Spleen
Dieu que le temps a passé vite ! Qu'il semble loin le temps des tâtonnements. Ce temps où l'on faisait ses armes dans quelques pubs enfumés des grises banlieues londoniennes; où l'on se faisait la...
le 14 janv. 2020
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Je crois que nous nous souvenons tous de la première fois que nous avons écouté Disintegration. On revoit le lieu, la saison, on parfume de tendresse notre regard sur une époque que l’on sait désormais achevée, que l’on entretient seul, par le souvenir et la retraite mélancolique.
J’y repense, je revisite ce que j’étais - le spleen adolescent, le doute et l’espoir. Le chemin parcouru marque de son fer un temps perdu, dont on perçoit par moment les échos.
Disintegration n’est pas un album du passé mais avant tout la force de la permanence. Celle de la sensation. D est un album sensible. On accueille la résonance perçante de la basse à six cordes, omniprésente, dont le son si caractéristique retient notre attention. Il y a aussi ces synthés, qui s’arrachent à eux-mêmes. On écoute et on ne visualise pas l’instrument, on voit la forme sonore, on visualise son spleen, on le dompte.
Écrire sur Disintegration est difficile, l’album exalte nos pulsions créatrices mais ne les féconde pas. On est devant notre feuille, c’est beau. Mais on ne sait que dire. C’est une difficulté qu’a soulevé une jeune femme dans une chronique dédiée à l’album : cet album semble être une confrontation à l’indicible.
Alors passées ces premières sensations, on se renseigne sur le contexte de création. The Cure est au sommet de sa gloire après les très grands succès des albums « the head on the door » et « kiss me kiss me kiss me ». Le leader Robert Smith a tout pour savourer un succès relativement tardif, après la traversée des limbes de la trilogie cold (17’- faith- pornography). Il est pourtant déprimé, se sent mal, incompris- sous le drap de son image inconfortable d’icône pop grand public.
1988, un hiver anglais et des maquettes produites avec le batteur Boris Williams. Robert Smith veut déconcerter. L’album sera sombre, mélancolique. Sa production est une émulation superbe. Seule ombre au tableau, Laurence Tolhurst. L’ami d’enfance de Smith qui a sombré dans l’alcool. Il est devenu ingérable. C’est la fin d’une ère avec le départ de ce membre fondateur.
L’album est publiée en mai 1989. Attardons-nous maintenant sur quelques morceaux.
Plainsong, le premier titre : des clochettes qui tintent, s’entrechoquent doucement, la douceur est hypnotisante. Dès lors l’explosion. Les synthés sont puissants. Ils nous enveloppent. Nous nous abandonnons dans un univers inconnu et captivant.
Pictures of you : second titre, un plaisir mélodieux, des paroles entraînantes et amoureuses et l’espoir véritable. Ce morceau est plus commercial, mais il conserve ce caractère précieux, solitaire qui le distingue des autres.
Disintegration : titre éponyme, une colère, une force de vie exceptionnelle, un rythme éblouissant. Ce morceau réveille ce que nous n’exprimons pas, ce que nous taisons. Récemment joué en Pologne à Krakow, il ne cesse de me bouleverser.
Lullaby : un joyau pop, un objet commercial délicieux
The same deep water as you : une noirceur destructrice, à écouter avec distance, un successeur au morceau faith, avec la douleur de l’âge, les cicatrices de la désillusion.
Je mentionne ces morceaux en particulier car ils sont ceux qui me parlent en particulier. Ils ne répondent pas à un critère objectif de « perfection ». Je les estime en ce qu’il éveillent chez moi, pour leur puissance évocatrice.
J’estime que tout l’album est remarquable et qu’il forme à lui seul un ensemble homogène absolument génial, que je n’ai jamais retrouvé ailleurs.
Créée
le 22 févr. 2023
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