Blizzard (EP)
5.5
Blizzard (EP)

EP de Fauve (2013)

Et là, je me rends compte que j'ai pas critiqué.

Je vois de partout que "Fauve c'est trop commercial, c'est de la manipulation marketing de mecs qui ont fait HEC avec un brainstorm de fou pour vous vendre du spoken word comme étant le dernier truc trop hypesamère". Ok, peut-être. Après je vois des gens qui disent que les textes c'est trop pas fouillé et que untel fait mieux. Super. Mais moi j'aimerais qu'on me parle de l'EP, en fait. Alors voilà que je me mets dans une bibliothèque de quartier à écrire ma critique, tremblant de froid et de rage devant les gens qui disent que les autres ont rien compris à la musique si ils aiment Fauve.

Si je vous disais que Blizzard, c'est une histoire. C'est l'histoire d'un mec qui sort d'une rupture qui fait mal. Le truc qui t'arrache le cœur après avoir posé une dérivation, qui le découpe devant ta gueule avant de la manger et qui te laisse comme Tony Stark avec son électroaimant. Un machin froid, sec et plein de lymphe au milieu de la poitrine. Et ce même mec, il se sent un peu dans la merde. Tellement dans le bordel que le seul truc qui lui vient à l'esprit, c'est un blizzard justement. Il y voit rien, il a froid, il peut pas gueuler parce que le vent couvre sa voix. Après, de vous à moi, on peut dire que le blizzard, c'est un peu une dépression. Mais c'est de vous à moi. Alors la première piste en fait, c'est ça. C'est juste un gars qui se réveille. Prise de conscience froide et flippante que sa vie, et juste la sienne, il est à deux doigts de l'abréger. Et c'est à ce moment qu'il a cette petite voix dans ta tête, que toi, lecteur, tu n'as peut-être pas, qui lui dit que ce serait bien de s'accrocher un peu. Il se promet à lui même qu'il se laissera pas aller, qu'il va tenir encore un peu parce que Murphy et sa loi, il les emmerdes profondément. Parce que ça pourra jamais être pire que ce qu'il est en train de vivre. C'est un peu de la thérapie en solo.

La deuxième piste, c'est la naissance de Fauve. C'est le moment où tu te rends compte que tu peux peut-être faire un truc de tes 10 doigts et que même si t'es pas capable de jouer comme Angus Young et que t'as que ton Mac Book Pro pour faire de la musique avec Fruity Loop, t'es peut-être capable de faire un truc sympa. Alors tu prends un petit cahier et tu regardes autour de toi si tu peux pas ouvrir une fenêtre sur ton petit monde tout pourri. Mais y a rien de très sympa. Alors tu parles de tes potes parce que tu te sens pas capable de parler de toi. Et puis t'as ce petit bonus à la fin. C'est ça qui donne le ton au reste, qui explique. C'est un petit bout de journal intime, qui montre qu'il y a des gens qui compte et qui comprennent.

Après, c'est les Nuits Fauves. Comme je disais, le mec il sort d'une dépression post rupture. Et il se sent sale et misérable. Alors quand il sort draguouiller comme une petite merde entre deux bières, il se dit qu'il finira par trouver quelqu'un qui puisse apaiser son addiction au sexe, il se prend pour un mec en armure sur un cheval qui cherche à terrasser un dragon. Quelqu'un qui puisse le sortir de sa dépression en le prenant par la main. Quelqu'un qui l'aimera et qu'il aimera tout autant. Et si il parle de sex de manière cru, c'est parce qu'il est pas foutu de mettre des mots assez fort sur l'Amour pour en parler comme il aimerait. Et je suis sûr que ça a été cru bourré après 5 ou 6 vestes rabaissantes où il a eu l'impression d'être une sous-merde in-regardable.

Mais heureusement, il a des amis. Des gens qui tiennent à lui mais qui l'insupporte parce qu'ils ne sont pas foutus de profiter du moment. Qui ne savent pas s'émerveiller et se faire des câlins quand il faudrait. Lui, profondément malheureux, il aimerait profiter des gens parce qu'il sait ce que c'est que d'avoir envie de se jeter sous un métro le matin. Il n'a plus peur de dire aux gens qu'il les aime. Et il voudrait que les gens comprennent que ce serait quand même plus sympa de profiter d'une bonne bière maintenant plutôt que de supputer sur un hypothétique malheur. Et encore une fois, il essaie de nous expliquer que pour lui, c'est pas facile d'écrire. Y a un million de chose dans sa tête et faut trier, faut que ce soit agréable et c'est pas un génie. Alors c'est du travail. Mais c'est un jeune et un jeune, ça procrastine et comme il est comme les autres, il galère.

