, avec une narration solide qui rappelle le Polanski de La neuvième porte) que dans la mise en scène. Et mine de rien, dans le registre de l'homme face au quotidien, il a un visage expressif qui facilite l'identification.

En fait, son humour souriant et faussement candide est une bouffée d'air frais sur un internet où les vannes à base de memes commencent à devenir étouffantes. C'est bien de tomber sur quelqu'un qui utilisent ses propres références un peu vieux jeu pour faire ce qu'il aime, sans se poser la question de savoir si le public suivra forcément.

Par sa douce ironie et une forme de poésie du quotidien, Edward Ez est au fond le digne successeur du 3615 Usul, le message revendicatif en moins.

Mention spéciale à ce nouvel épisode sur les Sims. Au début, on se dit que c'est bourré de digression et on cherche où il veut en venir. Puis on comprend qu'il voulait faire passer des figures qui l'ont inspiré, et que le choix des Sims et d'une coloc était particulièrement malin :

Avec le peu de budget qu'il a, Edward Ez fait un bon boulot, on lui souhaite bonne continuation.