Fin novembre 2020, à défaut de pouvoir découvrir le premier volet cinéma de Kaamelott dont les soubresauts du Covid ne cessaient de repousser la sortie, nous avions pu découvrir, en avant-première, la bande originale du film signée Alexandre Astier himself. Et la surprise, si c'en était une, avait été excellente. (M'étant fendu à l'époque d'une longue chronique à son sujet, je vous invite tout simplement à la lire, ça fera gagner du temps à tout le monde. Enfin, surtout à moi, soyons honnêtes.)
Avec le recul, je serais même tenté de dire que c'était la meilleure composante d'un film sur lequel, par ailleurs, je suis loin de dauber comme certains, mais qui souffrait de faiblesses largement identifiées par de nombreux spectateurs. Pas du point de vue musical en tout cas, où Astier démontrait à plein régime ses aptitudes de compositeur et d'orchestrateur, se montrant même parfois plus inspiré sur partition que pour les images auxquelles ses notes étaient destinées.
Qu'a-t-on donc perdu en route dans cette première partie de deuxième volet, qui justifie une note moins flatteuse de ma part ?
Hé bien, de la musique à écouter, pour commencer.
La première galette affichait une durée appréciable de 55 minutes, certes saucissonnées en 34 morceaux, mais dont l'ensemble, bien agencé, fonctionnait d'une telle manière qu'on pouvait avoir l'impression d'écouter une suite harmonieuse et cohérente. Pour ce KV2-1, on descend à 33 minutes, ce qui est peu, pour 22 titres. Le morceau le plus long dure 2'56, et la plupart des autres tournent autour de la minute.
Et c'est frustrant, surtout pour un film de 2h20. Beaucoup plus frustrant que pour le disque précédent où, encore une fois, les titres s'enchaînaient bien, et paraissaient plus construits, plus étoffés, plus amples, avec quelques pépites singulières qui se démarquaient du reste ("Désenchevêtrement", "Sous la Bretagne", Arthur à la Tour", "Marche Aquitaine", entre autres).
Rien de tout cela ici, où les morceaux passent à toute vitesse sans vraiment accrocher l'oreille, en dépit des qualités intactes d'orchestrateur d'Alexandre Astier, qui assume ici beaucoup plus que précédemment son admiration pour John Williams, à qui il emprunte, consciemment ou non, nombre de trucs, par exemple dans l'écriture des cuivres.
Attention, j'en vois déjà frémir : non, je ne dis pas qu'Alexandre Astier vaut ou égale John Williams. (Relisez-moi si nécessaire, ce n'est écrit nulle part.) L'écriture de Williams est une excellente école à laquelle Astier emprunte volontiers, mais il n'a pas l'ampleur et la maestria technique du compositeur américain.
Surtout, et c'est l'un des problèmes récurrents de l'ensemble du travail du Lyonnais, Astier compositeur est totalement asujetti à Astier réalisateur et monteur. En d'autres termes, à la différence d'un Williams capable d'aligner des partoches de dix ou quinze minutes de long (le final de E.T., chef d’œuvre absolu), quitte à les réorchestrer pour la publication officielle, Alexandre Astier découpe son travail musical façon carpaccio pour coller à la seconde près au montage, et ne s'autorise pas à voir plus large, plus grand.
Résultat : sur disque, ça peine à décoller, en tout cas dans ce KV2-1 qui, à l'écoute, m'a bien laissé sur ma faim.
Je verrai si de nouvelles écoutes modifieront cette première réaction presque à chaud, mais j'en suis déjà à rêver de la publication d'une version longue - une "expanded" dans le style des productions Intrada ou La-La Land Records, pour ceux qui connaissent. Ça serait un chouette cadeau, même si je n'y crois pas vraiment.