Stargirl
5.6
Stargirl

Série The CW (2020)

Un peu plus près des étoiles de l'Âge d'or (saisons 1 & 2)

SAISON 1:


Avouons-le d'emblée, dans l'univers très embouteillé des séries de super-héros, notamment DC, l'arrivée discrète de Stargirl (personnage déjà apparu en live dans "Smallville" et "Legends of Tomorrow") ne suscitait pas notre plus grand enthousiasme. Encore assommé par la médiocrité de la première saison de "Batwoman", on ne misait en effet pas grand chose sur cette héroïne teen au visage poupon et détentrice d'un spectre cosmique capricieux.
Mais, à bien y regarder, on pouvait déjà avoir un bon pressentiment à son sujet : même si celle-ci est diffusée sur la CW aux USA, la série est avant tout issue de la plateforme DC Universe comme "Titans" et "Doom Patrol", elle n'est donc pas directement affiliée à l'Arrowverse sur le plan créatif (la donne est différente en ce qui concerne l'univers partagé, le personnage a été évoqué lors du gros crossover "Crisis of Infinite Earths" et, au cours de la diffusion de la première saison, la CW a annoncé que la suite des aventures de "Stargirl" passera complètement sous son giron, ce qui est peut-être annonciateur de rencontres avec les autres super-héros du network...)


Cet a priori positif a vite trouvé une confirmation avec l'impressionnante séquence d'ouverture du pilote : une bataille entre la Justice Society of America et la Injustice Society qui, autant du point de vue du budget fourni que celui de ses ambitions visuelles, met à l'amende n'importe quelle saison entière de l'Arrowverse tant le résultat est tout simplement un pur bonheur de quelques minutes pour tous les amateurs de comics DC de la grande époque !
C'est d'ailleurs de là que "Stargirl" va tirer sa plus grande force : son côté solaire sorti tout droit du temps révolu de l'Âge d'or des comics DC mais qui ressurgit soudainement à notre époque moderne avec une nouvelle génération de super-héros, menée par Stargirl, prête à venger la défaite de l'ancienne face à une Injustice Society agissant toujours l'ombre. Quelque part, le cadre lumineux offert à ces jeunes super-héros en devenir dévoilés d'épisode en épisode est à la fois la contre-proposition et le compagnon idéal à celui sombre des héros de "Titans", série ayant bénéficié du même effet de surprise par la réussite de sa première saison (on ne peut pas en dire autant de la deuxième).


Avec des personnages principaux en grande partie adolescents, on aurait pu craindre le pire niveau sous-intrigues lycéennes/niaiseuses mais non, encore une fois et sans pour autant les éviter, "Stargirl" parvient à les enrober de sa vision légère et idéaliste pour les intégrer avec pertinence à la construction de sa mythologie (tout n'est pas cependant du même niveau, la quête de vengeance de Hourman est par exemple bien plus simpliste que le portrait de Wildcat, ado brisée par son entourage).
Transcendée également par cet éclat cosmique, l'héroïne en elle-même et avec laquelle on pensait avoir le plus grand mal en devient étonnamment attachante par sa volonté de privilégier les actes en fonçant tête baissée plutôt que de se figer autour d'éternels atermoiements super-héroïques.
Ce caractère de tête brûlée se retrouvera également dans les futurs coéquipiers qu'elle sera amenée à rencontrer et tous devront jongler entre leurs perspectives personnelles et leur nouveau statut de groupe superhéroïque pour comprendre et combattre une menace qui les dépasse. Dans cette optique, leur mentor (et beau-père de Stargirl) Pat Dugan/Stripesy/S.T.R.I.P.E se révélera comme un personnage particulièrement savoureux à voir évoluer : au départ, simple cliché adulte de ces sidekicks lisses et oubliés des héros de l'Âge d'or des comics, ce stéréotype de l'Américain moyen (Luke Wilson, parfait) va véritablement gagner en profondeur humaine par son nouveau rôle de guide, en restant dans les règles de ce genre de personnage pour laisser le devant de la scène à Stargirl et ses acolytes.


