★
7.6

Album de David Bowie (2016)

Ressenti publié dans le cadre de mon classement intégral de la discographie de David Bowie, composée de 26 albums studio.

Numéro 3 : Blackstar

Après un retour remarqué et apprécié en 2013 avec la sortie de son vingt-cinquième album The Next Day, c'est en 2016 que David Bowie sortira son nouvel album, Blackstar.


Si l'album a été annoncé par des singles, tels que le titre éponyme ou bien "Lazarus", il a été conçu comme le précédent, c'est-à-dire dans le secret. Surpris et émerveillé par l'album To Pimp A Butterfly de Kendrick Lamar, sorti en 2015, Bowie voit ce disque comme point de départ à son prochain projet. Le fait que le rappeur de Compton se soit servi des codes hip-hop pour s'émanciper et sortir un skeud qui dépassera les frontières du genre inspirera le chanteur britannique à ne pas sortir un album rock classique.


Blackstar est un album expérimental mêlant des sons s'apparentant au jazz, l'artiste y convoquant de nombreux sous-genres. Un vingt-sixième album qui est en totale rupture avec les derniers et dénote presque avec tout le reste de la discographie du chanteur. En effet, l'album a une couleur musicale unique dans l'œuvre globale de son auteur, ce dernier y incorporant une imagerie nouvelle. Sa singularité peut initialement déconcerter l'auditeur et ce dernier peut se demander où Bowie a-t-il bien voulu en venir, pour ce rendre compte ensuite que ce dernier avait bien une idée précise sur ce qu'il voulait offrir, aussi bien sur la forme que le fond.


La conception de l'album se déroule dans une période où le chanteur est déjà atteint d'un cancer du foie. Le projet ayant comme leitmotiv la mort, il est donc naturel d'étendre souvent parler "d'album testament". Je préfère utiliser l'expression du "Chant du Cygne", que je reconnais être aussi très utilisée mais plus adéquate. Le testament renvoie à un concept concret de notre monde tandis que le chant du cygne amène à une certaine poésie qui élève avec cet album des sentiments forts mais aussi sensoriels. Quoi qu'il en soit, l'état de santé du chanteur est la fondation de ce que sera cet album et le contexte de sortie donnera à ce dernier une tout autre dimension. En effet, l'album sort mondialement le 8 janvier 2016, lors du soixante-neuvième anniversaire de David Bowie. C'est deux jours plus tard que l'artiste nous quittera physiquement et de manière définitive, nous laissant ce dernier disque, unanimement bien reçu par la critique et qui aura été commercialement un succès.


Nous sommes en janvier 2016 je viens d'avoir 18 ans. Cela fait un an que j'ai laissé toute la musique rock derrière moi et que le rap était désormais ce que j'écoutais principalement. J'apprends donc le 8 janvier que David Bowie avait sorti un nouvel album. Surpris car ne m'y attendant pas du tout, je lance cet album provenant d'un artiste que j'écoutais beaucoup durant mon adolescence mais que je ne connaissais au final pas si bien que ça, l'ayant surtout écouté au travers de deux albums ("Hunky Dory" et "Aladdin Sane"). Plus curieux qu'autre chose, je prête à l'album une oreille attentive et j'en sort assez décontenancé. J'ai revu dans sa musique une étrangeté que je ne soupçonnais plus. Plus intrigué qu'ayant vraiment apprécié l'album, je me note de le réécouter à l'occasion puis j'apprends la mort de son auteur deux jours plus tard. Cela m'avait fait tout drôle et avait mit mon écoute précédente de Blackstar dans de nouvelles perspectives. Ce n'est que lorsque je quitte définitivement les contrées du rap que je retourne vers Bowie en 2018, et le souvenir de ma première écoute de son dernier album retentit et je décide donc du retourner. Aujourd'hui, il figure parmi mes préférés du monsieur.


Une quinzaine de secondes lancinantes sublimes lancent l'album et le titre éponyme se met à décoller. Dix minutes de haut vol pour un morceau qui est la quintessence d'un fragment de l'oeuvre de Bowie. Une fantasmagorie incarnée ici musicalement par errances vocales, rythmées de manière presque scientifique, faisant de ce morceau un objet de sons non identifié et tout simplement remarquable. Énigmatique, il paraît toujours aussi neuf à chaque écoutes et la sensation de vouloir s'y perdre ne faiblit pas. Second morceau, "'Tis A Pity She Was A Whore" propulse l'album de par son incroyable intro dans une montée en pression frénétique avec ce saxophone libre et puissant qui donne le las sous des percussions surpuissantes. Un titre stellaire où Bowie livre une superbe adaptation. Un excellent titre. "Lazarus", le penchant de "Blackstar", est le prochain. S'il est indéniablement bon, avec notamment ce saxo planant, il n'a jamais été un titre qui m'a boulversé ou grandement parlé. Pourtant, il est le peut-être le titre le plus explicit quant à ce qu'est et ressent Bowie à ce stade de sa vie. Disons que musicalement, je ne me suis pas senti porté par ces sensations qui caractérisent tant l'album. Je préfère néanmoins ce morceau au suivant, "Sue (Or In A Season Of Crime)" qui est celui que j'aime le moins du projet. Si j'aime tout de même les deux derniers titres cités et qu'ils dégagent chacun des ambiances certaines et identifiables, celles-ci me paraissent un petit peu forcées. "Girl Loves Me", le morceau qui suit, a par exemple une énergie musicale qui m'enivre bien plus et de manière plus naturelle. "Dollar Days" est lui aussi un très beau moment de l'album, l'impression d'avoir ici des restes de ce que pouvait parfois offrir Bowie dans Heathen ou Reality, avec le filtre Blackstar et tout ce que cela comporte de singulier. C'est beau mais toujours enveloppé de ce voile noir qui ne quitte jamais le projet. "I Can't Give Everything Away" est le morceau qui conclut l'album et donc la discographie du chanteur. Spatial comme "Space Oddity". la boucle semble bouclée, d'autant plus qu'on y remarque la présence de l'harmonica, instrument que nous pouvions souvent retrouver durant les debuts de l'artiste. Ce dernier ayant connu une sacrée évolution au fil des décennies, se terminant ici d'une bien jolie façon.


Blackstar est donc un album fascinant, se justifiant pour ma part avant tout pour son ambiance auquel je suis tant sensible que le contexte de sortie. La noirceur laissant parfois jaillir des traits lumineux tout du long, cet album est aussi singulier que son auteur qui, une dernière fois, nous aura proposé un trip ô combien nécessaire. Direction les étoiles.. sa nouvelle maison.

nassim-starless
9
Écrit par

Créée

le 9 mars 2023

Modifiée

le 9 mars 2023

Critique lue 19 fois

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