2 ans après le plutôt bon Insurgentes, Steven Wilson nous propose donc ce qu'il considère comme une belle émancipation musicale, une œuvre compacte et libre de toute contrainte. Il faut dire qu'après l'assez classique Insurgentes, nous attendions notre ami au tournant et force est de constater qu'il est parvenu à surpasser tout ce que l'on pouvait imaginer avec cet album. La fusion des genres est maitrisée comme jamais et on peut réellement parler de double album (Deform To Form A Star et Like Dust I Have Cleared From My Eye) et non de collection de chansons disparates et liés à des thèmes façon patchwork.

La première partie commence (Deform To Form A Star) commence doucement, de façon presque mélancholique avec le sublime Grace For Drowning pour mieux nous plonger dans un océan d'ingéniosité et de diversité avec Sectarian. On retrouve la patte Porcupine Tree mais façon free-jazz avec des spasmes saxophoniques impromptus qui viennent agrémenter des parties rapides et d'autres plus calmes et planantes. Deform To Form A Star nous permet d'entendre enfin la voix de Steven avec une belle ballade rondement bien menée mais un brin classique. S'ensuit No Part of Me qui laisse dubitatif lors de ses premières minutes pour mieux se structurer et se déstructurer en fonction de la montée inexorable en puissante de la chanson, c'est une très grosse claque.

Les belles orchestrations de Pasteard nous montrent le côté pop-rock de Steven sans jamais tomber dans la mièvrerie ou la suffisance. Raider Prelude nous prépare tranquillement au dernier titre de cette partie, Remainder The Black Dog. Ce titre sombre et lancinant pourrait parfaitement avoir sa place chez Lunatic Soul. La montée anxiogène inexorable est parfaitement mise en avant avec son mélange bordélique mais savant d'instruments et de rythmes variés. Seul le final nous permet de nous reposer un peu avant d'entamer la seconde partie de ce double album, Like Dust I Have Cleared from My Eye.

Belle De Jour est un bel instrumental rythmé par une guitare sèche et de belles orchestrations. C'est une introduction à Index, un très bel hommage au prog des années 70's et à un mix industriel-orchestral du plus bel effet. On est choyés, c'est une évidence! Steven Wilson sème le trouble et parsème son double album de gemmes aussi iconoclastes que brutes. Track One reprend les bases d'Index pour aller encore plus loin dans l'étrange et le mélange des genres, on frôle à plusieurs reprises l'ennui et la lassitude mais on retrouve toujours de magnifiques segments qui viennent effacer les quelques doutes que l'on pourrait avoir.

Raider II est très certainement le titre le plus emblématique de ce double album, non seulement il fait plus de 23 minutes mais il semble avoir plusieurs vies et il constitue une parfaite fusion des précédents titres de cette partie. On retrouve un peu la folie qui s'est emparée du dernier album d'Opeth avec la présence d'une Clarinette, d'une flute et du déjà connu saxophone. On passe allègrement du Neo-Jazz au prog façon Porcupine Tree sans jamais se demander quand va s'arrêter le titre. Comme on pouvait également s'y attendre, le final est rocambolesque et complètement barré.

Like Dust I Have Cleared From My Eye clôture donc cette seconde partie d'une belle façon avec son faux air de ballade rock façon 80's. Il n'y a rien à jeter sur ce double album, c'est clair et on peut tranquillement découvrir le troisième CD The Map (Deluxe Edition only; Demos + Out-Takes) qui nous propose des versions modifiées ainsi que des démos prévues pour ce double album. L'ambiance est moins chargée que pour les 2 précédentes parties mais la qualité reste au rendez-vous, notamment sur l'excellent et exalté Fluid Tap et sur The Map, un titre très électro dans l'esprit mais très bien amené.

Raider Acceleration semble plus être une démo pour certaines parties de Raider II qu'autre chose mais structurellement, il se tient rudement bien avec son panel d'instruments et son diabolique Saxophone. Black Dog Throwbacks est beaucoup plus anecdotique et se trouve être une belle transition pour la version démo de Raider II. Dans cette version Steven Wilson s'est débrouillé tout seul de A à Z et le résultat est certes très différent de la version finale mais il mérite largement l'écoute tant on peut déjà y déceler le point d'orgue de ce double album.

Au niveau musical, il sera très difficile de critiquer ce projet tant il est intéressant et audacieux. Si vous aimez ce qu'à proposer jusqu'à aujourd'hui Steven Wilson, vous serez conquis avec son meilleur album jusqu'à présent. Il est certes assez compacte et hermétique mais à l'instar du dernier Opeth, il se dévoile pour peu que l'on soit curieux et ouvert. Je ne saurais trop vous conseiller l'écoute du mix 5.1 en Blu Ray si vous pouvez vous le procurer tant le travail effectué est phénoménal. Ressortez votre kit et votre ampli, vous serez aux anges.

Le livre de 120 pages et superbement réalisé avec un design de plus bel effet et énormément de photos "spéciales". On est de prime abord surpris devant la taille du livre, pour vous donner un ordre d'idée, la moitié du livre représente un tome de Walking Dead. Les photos sont plutôt belles dans leur ensemble avec quelques trop rares pages pleines et de trop nombreuses vignettes dans les teintes marrons. Les 2 pages transparentes et translucides de crédits sont plus du bel effet même si la lisibilité est assez moyenne mais ce n'est pas vraiment le plus important.

Est-ce que cette édition mérite le prix demandé? Honnêtement je n'en suis pas certain surtout lorsque l'on voit débarquer des éditions plus légères mais contenant le Blu Ray ou les 2 Cds. Le troisième CD est plutôt intéressant mais c'est cher payé au final. Je ne regrette en rien cet achat mais il n'est pas aussi nécessaire qu'a pu l'être l'édition limitée de Ghosts - NIN.
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le 19 déc. 2011

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