Amicalement vôtre
7.1
Amicalement vôtre

Album de Guizmo (2017)

Je ne sais même pas par quoi commencer tellement faire cette critique me fait plaisir. Guizmo est depuis des années un des rappeurs français qui me tient le plus à cœur. Un véritable génie du genre selon moi, qui n’est pas reconnu à sa juste valeur par assez de monde. J’ai intitulé cette critique « Amicalement Notre », tout simplement parce que cet album, c’est le nôtre, à Guizi et nous réunis, c’est un peu l’album qu’on attendait tous, et il est arrivé. Mon inspiration pour ce titre vient également du morceau outro de l'album Amicalement Vôtre , mais je reviendrai là-dessus plus tard lors de cette critique.


Je vais vous épargner au maximum tous les bla-bla biographique bien qu’il faille replacer les choses dans le contexte pour cet album, c’est important, alors petit retour en arrière. Je tiens quand même à préciser que Guizmo reste un rappeur assez jeune mine de rien, 26 ans. On a tendance à l’oublier parfois, tellement on a l’impression de le voir depuis si longtemps dans ce game. En effet celui-ci est arrivé assez tôt dans le paysage de ce rap game, je pense que la plupart l’auront connu vers 2010/2011 suite aux rap contenders notamment à l’époque de l’Entourage et ses fameux « Et Yoyoyo yoyo yoyoyo » qui étaient terribles ! Et surtout face à Amstrong qui lui dit « Mec t’empestes l’alcool à des kilomètres, je t’ai vu dehors boire 5 Ballantine’s » et son fameux « Noooooooooooooormal » en guise de réponse qui avait terminé à vie son pauvre adversaire. Et le pire dans tout ça c’est qu’on connaît la suite, Normal sort, et là c’est classic shit, aussi bien le morceau que l’album !


Justement, pour tout de même faire un petit rappel très rapide sur les albums précédents du Guiz, on peut dire que celui-ci est arrivé fort fort fort avec Normal en 2011, dans lequel on retrouve pas mal de feat avec les membres de l’Entourage, qu’il fréquentait encore à l’époque. Considéré par beaucoup comme son meilleur album, ce n’est pas mon avis bien que je le trouve excellent.


Début 2012, on a eu droit à la séparation avec l’Entourage et au titre chanté lors d’un concert Chat Perché, signifiant une rupture quasi-totale et un début de « clash » contre l’Entourage. Je ne rentrerai pas dans les détails par rapport à ça puisque finalement maintenant, on n’en a plus grand-chose à faire honnêtement.


S’en suit la sortie la sortie du second album La Banquise mi 2012 également très bon et dans lequel on retrouve notamment un morceau contre l’Entourage encore une fois « Ma Haine est viscérale ».


Et à peine 6 mois plus tard c’est là qu’intervient le chef d’œuvre … Un 19 novembre 2012 sort l’album C’est Tout, qui à mes yeux est le meilleur album de Guizmo, un album presque sans aucune défaillance et avec la quasi intégralité des morceaux qui sont incroyables. Je ne vais pas plus m’étaler dessus sinon il est clair qu’on va en avoir pour 15 jours.


A partir de là je vais essayer d’aller assez vite afin de ne pas trop s’éterniser, en 2013 sort le projet Jamais 203 en collaboration avec Mokless de la Scred notamment ainsi que Despo Rutti. Si l’affiche avait tout de quoi faire saliver sur le papier, le projet accouché laissa un goût amer dans la bouche, et je pense pouvoir dire que l’association n’a pas débouché sur quelque chose de véritablement réussi, ou plutôt aboutit devrai-je dire.


Vient ensuite à la rentrée 2014 l’album Dans ma ruche dont les extraits André et Dans 10 ans étaient tout simplement magnifiques. Cet album, avec du recul, était excellent, même si on peut éventuellement lui reprocher d’être un peu trop long avec quelques morceaux qui n’étaient pas indispensables. Au final il s’agit pour moi d’un de mes albums préférés de rap français (Bien que je le place derrière C’est Tout).


Vient ensuite l’album GPG en 2016 qui a sûrement étonné beaucoup de monde, à commencer par moi. Finalement je parle d’album mais il s’agit d’une mixtape, et on sent que Guizmo a voulu se faire plaisir et partir un peu à droite à gauche sur les styles. Je comprends qu’il soit certainement le projet solo le moins apprécié du Guiz mais on peut toujours choper à droite à gauche des morceaux qui nous plaisent et surtout on a le morceau Attendez-moi, pour lequel on aura eu le droit à un freestyle sur Skyrock, tout simplement … Mémorable. Je me souviens l’avoir écouté en direct j’étais en voiture avec un pote et on en a eu des frissons tellement c’était incroyable.
Si vous ne l'avais jamais entendu ou vu, je vous conseille d'y aller dans l'instant après avoir fini de lire cette critique, c'est tout simplement incroyable.


