ARTPOP
5.5
ARTPOP

Album de Lady Gaga (2013)

« Dans le futur, chacun aura droit à 15 minutes de célébrité mondiale. » Une phrase que Lady Gaga doit avoir sur une carte postale punaisée au-dessus de son lit, tant elle fonde, depuis le début de sa carrière, sa stratégie de communication sur le renouvellement quotidien de ce quart d’heure. C’est ainsi que, tous les jours, la chanteuse trouve de quoi attirer l’attention (déclaration mégalomaniaque, tenue extravagante, performance scénique borderline) : sa vie est une représentation théâtrale ; sa carrière, un attentat permanent aux bonnes mœurs. Cependant, la Lady n’avait jamais atteint l’écueil du « tout marketing », offrant juste assez de fond pour tolérer la forme. Les temps changent.


« Artpop » (ô, subtil clin d’œil à Andy !) est un album clinquant. Passé les trois premières secondes d’une introduction légère à la guitare, l’on se sent submergé, noyé, au bord de la saturation dès le premier titre. « Aura » (puisque tel est le titre final de ce « Burqua » qui buzze depuis plusieurs mois) est une agression sonore indescriptible à la voix robotique et à la structure incompréhensible, ponctuée de hurlements saccadés et de passages mélodiques aussi hors-sujet que le thème du voile dans la bouche de cette obsessionnelle du postérieur. A défaut de pouvoir aimer catégoriquement, on est interpellé. Mais ce qui aurait pu (et dû) rester de l’ordre de l’introduction se décline finalement sur toutes les pistes de l’album, qui présente les mêmes problèmes que « Born This Way » (son prédécesseur) sans en avoir la cohérence. « Artpop » est ainsi un enchaînement de titres étrangement construits, bruyamment mixés, plus ou moins réussis.

Les gros ratages, disons-le, sont plutôt rares : l’inaudible « Swine » (« porc », pour les non-anglophones), « Jewels n’Drugs (grosse partouze de chanteurs urbains dans laquelle Lady Gaga n’a absolument aucune légitimité) ou encore « Dope » qui, bien que tout à fait inoffensive pour vos tympans, est d’un ennui absolu. Si tout l’album souffre d’une voix étouffée et de bruitages parasites sortis du fond des âges (soit les années 90, temple de l’eurodance), certains titres se rendent sournoisement addictifs par leur sens du gimmick. Gaga a toujours excellé dans ce domaine (« Popopopoker face » !) et nous offre donc une jolie palette de drôleries, de la très théâtrale « Venus » à « Manicure », en passant par l’introduction parodique de « Donatella ». Dommage, donc, que des arrangements grossiers viennent étouffer ces quelques touches mélodiques. Deux exceptions, cependant, qui prouvent que tout espoir de voir Gaga revenir à la pop classique qui l’a lancée n’est pas vain : « Artpop », joliment aérienne, et surtout « Gypsy », incontestable tube de l’album à mi-chemin entre « The Edge of Glory » et « Americano », qui brillera aussi bien sur les dancefloor qu’en piano-voix (n’est-ce pas là ce qui, précisément, fait la force de Gaga par rapport à la plupart des chanteuses de sa catégorie ?).

En bref, un album qui a de sa pochette l’agressivité sans avoir l’audace. Si l’on sent parfois une tentative de revenir aux fondamentaux (« Do What U Want », notamment), l’ensemble reste trop bruyant, approximatif et inégal pour être qualifié de franche réussite. Beaucoup de bruit pour pas grand-chose.
CLaze
7
Écrit par

Créée

le 28 mai 2014

Critique lue 413 fois

3 j'aime

CLaze

Écrit par

Critique lue 413 fois

3

D'autres avis sur ARTPOP

ARTPOP
Valentin_Segpa
7

GaGa est morte, Vive GaGa !!!

ARTPOP est pas un disque à écouter chez soi, il faut sortir, courir, vivre, LE vivre. Il transformera l'auditeur en un danseur de dancefloor psychédélique. On retrouve les chansons-tubes de THE FAME...

le 11 nov. 2013

8 j'aime

2

ARTPOP
Celesticoo
7

Enigma popstar is fun !

Car c'est ici tout ce dont il s'agit. Du FUN. Suite au succès populaire en demi-teinte, et ce malgré un marathon promo surhumain, de Born This Way, GaGa nous promettait un album léger, sans prise de...

le 26 sept. 2016

4 j'aime

1

ARTPOP
JFE
7

Her ARTPOP could mean anything !

A la fin de l'exploitation de son album Born This Way, la jeune star parlait de son prochaine album comme d'un projet multimédia, plus fun et plus léger. Qu'en est t-il ? L'album s'ouvre avec -Aura-...

Par

le 27 nov. 2013

4 j'aime

Du même critique

My Way
CLaze
3

Comme un chanteur malheureux que l'on n'écoute plus

La postérité n’a pas été tendre avec Claude François. Mélomane exigeant et novateur (la première danseuse black à la télé française, c’est lui), il se résume aujourd’hui à quelques pas de danse bien...

le 21 oct. 2016

12 j'aime

1

Foxcatcher
CLaze
8

FOXCATCHER, un film animal et corporel

Derrière l’académisme de sa mise en scène et la froideur des dialogues, FOXCATCHER installe qui véritable tension qui, palpable sans être frontale, se tisse, gonfle puis explose lors d’un final que...

le 2 janv. 2015

8 j'aime

Bionic
CLaze
8

Over and over put it on replay 'til you're insane

Qu'il eût été simple pour Aguilera de capitaliser sur le succès critique de son album précédent et de fermer à double tour les portes de sa prison vintage, dans laquelle elle aurait fini, à plus ou...

le 1 mai 2014

8 j'aime