Et voilà le retour de la petite voix. Cette petite voix insupportable qui lui dit des trucs pas sympa quand il est tout seul chez lui et qu'il rêve de se barrer loin. Comme cette fois là, en Asie. Où on avait pu arrêter de penser. C'est un peu une épiphanie pour lui. Il s'en met plein la tronche parce qu'il ne sait rien faire d'autre que de se dévaloriser. Mais cette petite voix, c'est aussi un moyen pour lui de tenir le coup. L'introspection salvatrice. Ce petit truc qui fait qu'il est toujours debout malgré des crises incompréhensibles.

Et nous voilà à la fin de l'EP que vous n'aimez pas. Il est sortie du blizzard. Il a trouvé une fille qui lui plait. Et comme il a fait le pari de vivre au jour le jour, il arrête de se mentir et de mentir au gens. Alors sans alcool, il aborde cette bonne femme de la pire des manières qui soit. Et si elle veut pas de lui, il s'en fout. Il voulait juste le dire. C'est le bout du tunnel. C'est la fin. On a réussi à guérir, on sait pas comment. On sait pas pourquoi, mais le monde va mieux. On peut parler aux gens, on voit les gens au loin. On a l'impression d'être au bout de quelque chose et de commencer à vivre.

Hors EP, on a aussi Sainte Anne. C'est l'avant dépression. Le côté pas très sympa de la chose. Il pensait ne pas avoir besoin d'aide, mais sa rupture lui fait prendre conscience qu'il (a) fait de la merde et qu'il peut pas s'en sortir seul. C'est l'avant anxiolytique, la période pré-xanax. L'envie de frapper tout le monde, tout le temps. C'est le préquel à Blizzard.

Hors EP, on trouve 4000 îles. L'accomplissement à la sortie de l'hôpital d'un voyage qui fait du bien. Qui fait que tu arrêtes de penser à elle, qui te permet de te ressourcer avec un mec que tu vas considérer comme étant celui qui t'as sauvé la vie. Peut-être même que tu vas l’idolâtrer. Et quand tu rentres avec tes potes à Paris, t'as envie de partager ça. T'as envie de graver ton voyage au laser sur un bout de plastique. Et quand tu déprimes le soir dans ton 30 mètres carré, ça te permet de sourire et de te dire que c'était sympa.

Après, c'est tout personnel ce que je vous dis là. C'est pas moi qui est composé l'EP, je suis pas dans sa tête. Mais il y a une dimension trop intime dans cet EP que je peux pas faire autrement que de m'exprimer.

Créée

le 10 déc. 2013

Critique lue 716 fois

9 j'aime

Toki

Écrit par

Critique lue 716 fois

9

D'autres avis sur Blizzard (EP)

Blizzard (EP)
takeshi29
9

Pour rugir de plaisir... juste avant de sauter dans le vide ou de se pendre

Fauve ≠ le précise toujours, ce n'est pas un groupe mais un collectif. Si sur scène, ils sont cinq, quatre musiciens et un vidéaste, ils peuvent être jusqu'à quinze à participer à leurs divers...

le 5 juin 2013

46 j'aime

1

Blizzard (EP)
JZD
7

Ça sonne un peu Fauve, non ?

Ça commençait vers la fin de l'année dernière, un matin, L. a demandé comme ça, "- Tu connais Fauve ?", enroulé dans la tendresse de notre descente, on était lassé de toute grosse musique, on était...

le 18 août 2013

41 j'aime

8

Blizzard (EP)
z0uan
5

Critique de Blizzard (EP) par z0uan

Le pire c'est que ça aurait pu être vraiment chouette, mais les chansons s'enchainent et se ressemblent : Les pleurnicheries de jeunes bobos parisiens, en rupture totale avec le système et qui...

le 30 mai 2013

29 j'aime

13

Du même critique

Hugo Cabret
Toki
5

Critique de Hugo Cabret par Toki

Quand je suis allé voir Hugo Cabret, je m'attendais à voir le dernier Scorcese, une grande épopée, quelque chose de fort, de prenant. Et en fait non. Pour apprécier pleinement le film, il faut y...

Par

le 15 déc. 2011

59 j'aime

12

Valse avec Bachir
Toki
9

Et dans la petite lumière du jour, tu vas voir. Tu vas voir la destruction que tu as semé.

Je sors tout juste de ce périple au Liban alors que j'écris cette critique et je ne sais pas par où l'aborder. Peut-être devrais-je commencer par dire que j'ai pleurer. J'ai pleurer comme certain ont...

Par

le 7 juin 2011

48 j'aime

5

The Amazing Spider-Man
Toki
8

Andrew Garfield est appelé à régner.

J'ai longtemps hésité à aller voir The Amazing Spiderman. Comme tout un chacun, j'avais peur de ce que Webb avait pu faire de l'homme araignée. La série de Comics Amazing Spiderman étant la série...

Par

le 9 juil. 2012

42 j'aime

16