Malgré tout, depuis 3-4 ans il est vrai que les sorties du Guiz étaient en demi-teinte et on était en droit de se demander à quoi on allait avoir droit pour cet album ? La réponse assez grossièrement : Un album incroyablement réussi, dans lequel on sent bien que Guizmo en a gros sur la patate mais également qu’il a voulu faire plaisir à ses fans. Je vais m’attarder tout d’abord sur les extraits balancés avant la sortie avant l’album en lui-même.


Le premier extrait balancé de l’album était Mon CV, il y a quasiment 1 an, et quel son, on peut le dire la couleur était plus ou moins annoncée. On retrouve le Guiz dans un domaine dans lequel il excelle. Un son mélancolique sur lequel il kick sale et technique comme on l’aime. Je suis obligé d’écrire quelques lignes sur ce morceau, qui est peut-être (si ce n’est certainement) mon son préféré de l’album. Toujours des références excellentes d’ailleurs de la part de GuiziOuzou :
« J’ai dû manger illégalement, oui les amis on m’acclame, j’suis pas calme, c’est le vacarme depuis que j’ai vu mon shinigami ». (cf Death Note, une base). On sent bien dans ce son que le Guiz est ancré solidement dans sa ruche et je le soupçonne d’ailleurs d’avoir enregistré, ou tout du moins écrit ce morceau à l’époque de l’album Dans ma Ruche en 2014 puisqu’il nous dit à un moment « 23 ans, et presque 10 000 conquêtes, moi c’est pas Jimmy punchlines, c’est plutôt Guizi pompette ». Ce morceau c’est la définition même de GuiziOuzou sisi coucou. Un son à la André ou encore à la Attendez-moi.


Etait ensuite venu le temps de Je ne sais pas quand ça finira (prod reprenant une OST d’Olive et Tom (ou Captain Tsubasa pour les puristes), c’était tout simplement magnifique. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que le Guiz s’inspire des mangas, on avait notamment J’attends sur La Banquise issu d’une OST de Naruto Shippuden ainsi que le morceau C’est Tout issu des chevaliers du zodiaque mais je reviendrai là-dessus un peu plus tard.


(Pour la petite histoire, à la première écoute de ces deux morceaux j’avais des frissons, c’est totalement le Guiz que j’attends et à partir de là j’étais totalement hype pour l’album qui s’annonçait très, très lourd).


Finalement sont ensuite venus Pardon et Escort Girl il y a un petit mois, qui étaient également deux morceaux très bons. On arrive sur le dernier extrait balancé la semaine dernière à savoir Les gens parlent d’amour et une fois de plus je vais me répéter mais : Incroyable. Et ce morceau va selon moi bien représenter cet album qui oscille entre haine et amour. On ressent bien que malgré le fait que Guizi aille de mieux en mieux, il est encore trituré.


Maintenant qu’on est bien rentré dans le vif du sujet, dans le cœur de l’album, je peux le dire, cet album est un des meilleurs de Guizmo, je n’avais pas pris une telle claque du Guiz depuis l’album C’est Tout. Alors certes Dans ma ruche contenait de nombreux excellents morceaux mais il y en avait quelques-uns dispensables comme je le disais un peu plus haut. Ici, je ne retrouve qu’un seul morceau « dispensable » à mes yeux finalement, c’est L’histoire d’un négro qui, je trouve, ne s’intègre pas vraiment dans le concept de l’album qui aurait notamment trouvé sa place sur GPG.
Enfin ça reste un morceau dans lequel il nous glorifie quand même d’un magnifique « Joey Starr c’est un fils de pute, Doc Gyneco c’est un fils de pute », il a sorti ça sans aucune pression, vraiment je n’étais pas prêt mais ça m’a bien fait rire sur le coup haha !).


Dans l’ensemble on a le droit à un album très introspectif, bien que pas très étonnant de la part de Guizmo qui nous raconte son quotidien au travers de ses sons depuis plusieurs années maintenant. Je pensais initialement parler de chaque son un à un, mais j’ai tellement apprécié la quasi intégralité que ça serait trop long donc je vais en sélectionner quelques-uns qui illustrent parfaitement le dérouler de l’album.


Tout d’abord forcément, l’intro « J’ai le blues » qui est parfait pour débuter l’album, une ambiance un peu jazz à la C’est Tout et un Guizmo qui nous raconte sa vie en faisant des parallèles entre son état actuel et son enfance. J’ai bien apprécié la phase « J’ai vu le jour une nuit d’hiver je suis froid de nature ». Ce n’est pas un des morceaux qui m’a le plus marqué mais il s’agit d’une belle entrée en matière.


