Death Magnetic
6.2
Death Magnetic

Album de Metallica (2008)

Les équations de Maxwell résolues par deux yankees, un danois et un mexicain

Résumé des épisodes précédents. Nous avions laissé Metallica en studio avec le controversé St Anger en 2003, album qui à défaut d'être parfait, gardait un capital sympathie satisfaisant. Doté d'une production ratée signée l'habituel Bob Rock (encore qu'il est difficilement concevable depuis la jurisprudence ...And Justice for All qu'Hetfield et Ulrich ne soient pas responsable de cette gabegie), le son cru et mal embouché souhaité tombait à plat. Fallait-il en être surpris en connaissant un peu les états de service mainstream de Rock ? Pas vraiment. La palme revient désormais au flamboyant son clair de la batterie de Lars Ulrich, son qui n'est pas sans évoquer l'album des années 80 cité plus haut. L'agent comptable pourra en aparté s'amuser à comparer le prix qu'a dû coûter l'enregistrement de cet album, et celui d'un album de Darkthrone. Bref...


Les griefs contre St Anger se résumaient ainsi à sa mauvaise production, à une certaine monotonie et linéarité, et à sa durée (plusieurs chansons auraient mérité à être écourtées voire tout simplement retirées). Quant à l'absence de solo, ce choix original n'était pas fondamentalement un problème, et avait le mérite une fois de plus de souligner la transparence de Kirk Hammett. Au delà de la formule facile, l'album avait les défauts de ses qualités et transcrivait plutôt bien une formation au bord de la crise de nerf (cf. le documentaire Some Kind of Monster).


Et Death Magnetic ? Malheureusement on y retrouve 50% des défauts de son prédécesseur. Premier point, le choix du producteur : Rick Rubin. S'il rend une copie correcte, on pouvait néanmoins s'attendre à un son plus incisif. Rien d'exceptionnel. L'amateur de basse s'étonnera même du traitement dévolu à Robert Trujillo. Trop en retrait, à nous faire revivre de nouveau le fantôme du passé ...And Justice For All.


Certains se sont plaints de la longueur des morceaux et de la linéarité de St Anger. Si cadrage il y a eu à propos de la linéarité, pour la longueur c'est autre chose. Avec une durée moyenne de 7 minutes 30, l'art de la concision est bien loin. Pire, Metallica à l'instar de ses collègues (Slayer et Testament au hasard) tend à vouloir nous faire revivre ses jeunes années thrash metal via un album supposé old school. Démarche qui n'est pas sans rappeler également le regain d'un Trivium, jeune groupe qui se démarque (trop) peu des albums cultes des 80's. Or durant l'enregistrement de Death Magnetic, la rumeur fit courir le bruit que le prochain Metallica serait le chaînon manquant entre ...And Justice For All et le Black Album, rien que ça.


Death Magnetic débute ainsi par That Was Just Your Life. Par le passé, plus qu'un autre groupe de metal, les four horsemen avaient toujours réussi à enregistrer des premiers titres coup de poing (Battery, Blackened voir même plus récemment Frantic). Ainsi après quelques battements de cœur, Metallica nous convie à une introduction sombre et inspirée puis à l'enchaînement de rythmes relativement soutenus (avec pratiquement toujours le même solo d'Hammett...). Ce premier morceau pointe déjà les reproches globaux du disque. Le groupe est en surrégime. Si St Anger manquait (peut être) de riffs, Death Magnetic risque au contraire de filer une indigestion à l'auditeur. C'est d'autant plus dommageable que les riffs trouvés sont loin d'être rancis, mais leur trop grand nombre ont tendance à rendre un morceau stérile (The End of the Line). Fort heureusement, nos quadragénaires arrivent encore à nous proposer des chansons tenant suffisamment la route, accrocheuses avec un semblant de feeling sudiste comme sur Broken, Beat & Scarred.


Par contre, après le premier titre qui pouvait rappeler les introductions usitées par le passé, Metallica se sent obligé de continuer à regarder dans le rétroviseur. La plage numéro 4 est donc la chanson heavy mélodique avec accélération pour sa dernière partie, et l'avant dernier titre est un instrumental de presque 10 minutes. Étonnant, non ? Si ces clin d’œil peuvent partir d'un bon sentiment (laissons leur le bénéfice du doute), le rendu l'est moins. Certes, The Day That Never Comes, en dépit d'une originalité en berne, tiens la route après plusieurs écoutes, mais Suicide & Redemption et son break autoparodiant Orion peut difficilement en dire autant. Même constat pour My Apocalypse qui tente de mimer la virulence des années 86-88. Au moins Metallica nous évite un simple et vulgaire copier coller.


En résumé, les premières minutes de chaque chanson sont en général plutôt bonnes, voire excellentes mais trop souvent gâchées par une accumulation de riffs (l'envie de trop bien faire ?) et une durée excessive. A titre d'exemple, The Unforgiven III, qui faisait craindre le pire (après la bouillie sonore qu'était la part II), nous présente un Metallica qui lorgne vers un lyrisme intéressant (piano et cordes). James ne force pas trop le trait (sa nouvelle voix de crooner ayant parfois la finesse d'un pachyderme). Mais le cap des huit minutes apparait vite comme une épreuve.


En conclusion, Metallica n'est pas mort. Death Magnetic n'est ni mauvais ni honteux, mais sa durée de vie est inversement proportionnelle à celle de ses morceaux. Et puis terminons sur une note médisante: « avaient-ils besoin d'un nouvel album comme prétexte à une nouvelle tournée mondiale ? ».


http://www.therockyhorrorcriticshow.com/2008/09/les-quations-de-maxwell-revues-et.html

Claire-Magenta
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le 10 mars 2014

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