Blunted on Reality
7.2
Blunted on Reality

Album de Fugees (1994)

Le joyeux bordel des débuts. Le premier et meilleur album des Fugees. De loin supérieur à leur classique : The Score, qui leur a assuré fortune et reconnaissance mondiale. Un bordel. Oui, Wyclef, Praz, et Lauryn crachent leur flow, comme si demain c’était Armageddon. Tous les réfugiés du quartier se sont donné rendez-vous au mic. Oui, ça bouge dans tous les sens. On entend des : Pilipi woye ! Pilipi woye ! woye !woye ! woye ! C’est vrai qu’ils sont haïtiens, un groupe de rap américain, d’origine haïtienne. Un vrai groupe de musiciens, un son volontairement old school. "Follow me, follow me, follow me". Ghetto credibility.  Ça donne des trucs curieux et surprenant comme : Recharge. Tempo dansant, et rythme chaloupé. Freestyle dans la rue : 

Yo ! Á deux cent à l’heure, un flow de mitraillette, sous des sifflets d’admiration. Ta tatatata....Ou un intermède dans le plus pur style Hip Hop, (dans la rue). Pour arriver au monstrueux: Vocab. Morceau qui m’a fait adopter Fugees, comme un de mes groupes de Hip Hop préférés, toutes catégories confondues. Un long MESSAGE sur fond de guitare acoustique qui traîne sa mélodie. Plus simple, tu meurs. "I got the vocab..." Marrant d’entendre la voix de Lauryn à l’époque, et la stupéfiante transformation, quand on l’a retrouvera sur le hit mondial, Ready Or Not, deux ans plus tard.


Un album riche, qui part dans toutes les directions Hip Hop. Avant l’ère gangsta rap qui s’annonce, cet opus fait preuve d’une indiscutable originalité. Pourtant le flow est très « gangsta » justement. D’où la difficulté pour les classer. Hip Hop alternatif, on  a dit. En tout cas, Tous ceux qui ont connus le groupe par le commercial The Score, risquent d’être surpris, voire décontenancés, car le son est beaucoup plus « sale », c’est plus rugueux, moins vendeur. Avec des trucs comme : Temple, un Ska rap. Ah oui, c’est vrai qu’ils sont jamaïcains aussi. Avec les cuivres qui s’imposent, et les chants comme vomis sur le mic. On crache beaucoup ses tripes sur cet album. La basse est souvent lourde, le tempo trépidant, héritage du funk tardif moribond. Un bon mélange. Ça donne une impression d’urgence absolue, et d'énergie brute. Et l’urgence cède la pace à un autre message : Some Seek Stardom. Magique. Hill au chant. « Est-tu prêt à perdre ton âme, pour avoir du succès ? » L’avenir nous le dira. 

Curieux qu’on ai oublié le sticker sur la pochette. Sticker pour : Paroles explicites. Slang, violence verbale, battle, sex, et un peu de conciousness, celle du ghetto. Les derniers laissés pour compte des USA prennent le micro. Refugee On The Mic : Oh Yeah, oh yeah ! Flow guttural prononcé, pas de fioritures, pour montrer qu’on n’en a rien à foutre. Et qu'on en a dans les tripes. Malgré tout ce bordel, il y a une vraie originalité, cultivée, qui fait la force du disque. Sans compter le talent d'arrangeur de Wyceff, qui montre le bout de son nez. Une ligne de basse enrichie par ci, une orgue discrète par là, sans jamais changer de cap, le rap pur et dur. Living Like There Is No Tomorow. Là où ça déchire, c’est que même sur les morceaux de transition, le MC arrive à garder l’auditeur sous tension permanente. Et le MC se transforme en DJ sous les hourras de tout le quartier. Shouts Out From The Block. !!!!!!!!......
Comme un avis de remerciements, un générique de fin avant la fin de l’album, du film. Un morceau qui n’en est pas un, dans le style block party. Le beat tourne en boucle, et on parle dessus. Et ça bouge quand même. On remercie tout le monde… et c’est pas finit. Toute la communauté y passe.
Et enfin, le surpuissant: Mona Lisa, ou plutôt: Nappy Head (remix), que j’appelle tout le temps Mona Lisa, à cause de l’intro du chanteur… « Oh Mona Lisa, can I get a date on Friday, and if you’re busy... » Une basse qui fait trembler les murs, comme un coup de masse ; le rap ça s’écoute aussi. Arrangement lumineux, riff de trompette solitaire, et cette guitare très soul qui meurt dans les cordes. Mental et dansant à la fois. Avec le crew qui fait chœur derrière. Génial.


Devant le succès assez confidentiel, le producteur leur a conseillé de se séparer. Ils ont décidés de faire un deuxième album. Le rap va changer. Le rythme sera de plus en plus binaire, les nigga, fuck, baiiitch, les armes qui se déchargent, le climat délétère, vont prendre toute la place. Mais Fugees va prendre une autre voie, avec le succès que l’on sait.

Angie_Eklespri
8
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le 12 janv. 2016

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Angie_Eklespri

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