Avant de passer la porte d'une séance de Badh, le masqué vous invitera à vous poser la question suivante : Qu'en attendez-vous ?

Certainement beaucoup trop, à la lecture de certains billets ici et de la note générale peu flatteuse.

Car Badh est loin d'être un film d'action totale, comme les Etats-Unis ont pu nous en fabriquer parfois quand la licence Jason Bourne était encore vivace sous la caméra nerveuse de Paul Greengrass.

Car Badh décevra sans doute les ceusses qui attendent un récit de pure vengeance à la Taken, dont le film émule une scène d'empoignade dans un hammam, dans le deuxième épisode de mémoire.

Il faudra enfin garder en mémoire que Badh est loin de bénéficier du budget confortable d'une superproduction, ce qui se sent parfois à l'image.

Mais il reste cependant, dans ce mélange, quelque chose d'attachant et de sincère, une œuvre qui n'essaie jamais de péter plus haut que son fondement et qui va droit au but dans un récit dégraissé de tout à-côté parasite. Une histoire intime mêlée aux impératifs de la raison d'Etat, de la politique et de l'échiquier diplomatique, qui rappelle ce que Eric Valette avait pu porter avec le formidable Une Affaire d'Etat.

Badh choisit d'immerger immédiatement le spectateur dans l'univers de son héroïne dans l'observation de sa cible puis dans l'exécution d'une mission qui a tout du téléguidé, balayant le fantasme d'une guerre propre qui pourrait seulement être menée depuis des centres de commandement, sans se salir les mains, et en mode techno thriller hors de toute réalité tangible.

Après avoir porté à l'écran les trahisons et les jeux de pouvoirs, on retient de Badh sa matière d'aspect brut, ses sentiments froids et rêches, voire désenchantés, portés par le détachement apparent, les silences et la minéralité du visage de Marine Vacth, que l'on n'aurait jamais cru taillée pour un tel rôle.

Les décors marocains, quant à eux, après avoir été inondés de soleil et de visions de carte postale, s'imposent comme une sorte de labyrinthe, offrant au scénario du film un incroyable terrain de traque que la caméra portée de Guillaume de Fontenay dynamise et exalte.

Nerveux, dans l'urgence la plus brute, même si l'image et la lisibilité à l'écran en pâtissent parfois, Badh, s'il n'est jamais surprenant dans son déroulement, reste néanmoins un film honorable, humble et efficace. Et s'il se casse le nez sur certaines de ses limites, son rythme trépidant, son arrière plan ambigu et son héroïne réussissent à emporter le morceau.

Behind_the_Mask, force (pas très) spéciale.

Activité sur Badh