Ensuite Je n’sais pas quand ça finira. J’étais obligé de parler de ce morceau, ne serait-ce que pour l’instru, totalement incroyable et me rappelant énormément de souvenir de mon enfance (Oui j’ai grandi avec Olive et Tom et c’était le feu). Guizmo fait référence à sa sœur malheureusement disparue dans ce morceau, tel que c’était le cas dans « Attendez-moi », et on peut réellement ressentir toute l’émotion qui se dégage de ce morceau magnifique. Je retiens une punchline que j’ai énormément apprécié étant fan inconditionnel de Fifty : « La vie c’est un droit, pour certains c’est un privilège, tu peux brasser des milliards même si tu t’appelles 50 cent ».


Mention spéciale au morceau Les gens parlent d’amour dans lequel Guizmo nous fait étalage de toute sa technique dans les variations de flow.


« Et j’ai rêvé d’une autre vie mais faudra accepter, qu’les Bahamas c’est pas qu’un rêve mais ce sera pas c’t’été … Ouzou, j’me suis noyé dans mes rêves parce que ma vie c’était un cauchemar, j’ai adouci tout ça avec un flacon et un pochtard ». Noyé dans mes rêves « J’ai vu ma sœur aussi, elle était pleine de vie, j’voulais pas qu’ça s’arrête, mais est-ce la peine de l’dire ? J’ai rêvé que l’Occident remboursait toute l’Afrique, qu’on a fait double platine et qu’y’a du blé pour toute ma clique ». Je tenais absolument à citer ce passage, déjà parce que le son est excellent mais surtout parce que ce serait beau que le platine ne soit plus qu’un rêve pour le Guiz qui le mérite tellement !


Mention spéciale à K-2000 qui bouge bien, du bon kickage comme on l’aime qui est à mi-chemin entre La vie est un thème et Dans le zoo qui étaient dans l’album Dans ma ruche, c’est une sorte de fusion des deux qui nous donne un magnifique Gogeta.


Mention spéciale aussi à J’sais que t’as mal ! Guizmo nous avait peu habitué à ce genre de musique et c’est plus que réussi le morceau fait bouger la tête toute seule.


On passe maintenant à un des sons qui m’a le plus claqué : Je l’aime autant que je la hais. Que ce soit lyricalement parlant ou même en termes de sonorités ou de flow. Niveau sonorité tout d’abord ça me fait énormément penser à du Damso, un peu à la manière d’un J Respect R ou même Macarena et aussi cette façon qu’a Guizmo au début de dire « Je sais que le monde est fou, je sais, je sais, je sais », je retrouve dans le timbre de voix une ressemblance frappante avec Damso quand il dit au début de J Respect R « Dems , Ouai, J’men fou, j’m’en fouuu, j’respecte R, yeah ». Si jamais quelqu’un est de mon avis qu’il se manifeste en commentaire je me sentirai un peu moins fou haha. Au niveau lyrical, on a un Guizmo très introspectif, notamment vis-à-vis de sa mère entre autres mais pas que. La question qu’on peut se poser après avoir écouté ce son serait de savoir de quoi parle Guizmo quand il dit « Je l’aime autant qu’je la hais ». Même si on a un petit élément de réponse quand il dit « Ma mère, la bière, la rue, je l’aime autant que je la haïs » mais en ce qui me concerne je le prends plutôt comme un tout et Guizmo semble parler de la vie en elle-même. Ce qui fait de ce morceau un morceau si incroyable à mes yeux c’est notamment cette manière de laisser planer un certains doute et d’amener de nombreuses possibilités d’interprétation.


Finalement, on termine par l’outro Amicalement Vôtre, magnifique outro. Et finalement ce morceau fut en grande partie ma source d’inspiration pour le titre de ma critique. Guizmo le dit clairement :
« J’rappe pour vous, nos qualités, nos défauts, j’rappe pour vous, nos sales idées, nos ghettos, j’rappe pour vous, jusqu’aux zones pavillonnaires, pour les frères et sœurs en établissement pénitentiaire ».
C’est un album pour nous tous, et pour ça, on se doit de remercier le Guiz parce que c’est une réussite totale.


Je pense avoir bien fait le tour de la question, vous l’aurez compris j’ai énormément apprécié l’album, n’hésitez pas à me dire ce que vous en avez pensé à votre tour en commentaire ça fait toujours plaisir. On va finir par un petit kiff avec mon top 5 perso de l’album :


1- Je l'aime autant que je la hais
2- Mon CV
3- Je n’sais pas quand ça finira
4- Je m’en rappelle
5- Noyé dans mes rêves


Bonus : K-2000.


Voilà, « C’est tout pour moi ».

Créée

le 1 déc. 2017

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DomToretto

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