Years and Years
7.7
Years and Years

Série BBC One (2019)

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Même si cette mini série, Years and Years, ne m'a au fond pas complètement satisfait (j'y reviendrai plus tard), elle demeure un objet culturel qui mérite une attention particulière tant elle recèle quelque chose de galvanisant sur à peine 6 épisodes.


Déjà, la première chose qui m'a tenu en haleine d'entrée c'est le rythme savamment dosé que ce soit en terme de scénario que de mise en scène.


Je ne connaissais pas Russell T Davies auparavant mais il a clairement un don pour esquisser en quelques traits des personnages auxquels nous allons nous attacher en un éclair.


J'y vois dans sa démarche notamment la volonté de mettre en quelque sorte à jour les archétypes primaires propre à la fiction (particulièrement britannique).
Ainsi le courageux chevalier (ou qui va apprendre à le devenir) prend les traits d'un responsable dans les logements sociaux, son grand frère, le jeune roi, est une sorte de "trader" qui va voir ses "terres conquises" lui filaient entre les doigts aux côtés de sa valeureuse femme venant d'un autre clan, ou encore le druide qui s'incarne dans une ado nerd... etc.
Bref, j'ai trouvé cet aspect amusant pour peu qu'on le cerne et sinon ça ne fait que démontrer une nouvelle fois la force inépuisable de ces figures fondamentales.


Le personnage de la conteuse m'a emmené à cette lecture bien évidemment mais aussi la révélation finale, où l'on apprend d'où nous ai "raconté" l'histoire...


Puis pour ce qui est du concept qui animera le récit tout du long, il est aussi simple que très ambitieux. Une famille que l'on suit pendant 15 ans au grès des événements qui troublent le monde et par extension leurs vies.


Dès son pilote, la mayonnaise prend : une sorte d'anti Black Mirror qui se serait débarrasser de son cynisme pour plutôt épouser les codes du soap moderne (à la This Is Us ou plus vieux Six Feet Under) afin de proposer un aspect quotidien, plus réaliste, plus proche de nos vies.


Le tout servi dans une mise en scène et un montage efficace qui vaut notamment pour la façon dont les conversations par téléphone, skype ou autre sont subtilement mis en place.
C'est peut être un détail, mais c'est pour moi la première fois que ces moyens de communication, tous ces écrans que nous utilisons tous les jours, trouvent une forme filmique satisfaisante.
Beaucoup se sont creusés la tête pour mettre en scène nos vies numérique et j'ai tout simplement trouvé ici enfin une justesse qui exclu tout artifice de réalisation.


Ce qui m'amène maintenant à l'aspect "anticipation" de Years and Years.


Il y a un réel effort dans le fait de proposer une anticipation qui se veut soi disante réaliste, en essayant notamment d'inclure la technologie naturellement dans le quotidien. Mais j'en regrette un manque de réelle réflexion profonde dans le contexte.


Car comme quasi tout récit d'anticipation, cette projection n'est qu'un commentaire de notre présent. Sauf qu'ici j'ai eu la sensation qu'au fond ce n'était qu'une bête copie des événements que l'on voit déjà. Rien de plus. Rien de moins. La même chose, copié collé.
L'ascension de cette femme politique n'a rien de surprenant. Les 11 boulots en freelance. Les banques, l'écologie...
Bref, je me suis vraiment demandé en quoi l'auteur avait une vision propre de l'évolution de tout ça ou si juste il voulait faire une caricature d'aujourd'hui.
Ce qui pourrait être suffisant en soit mais je ne pouvais personnellement pas m'empêcher d'attendre d'être surpris par tel ou tel éléments concernant le futur que l'on me présente ici.


comme celui des "disparus" qui arrive beaucoup trop tard dans la série, comme un cheveu dans la soupe mais qui aurait pu emmener à une réflexion sur l'identité, le territoire, l'idée de patrie etc...


Pleins de sujets prometteurs donc, mais qui, peut être par manque de moyen, ne sont traités qu'en surface. (la série aurait mérité d'être peut être plus longue )


Notamment le sujet du tranhumanisme qui, si je devais choisir, est pour moi la grande déception en ce qui concerne le côté anticipation de cette série.
On reste au ras des pâquerettes alors que cela nous est proposé dès le départ.
C'est personnellement une des questions les plus essentielles du monde moderne, philosophiquement et sociologiquement. Sauf qu'ici il n'y a aucun véritable débat.
Une phrase de temps en temps qui enfonce une porte ouverte...


Pour résumer, tous ces points touchant à l'anticipation sont, je trouve, traités de manière plan plan sous couvert d'un soi disant réalisme.
"La technologie, le transhumanisme, tout ça tout ça... parfois c'est bien, parfois c'est pas bien..." " La société de contrôle c'est parfois bien, parfois c'est pas bien..." et ça s'arrête là. Comme si l'histoire nous disais "Bwarf, c'est comme ça, on fait avec". Non ! Développe ! Donne moi ton point de vue ! Je ne veux pas que t'en fasse des caisses avec des trucs improbables mais juste confronte moi pleinement à ces sujets série !


Sans compter l'épisode final et ses gros sabots mélangeant tout à coup un dénouement Shakepearien d'un côté à une morale culcul déclamé sans inventivité entre la poire et le dessert de l'autre. Tout en rajoutant une espèce d'ouverture finale digne d'un téléfilm SF des débuts 2000... Grosses grosses désillusions pour moi que cette conclusion. Même si, je l'admet, elle a une certaine logique mais qui ne m'a pas donné ce sentiment d'accomplissement qu'ils essayent pourtant de faire passer aux forceps en terme de réal.
Cela m'a juste sorti du lien émotionnel tissé avec ces personnages du quotidien autant que cela m'a frustré au niveau des thématiques enclenchées...
Comme si en deux deux tout devait se conclure dans le scénario alors on dit une chose et son contraire pour raccrocher les wagons...


N'en demeure que malgré tous ces défauts , Years and Years à le mérite d'aborder une multitudes de sujets, aux risques d'être simpliste donc, mais qui sont assez rares voir inexistants dans ce que l'on peut voir dans le même genre aujourd'hui. Surtout traité dans cette forme assez ludique pour attiré l'attention tout en travaillant des codes usités pour créer de l'émotion en tout genre.


Years and Years permettra donc peut être au spectateur profane de s'intéresser à ces sujets, à lire de l'anticipation, à penser à son présent et à ses actions. Et c'est en cela que cette série reste quand même au final plutôt galvanisante.

Guillaume_Capma
8
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le 30 oct. 2019

Critique lue 232 fois

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