Lorsqu'elle se fixe sur les plans secrets des membres de la Injustice Society, "Stargirl" n'oublie pas de baisser intelligemment la lumière de son ambiance pour mettre en valeur la présence de chacun de ses excellents super-vilains charismatiques (la plupart sont incarnés pour la première fois en live).
D'ailleurs, si la nouvelle génération de super-héros doit composer avec le poids de l'héritage de leurs modèles et retrouver l'esprit collectif de la JSA, leurs adversaires de la Injustice Society incarnent quant à eux des figures maléfiques à la stabilité de plus en plus diverse : même si la poursuite de leur but commun dans l'ombre a assuré leur unité au fil des années, les doutes et la fuite vers le mirage d'une vie plus apaisée se sont mis à gagner certains pendant que d'autres sont restés figés dans leur sadisme caricatural de vilains (parfois même dépassé par la nature ambitieuse de leur propre progéniture, le personnage de peste Cindy/Shiv est tout simplement excellent en ce sens). Cette faction d'ennemis hétéroclites sera forcément fascinante à suivre aussi bien par l'ambiguïté de leurs rapports que par la cruauté de leurs actes. Celle-ci ira même jusqu'à prendre un sens encore plus schizophrénique avec la révélation des objectifs qu'ils veulent instituer pour leur projet tant espéré de "Nouvelle Amérique".


Chose encore plus louable, cette première saison de "Stargirl" va se révéler étonnamment constante sur le plan qualitatif. Certes, la série reste bien entendu perfectible en bien des points pour dépasser le simple stade de divertissement au ton si irrésistible mais, on a beau chercher, il n'y a quasiment rien à jeter dans cette fournée de treize épisodes tant l'ensemble de cette première aventure fut si plaisante à découvrir de bout en bout ! Véritable vivier de références absolument jouissives pour tous les fans de l'univers DC, "Stargirl" est resté sur la droite ligne de son délicieux charme rétro digne de l'esprit le plus classique des comics ! En guise de bouquet final, les deux derniers épisodes auront même carrément fait figure d'un mini-blockbuster épique qui n'a rien à envier aux grosses machines du genre.


Espérons désormais que le passage acté de la série sur la CW ne ruine pas ses ambitions par un manque de budget ou des crossovers à outrance, "Stargirl" mérite mieux et peut encore vraiment nous surprendre si la singularité de sa proposition demeure dans le vaste monde actuel des séries de super-héros. Gageons que son créateur Geoff Johns saura conserver intacte la flamme cosmique qui nous a tant plu lors de cette première saison...


—————


SAISON 2:


Courtney Whitmore et la Justice Society of America nouvelle génération sont de retour pour faire face à leur plus grand combat : être les héros d'une saison 2 à la hauteur de l'enthousiasme suscitée par la précédente !
En plus d'un passage de la feue plateforme de streaming DC Universe à la chaîne (teen-)CW qui, déjà, laissait craindre une baisse de ses prétentions qualitatives en amont (ses consœurs "Titans" et "Doom Patrol" ont eu, elles, l'honneur d'être reprises en exclusivité par la bien plus prestigieuse HBO Max), "Stargirl" doit également lutter avec la fameuse épreuve que représente toute deuxième saison pour une série : trouver un équilibre entre les conséquences des événements de la première, notamment les séquelles de sa géniale bataille finale, et les jalons à poser d'une aventure inédite au moins aussi épique. Et, même si la lumière est grande en Courtney et ses amis, il faut reconnaître que cela faisait sans doute un peu trop, même pour leurs super-pouvoirs, tant la première partie de cette saison 2 va se prendre le sceptre cosmique dans le tapis pour gérer à la fois sa multitude de protagonistes (anciens et nouveaux à construire) et l'entremêlement entre son jeune passé et son devenir.


Côté personnages, retrouver toute la petite bande de "Stargirl" est évidemment un plaisir et l'arrivée de certaines nouvelles figures de l'Âge d'or DC avec ce si grand respect de traitement dont fait toujours preuve la série à leur égard relève à chaque fois d'un bonheur inespéré pour tout amateur de comics, la fameuse séquence de la tea-party de The Shade (parfait Jonathan Cake) ou les maladresses du génie Thunderbolt en sont les meilleurs représentantes pendant que d'autres attendent encore un moment plus adéquat pour briller (en vert en ce qui concerne la fille de Green Lantern, son arrivée précipitée dans le premier épisode de la saison ressemble surtout à un bon coup de promo pour avoir un nom connu à délivrer dans les trailers), mais cela fait aussi beaucoup, beaucoup trop de points de vues à aborder à chaque nouvel épisode et le passage de l'un à l'autre se fait d'ailleurs souvent par des choix de montage hasardeux au sein de ceux-ci, véhiculant même d'étonnants moments de flottements auxquels le tempo de "Stargirl" ne nous avait jamais habitué jusqu'alors.
De plus, il faut bien avouer que les intrigues liées au sort de chaque personnage, notamment quant aux traumatismes des héros suite à leur précédent affrontement, ont un intérêt plus que variable, mettant sur une même et curieuse échelle de gravité la peur d'un divorce parental et des sentiments de culpabilité bien plus significatifs (entre autres), alors que la menace de la saison peine encore à s'imposer et préfère temporiser entre la construction d'une néo-ISA (menée par la toujours aussi formidable Meg DeLacy en peste blessée) et les manifestations croissantes d'Eclipso.


