Saison 1
Je ne suis pas calé en séries médicales. Je n’ai jamais regardé Urgences, j’ai à peine vu quelques épisodes de Grey’s Anatomy, j’ai découvert Scrubs l’année dernière… Il n’y a guère que House que j’ai suivi assidûment (sans jamais voir la dernière saison). Et puis The Knick et M*A*S*H, mais ça ne compte pas.
C’est donc avec un regard plutôt vierge que je me suis lancé dans The Pitt, avec pour seule préconnaissance sa rythmique en quasi temps réel (45 minutes par épisode pour figurer une heure). Ce que je ne savais pas, c’est que cette logique s'applique sur l’intégralité de la saison. Quinze épisodes deviennent alors une journée de service. Une journée éreintante qui mériterait d’être découverte d’une traite (11h15, c’est quoi? Un marathon LOTR?) pour que la mécanique soit poussée à son paroxysme. Car de mon côté, je l’ai dévorée en trois jours, et c’était infaillible : pas le temps de s’ennuyer, pas le temps de souffler, c’est le burn-out assuré pour le spectateur, comme pour les urgentistes. Une immersion totale.
Et une telle série aujourd’hui, ça ne peut être que politique. Car enfoncer à maintes reprises l’administration sur les coupes salariales, le manque de personnel, la déconnexion des cadres face aux travailleurs sur le terrain, c’est directement à charge contre les allocations gouvernementales au secteur de la santé. Que ce soit aux USA ou en France, c’est le même combat, et on comprend bien que si à la fin de la journée la rupture nerveuse ne s’achève pas, c’est bien car ces hommes et femmes font ça par vocation. Heureusement qu’on les a applaudi à 20h pendant deux mois…
D’ailleurs, une série médicale post-Covid ne peut qu' adresser l’éléphant dans la pièce, et c’est ce que fait le show de R. Scott Gemmill en prenant le taureau par les cornes et en refusant la moindre ambiguïté sur la connerie latente d’une société des fakes news et du conspirationnisme. Les antivax, en prennent pour leur grade, et sont traités comme les crétins finis qu’ils sont. De même que The Pitt n’hésite pas à brasser toutes les problématiques modernes qui touchent au domaine médical : avortement, transidentité, tueries de masse, homoparentalité, masculinisme toxique propagé par les réseaux sociaux, culte du superficiel, aide à la fin de vie, ravages de la crise des opiacées… Le panel est très large (si large que le peu de probabilité de voir tous ces cas débouler sur une même journée fait ressortir les ficelles télévisuelles) et est sans équivoque, abordant chaque thématique par le biais de la santé du patient. Les imbéciles crieront “woke !” sans même chercher à comprendre. Mais ce sont les mêmes que The Pitt dépeint par cet électeur MAGA qui poireaute en salle d’attente : des gens petits, au raisonnement étriqué, se sentant au-dessus de la masse.
Alors pendant tout le service on sue, on craque, on pleure, on se reprend, on rit dès que l’occasion le permet, et on continue de trimer jusqu’à ce qu’on nous demande de partir. Tout cela en compagnie d’une ribambelle de personnages que l’on apprend à connaître au travers de leurs réactions et interactions, et qui s’éloignent des clichés attendus : nul n’est bon ou mauvais, chacun fait de son mieux et tente d’écarter le personnel pour venir à bout du service.
Une chose est sûre, je réembauche pour la saison 2.