Crimson
7.9
Crimson

Album de Edge of Sanity (1996)

Bien que je connaisse Edge Of Sanity depuis un bon nombre d'années, ce n'est que relativement récemment que j'ai entendu parler du premier "Crimson", album dans lequel figure un seul et unique morceau, d'une durée de 40 minutes. Et c'est ce point là qui m'a le plus intrigué. Je connaissais leurs orientations progressives, mais je ne pensais pas qu'elles pouvaient être aussi poussées, et intrigué également de savoir si ces 40 minutes étaient subdivisés (ou subdivisables) ou si vraiment on avait à faire à un vrai bloc monolithique de 40 unités (A l'instar du groupe ... Monolithe. Et son "Monolithe III" par exemple).


Je dirais que c'est un peu un mélange des deux. L'album n'est pas subdivisé en plusieurs plages (et il aurait pu) mais il n'est pas si décousu que ça. Après plusieurs écoutes, on se rend effectivement compte qu'on a à faire à UN SEUL morceau, c'est vrai. De ce point de vue là, c'est une vraie bonne surprise et une vraie réussite. Il y a effectivement quelques "errances" et certaines transitions qui surprennent mais c'est normal, c'est inévitable quand tu ambitionnes de produire quelque chose d'aussi long sur une seule piste.


La première chose qui frappe quand on met en route la galette c’est que ces gars ne perdent pas de temps, pas d’introduction à rallonge avec présentation de thème et tout, non non non, là ça démarre sec et sans préavis, gros riff et grosse poussée gutturale du gaillard Dan Swanö. Et pas de doute on est effectivement sur du Death scandinave froid et mélodique, complètement en raccord avec le lieu et l'époque. Mais alors qu'on aurait pu penser qu'on aurait pu avoir ça sur plusieurs minutes, tout se décale rapidement sur un interlude acoustique et donnera le ton global de l'album, c'est à dire des alternances death/heavy/acoustiques/ambiantes, voire presque folk.


Et les ambiances, on va en parler, car c'est ça qui donne à cet album la plus grande partie de sa qualité. On a vraiment l'impression que ça a été enregistré dans une cathédrale ou dans un temple d'inspiration gothique, ébloui par le prisme des vitraux, accompagné par des gargouilles et autres bas-reliefs intrigants ... Bref ça suinte le trip spirituel très marqué culturellement, à mi-chemin entre paradis et enfer, on ne sait jamais vraiment, mais, attirée par cette volonté de VOYAGE. Et ça c'est capital.


En faisant quelques recherches, je me rend compte qu'il s'agit d'un album concept (non, sans déconner) et ce que je veux dire par là c'est qu'il y a surtout une "histoire" derrière cette petite épopée. Je vous fais la traduction de ce qu'a à dire Wikipédia là-dessus:


"La chanson unique de l'album raconte l'histoire d'un monde où les humains ne peuvent plus avoir d'enfants. Dans cette période de désespoir, un enfant nait du roi et de la reine de la "terre stérile" (Barren Land). La reine meurt pendant l'accouchement, et le roi est laissé à la tête de la Terre et à élever sa fille seul. Les gens pensent que l'enfant est un signe que Dieu leur redonnera la capacité de se reproduire à nouveau, mais à mesure que l'enfant grandit jusqu'à son adolescence, l'humanité reste stérile. Avec le temps, le roi meurt et les hommes se disputent son trône.


Le nouveau roi écrase les rébellions contre son régime illégitime et est généralement détesté par la population. Finalement, on persuade l'enfant de mener un coup d'État. Comme elle est laissée seule pour planifier ce coup d'état, les forces du mal lui font signe. Elle accepte un maître impie et acquiert de puissants pouvoirs magiques. Elle tue facilement le faux roi et commence à diriger la Terre. Les gens la regardent avec obsession, car on pensait qu'en rétablissant le dirigeant légitime, on pourrait leur rendre la capacité de pouvoir enfanter à nouveau. Mais la nouvelle reine trompe le peuple et tue les anciens que les humains avaient préservés pour leur sagesse. La nouvelle se fait savoir et un groupe de rebelles se rassemble pour l'arrêter. Ils trouvent un moyen de neutraliser son pouvoir (en l'aveuglant) et la placent ensuite dans le même réservoir de conservateur de «fluide cramoisi» dans lequel les anciens étaient gardés."


J'aime bien. Je trouve ça classe. Ça pourrait être un conte ou une vieille légende nordique. C'est crédible. (petite référence à King Crimson également? Possible)


Cependant, ça ne change pas l'impression que cette musique donne (les cathédrales, les vitraux, le trip spirituel, tout ça). Ça ne modifie en rien l'imaginaire que je me suis crée dans ma tête et toute cette fantasmagorie qui l'accompagne. (Un peu comme sur la pochette, of course. Évidement ça joue. D'ailleurs, graphiquement, on est pas loin d'un délire "Doom/Quake", ce qui est raccord avec l'époque également)


Ce qui m'a également marqué durant l'écoute de l'album c'est les similarités que l'on peut trouver avec ce qu'Opeth produisait à la même époque (c'est à dire la période Orchid/Morningrise), les parties acoustiques, le chant clair, les longues progressions, les ambiances "d'église" assumées ... Et en définitive ça n'a rien de surprenant quand on sait que Dan Swanö était un ami du groupe et également le producteur des deux albums cités. (lesdits albums, dont je dois préciser que je suis un fan ABSOLU. Orchid. Morningrise. Oui, je parle de ceux-là). Mikael Akerfeldt apparait même en guest sur l'album, ce qui me surprend encore moins, même si, à ce jour, je n'arrive pas à repérer les moments où il intervient, ce qui me fait sentir un peu bête je dois vous avouer.


En tout cas, Swanö et Akerfeldt, étaient très liés musicalement, c'est indéniable. Et l'amateur d'Opeth que je suis s'étonne de n'avoir encore jamais entendu parler de ce "Crimson" jusque là.


Je vais vous éviter de faire une analyse pour chaque riff ou chaque partie ça ne serait pas très intéressant. Cependant, il faut reconnaitre que toutes ces parties ou sous-parties sont toute de qualité (d'ailleurs, certaines reviennent régulièrement), il n'y a pas de moment faible, quel que soit l'effet recherché, les 40 minutes se déroulent normalement, sans ennui ou longueur manifeste. On se laisse bercer, certains riffs sont magistraux et ultra efficaces malgré la perplexité qu'implique de s’engager dans un concept ambitieux comme celui-là. (on pourrait aussi évoquer ces longs passages typés doom et sinistres vers les 3/4 du disque et sa complainte désespérée, qui synthétise vraiment la grande diversité que propose l'album)


En définitive, cet album est GÉNÉREUX. Il ne cherche pas forcément la perfection mais propose un très beau trip avec différentes fresques, différentes mosaïques et un panel d'émotions.


On dit souvent (et probablement à tort) que les albums concepts sont chiants, qu'ils sont bridés du fait du concept que le groupe s'impose et que ça manque de liberté et de simplicité. Et bien ici, ce n'est pas le cas, le groupe ne fait pas ressentir qu'il serait prisonnier de son concept, au contraire, la composition semble libre et sans concessions, c'est un concept au final sans trop de fioritures, l'équilibre a été préservé et donne au final quelque chose de vraiment solide, et agréable. Cet album est devenu en peu de temps une de mes références.

lépagneul
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le 18 janv. 2021

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