Ca y est, il est là. Le premier album de Tigercub. « Enfin », pourrait-on presque s’exclamer, après 3 ou 4 ans à réaliser un sans-faute de singles en EP. L’histoire que j’entretiens avec ce groupe dure depuis 2 ans. On les a découverts en première partie de Blood Red Shoes, et quelle claque ce fut. D’une telle intensité qu’on a revu le groupe 5 ou 6 fois et qu’on a aligné les bornes rien que pour parfois 30 minutes de leur set, en première partie d’un groupe de merde. En une douzaine de titres, ils avaient réussi à me transmettre un certain goût pour la scène dite « Rock Alt », scène à laquelle je suis parfaitement étranger. C’était donc impatient et d’ores et déjà conquis que j’attendais ce premier opus.


On va pas davantage tourner autour du pot, je suis déçu. Déçu déjà au bout de la sortie des quelques extraits (à savoir Omen, Burning effigies, Memory boy, Control). L’impression qui se dessinait à l’époque s’est complètement confirmée après découverte de l’intégralité des 12 pistes.


Le gros défaut que je ferais réside dans son atmosphère (terme que je risque de répéter dans cette chronique). J’ai la frustrante impression qu’on a mis un gros filtre Instagram sur tout l’album. Toutes les bonnes idées, par exemple les mélodies efficaces (Omen, Black tide, Golden ratio…), la basse bien lourde qui porte les morceaux (Omen encore, Serial killer, Migraine…) sont pratiquement toujours plombées par une espèce de côté « pop » quand il s’agit du chant, ou par une volonté de créer un gros son bien travaillé (en tête j’ai la construction de By design, qui est certainement très bonne mais dont le climax me laisse indifférent). Dans les deux cas, j’ai conscience que ce n’est pas objectivement mauvais (bien au contraire), mais ça ne me transcende absolument pas malheureusement. Pourtant ça plaira à certains, et j’en doute pas. Tout ce que j’aurais pu apprécier et que j’ai apprécié au cours des précédents titres du trio, et qui se retrouve sur Abstract Figures in the Dark, est absorbé par cette fameuse atmosphère. Migraine en est le meilleur exemple. C’est en quelques sortes le titre « sale » de l’album, où la voix hurle, où la guitare vrille, où la section rythmique grogne. Il a tout pour me plaire, mais au milieu de cet album il ne m’enjaille pas.


Je pense aussi aux couplets de Memory boy, à Serial Killer, à Black tide entres autres. Les mélodies sont parfaitement voulues, les accentuer avec tantôt les réverb ou ces backings très aigus aussi, mais ça me gâche mon plaisir d’écoute. J’en suis arrivé à un point où une voix dans ma tête a fait « gna gna gna gna » par-dessus les couplets de Memory boy pour singer ces mélodies agaçantes. Pire encore, certains titres (comme Up in smoke en première ligne, mais aussi The golden ratio) ne me renvoient même pas leurs bons côtés (et pourtant ils en ont à foison). Je n’en retiens que cette atmosphère froide qui caractérise tout l’album. Le processus créatif a été visiblement beaucoup marqué par des épisodes sombres (je conseille la chronique du copain Jambond, bien plus complet que moi sur ce sujet), mais cette agaçante couleur donnée à l’album m’empêche de me pencher dessus, malgré toute la sympathie accumulée pour les JJJ.


Je vais rester positif tout de même : l’album est très cohérent. Le passage au format 12 titres est un exercice compliqué (surtout après avoir sorti 4 courts-formats consécutifs), et de ce point de vue-là, c’est une réussite. Il est homogène sans être linéaire, et je crois intimement qu’on a là un groupe qui va s’implanter fermement sur la scène rock. Beaucoup de chansons sentent QOTSA à des kilomètres, et ce, plutôt involontairement. De l’aveu même du groupe, ils cherchent à avoir leur style et sont de plus en plus agacé quand on leur rabâche QOTSA ou Nirvana ou que sais-je à la gueule dès qu’on cause de leurs influences. Ils ne veulent pas y ressembler, mais force est de constater qu’ils font tout aussi bien. Et globalement, rien n’est mauvais ou fainéant dans l’album. Tous ces choix de productions sont bien évidemment voulus et caractérisent le plus fidèlement ce que Tigercub ressentait et voulait concentrer en un disque.


C’est déprimé et affecté que j’achève chaque écoute de ce disque. Outre mes attentes de disque parfait qui tombent à l’eau (bon, j’étais pas naïf non plus), c’est surtout de l’incompréhension qui m’emplit. Qu’est-ce que j’ai pas compris dans ce foutu album ? Pourquoi je suis si peu touché ? Qu’est-ce que j’ai kiffé pendant 2 ans et qui disparait soudain à mes yeux ? J’ai du mal à réduire ma pensée à « c’est juste que j’aime pas ». Surtout quand je vois le très bon accueil qui est réservé généralement à AFITD. J'ai honnêtement mal au coeur à écrire ma première critique globalement négative sur un groupe qui s'apprétait à rentrer dans mon top 10 si l'essai était confirmé.


Je perds cependant pas espoir, j’irai le réécouter de temps en temps, peut-être que je suis mal luné. Control était l’extrait qui m’avait le plus rebuté à la première écoute, et c’est peut-être bien le titre qui m’accroche le plus aujourd’hui. Avec le titre éponyme éventuellement. Je leur reproche les même défauts que sur les chansons voisines, mais allez savoir, là ça va. Je mets une note moche au skeud, mais qui reflète mon niveau de kiff lors de son écoute, et encore je me pose la question suivante : « qu’en serait-il si je les découvrais aujourd’hui ? ». Je ne pensais pas en arriver là avec un groupe que j’ai volontiers vu et revu, et dont chaque nouvelle sortie se soldait par un plaisir intégral. J’ai sûrement rien compris à l’album, et peut-être même au groupe lui-même en fait.

Tikoud
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le 16 nov. 2016

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