Jellyfish, ce nom ne vous dit sans doute rien car né dans les années 90, à un mauvais moment pour lui (grunge, hard rock, R’N’B étaient alors à la mode), il ne nous laissé que deux albums studio avant de se séparer. Deux albums, « Bellybutton » (1990) et « Spilt Milk » (1993), remplis de pop superbe, entre Beach Boys (les harmonies vocales), Beatles (les mélodies) et Queen (pour des guitares bien en avant) ou encore les Wings de McCartney et les moins connus mais très influents Zombies. Eh oui, avec ce groupe, on était à ce niveau-là. Le duo d'auteurs-compositeurs Andy Sturmer et Roger Manning en était le moteur, complété par le guitariste Jason Falkner. Le petit label novateur Not Lame Recordings a obtenu l'autorisation d'EMI de publier en 2002 ce coffret incontournable de titres inédits, de démos et d'enregistrements live du groupe disparu. Sorti à quelques milliers d’exemplaires pour le monde entier (8000), ce coffret est devenu collector, Jellyfish étant un groupe culte au Japon par exemple. Il est donc (très) rare de le trouver à un prix raisonnable, il peut même monter à des sommes ahurissantes. Si vous le trouvez, n’hésitez pas car ce groupe est une merveille que j’ai découvert il y a peu. On retrouve dedans tout le 1er album, « Bellybutton », que ce soit sous forme de demos ou de live, de la douce et intemporelle « I Wanna Stay Home » à l'énergie communicative de « All I Want Is Everything », influencée par Cheap Trick. Ont été ajoutés des titres de Beatnik Beatch, projet initié par Sturmer et Manning pour Jellyfish. Falkner est parti avant même que le 2e album soit terminé en 1993, un chant du cygne mais brillantissime.
Ce coffret nous offre des versions alternatives de tous les titres studio, sauf deux. L'album possède un son puissant ; les démos et les prises alternatives présentes ici pourraient donc facilement constituer un produit fini pour n'importe quel autre groupe ! Ça saute aux oreilles. « Spilt Milk » inclut le titre radiophonique « Joining A Fan Club », aux accents de « Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band ». Les harmonies y sont d'une complexité encore plus grande, évoquant les envolées lyriques de Queen. Bien que ce deuxième album soit également axé sur la guitare, les claviers de Manning y sont plus présents, avec une touche Supertramp aussi. Les parallèles les plus évidents se trouvent sur le titre entraînant « New Mistake ». Quant aux titres live, le coffret inclut ici dans son intégralité le rarissime disque promotionnel « Jellyfish Comes Alive », enregistré au Roxy. Bien qu'il figure également en bonus sur la version japonaise de « Bellybutton », c'est un vrai plaisir de les avoir réunis. Ils sont complétés par sept titres de Bogart's et sept autres de l'Universal Amphitheatre, tous d'une qualité exceptionnelle. Malheureusement, la qualité sonore des cinq titres live du concert de Wembley, en Angleterre, est un peu moins précise, mais cela reste une excellente découverte.
Alors, oui, c’est un magnifique travail qui a été réalisé sur un groupe qui n’a en réalité sorti que peu de titres. À partir de ce matériel de création réduit, ce coffret de 4 CD nous laisse entrevoir tout ce que Jellyfish aurait pu devenir si Sturmer et Manning ne s’étaient pas séparés, le succès commercial ne venant pas et ne voulant plus travailler ensemble, regardant dans des directions trop différentes. Dommage que le livret, bourré d’infos, soit écrit si petit que même avec une loupe, il est quasiment impossible de le lire ! Jellyfish, n’ayant jamais connu le succès grand public, mérite à tout prix d’être (re)découvert et pas mal de groupes depuis les années 90 en ont revendiqués l’influence. Je me méfie toujours quand j’entends parler de « trésor caché » à côté duquel le grand public serait passé. Mais dans le cas de Jellyfish, c’est bien un trésor caché de la pop dont il est question. On ne saura jamais pourquoi ils n'ont jamais été reconnus au niveau qu'ils méritaient quand le groupe existait encore. Que leur a-t-il manqué? Qu'ont-ils loupé? Le succès ou l'échec tiennent parfois à peu de choses et le business du rock est parfois totalement injuste et mystérieux, certain(e)s réussissant sans l'once d'un talent. Il n’est jamais trop tard pour le découvrir.