Journaliste dans un canard de Saint-Louis, Camille Preaker est envoyé par son rédacteur en chef à Mind Gap, bled paumé du Missouri, suite à la disparition inquiétante de deux gamines. Camille connait très bien cette ville, et pour cause, elle y a passé son enfance et y a perdu sa jeune soeur dans des conditions sordides similaires. En plus d’une demeure ancestrale où réside encore une famille très particulière, elle a laissé à Mind Gap de sombres souvenirs. Des traumatismes qui parfois font battre sa peau meurtrie quand vient la nuit. Son retour en amnésie relative ne se fera donc pas dans l’allégresse, accueillis par des « autochtones » qui n’ont jamais quitté un circuit fermé où tout se sait mais reste tu, et où chacun semble avoir des cadavres sous les pierres à camoufler. Camille va mener l’enquête, envers et contre toute elle-même.
La beauté des images est impressionnante. Cette lumière, ces couleurs ! Posées comme un vernis étincelant, qu’on met du temps à accepter de gratter pour contempler les miasmes et la crasse qui se masquent derrière sa couche. Avec ou sans l’aide d’un montage tonique, incisif et de caméras subjectives, parfois surfant sinueusement entre les flash-backs, Jean-Marc Vallée parvient subtilement et incidieusement à poser une ambience étrange et unique. Où le malsain est partout derrière les peaux, la beauté des costumes de scène, les sourires silencieux qui en disent bien trop long, et le maquillage du fard filtrant les artifices.
Mais derrière cette beauté plastique et formelle, et en plus de sa capacité à y injecter un sentiment de délicieux malaise, Jean-Marc Vallée se révèle tel un virtuose pour ce qui est de retranscrire à l’image certaines complexités féminines intra-familiales. Avec une bienveillance encore une fois très particulière. Cette même bienveillance, en tous cas dans l’intention, qui fait naître parfois des abjections. Où comment souvent, cette dernière, est avant tout la garante du maintien d’un patrimoine psychotique...
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