L'avènement de ce grand super-vilain dans cette deuxième saison va heureusement redonner à "Stargirl" tout son éclat d'étoile !
Après un rapide premier round réunissant déjà la JSA face au diablotin cruel, ce sera l'épisode 6, clé de voûte de la saison (comme son aînée), qui gommera les errements de la première partie et, mieux, leur donnera un véritable sens en en faisant la principale source d'avidité de ce vilain particulièrement machiavélique. Devenant littéralement l'incarnation d'un passage obligé du processus super-héroïque, Eclipso va en effet prendre un malin plaisir à manipuler ses adversaires et les confronter à leur part d'obscurité la plus douloureuse en vue de les emprisonner dans leur désespoir. Dès lors, retrouvant de bonnes partitions chorales pour enfin aborder avec équilibre et justesse les failles de ses héros devant ce mal insidieux, "Stargirl" ne cessera de monter en gamme pour malmener la nouvelle JSA au cours d'épisodes aux concepts efficaces afin de mettre en valeur cette forme de combat intérieur (une nuit où tout le monde fait face à ses ténèbres respectives en simultané ou un passage dans un certain monde "d'ombres"), parsemés de très bonnes surprises jouant sur la perception de mirages provoqués par Eclipso et de retours dans le passé d'une JSA bien plus trouble qu'on ne pouvait le supposer.
Sur la même bonne lancée, "Stargirl" conjuguera tous ces éléments dans un final qui, certes, n'atteindra peut-être pas le degré d'epicness de la mêlée générale de la première saison (tout n'est pas au même niveau visuellement non plus) mais dont le côté spectaculaire des ambitions et la générosité de rebondissements d'une VRAIE bataille finale de super-héros ne pourront qu'asseoir un peu plus la place de "Stargirl" dans le haut du panier des séries DC contemporaines. Et, vu les savoureuses pistes mises en place pour la saison 3, quelque chose nous dit qu'elle est bien partie pour y rester...

RedArrow
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 15 août 2020

Critique lue 1.2K fois

3 j'aime

8 commentaires

RedArrow

Écrit par

Critique lue 1.2K fois

3
8

D'autres avis sur Stargirl

Stargirl
RedArrow
7

Un peu plus près des étoiles de l'Âge d'or (saisons 1 & 2)

SAISON 1: Avouons-le d'emblée, dans l'univers très embouteillé des séries de super-héros, notamment DC, l'arrivée discrète de Stargirl (personnage déjà apparu en live dans "Smallville" et "Legends of...

le 15 août 2020

3 j'aime

8

Stargirl
dark_vador
7

Venger Starman...

Le scénario est assez manichéen, les gentils héros contre les méchants (mais ça ne me dérange absolument pas pour ce type de série).... Après avoir vu les 3 premiers épisodes qui sont de très bonne...

le 1 juin 2020

1 j'aime

3

Stargirl
LInfo_Tout_Court
4

Laborieuse introduction

Saison 1 : Malgré un pilote désastreux et nombre d’épisodes pauvrets, la première saison de Stargirl s’est révélée plutôt bien construite, même si l’émancipation fut laborieuse. Au final, Stargirl...

le 21 mai 2020

1 j'aime

Du même critique

Nightmare Alley
RedArrow
9

"Je suis né pour ça."

Les premières minutes que l'on passe à parcourir cette "Nightmare Alley" ont beau nous montrer explicitement la fuite d'un homme devant un passé qu'il a cherché à réduire en cendres, le personnage de...

le 19 janv. 2022

72 j'aime

16

Umbrella Academy
RedArrow
5

L'Académie des 7 (saisons 1 & 2)

SAISON 1 (5/10) Au bout de seulement deux épisodes, on y croyait, tous les feux étaient au vert pour qu'on tienne le "The Haunting of Hill House" de personnes dotés de super-pouvoirs avec "The...

le 18 févr. 2019

67 j'aime

10

Bird Box
RedArrow
6

Sans un regard

L'apocalypse, des créatures mystérieuses, une privation sensorielle, une héroïne enceinte prête à tout pour s'en sortir... Le rapprochement entre cette adaptation du roman de Josh Malerman et "Sans...

le 21 déc. 2018

66 j'aime

7