Rock à Bilan

La gestation aura été compliquée, mais le voilà, ce 7ème album ! On pouvait croire à un comeback plus réussi que celui de Sixtape, au vu du solide succès du feat avec Hoshi et Nicola Sirkis. Et effectivement, nous avons le droit à des tendres retrouvailles avec un Superbus sorti de sa dépression artistique.

OK KO la chanson donne totalement le ton de cet album, qui garde les paroles plus introspectives des derniers projets tout en retrouvant cette énergie défiante qui nous manquait depuis Sunset. On ne pouvait pas avoir une meilleure introduction.

A la deuxième position de la tracklist, on se fait surprendre par Les Cheveux, un titre express dans la lignée de The Lighter qui troquerait un saloon pour un concert d'Elvis. Un gros risque (surtout vocal) qui ne paye qu'à moitié; on a beau penser à Wow lors de cette minute 37, Le Rock à Billy reste de très loin le shoot d'adrénaline le plus efficace du groupe.

La reprise de Lola, comme dit précédemment, a plutôt bien fonctionné auprès du grand public. Son côté symbolique n'y est certainement pas pour rien. Cette nouvelle version n'apporte pas grand chose à l'original; sans faire de l'ombre à celle d'Hoshi, la voix impérieuse de Nicolas Sirkis aurait pu emmener la chanson dans une toute autre galaxie si son apparition n'était pas si brève. Bref, une déception personnelle même si je n'ai pas grand chose contre le projet en lui-même.

Et soudain, on lève (le voile sur) L'Ancre. Un titre teasé depuis littéralement des années sur les réseaux du groupe et qui a enfin une existence officielle. Après écoute, il va sans dire que l'attente est récompensée : le morceau est doux et acerbe, entraînant et élaboré, puissant et contenu. L'unanimité des fans est déjà constatée sur les réseaux : on est dans le haut du panier des chansons "calmes" de Superbus.

Mauvais Réflexe aurait mérité des paroles un peu plus recherchées. Une gemme imparfaite totalement dans le bon ton. La section de fin, inhabituelle dans la discographie du groupe, prouve que l'intention y est.

Premier single de l'album, Aseptisé se veut engagé comme l'était A La Chaîne. C'est punchy mais ça part un peu trop dans tous les sens. Bel effort malheureusement gâché par ce clip en IA générative (aussi utilisé dans Lola, mais avec plus de goût et surtout pas de paroles à contredire)

En parlant de Lola, voilà la seconde reprise de Wow : Butterfly, avec la chanteuse belge RORI. Curieusement, je trouve ce réarrangement plus pertinent, plus doux pour le sujet traité. Je préfère toujours l'original et son côté hypnotisant, cette version 2025 a le mérite de rendre la voix de Jennifer Ayache reconnaissable.

Après cet instant nostalgie se trouve Midnight Express, selon moi le raté de l'album. Un titre contemplatif dont le tempo traine en longueur. L'instrumentalisation, elle, manque de cette délicatesse primordiale à ce genre de chanson

Vous vous souvenez de L'Ancre qui a été teasé bien avant que l'album ne soit annoncé ? Baby Boom était dans le même cas. Ce qui était autrefois une chanson d'amour en anglais a mué en un titre engagé qui tombe bien à plat. On se demande comment Jenn a pu croire que "Nous sommes les bébés du monde" était une bonne accroche. Rassurons-nous cependant avec le pont, où le groupe retrouve des couleurs.

Ensuite, nous avons La Corrida (rien à voir avec Cabrel) dont les sonorités ska rendent un hommage indirect aux premiers albums du groupe. Quant aux paroles, c'est au niveau du projet solo de la chanteuse qu'il faut chercher les influences. C'est répétitif, un peu longuet mais assez fun. Et puis entendre des cuivres dans un album de Superbus, c'est très original.

Paris Paris, ballade hommage à la capitale, reste bien écrite et étonnamment prenante malgré un certain manque de moments d'émotion ou de grande surprise. Pas mauvais mais le genre de titre qu'on aura tendance à oublier

La mémoire m'est vite revenue grâce au sifflement de La Locomotive. La mayonnaise prend bien et l'earworm n'est pas très loin. Les fans seront divisés par le refrain presque "voix de publicité" mais moi j'aime bien !

Avant-dernier arrêt : Stupido et le retour des cuivres. Une chanson sur les "trop gentils" de la vie par Superbus était quelque chose que je ne savais pas que je voulais ! Globalement satisfait par la proposition mais sans doute pas assez acide.

Enfin, c'est le moment de Stereo Song. Un instant clairement fan-service qui fera chaud au coeur des fans. Les auto-références textuelles et musicales sont présentes (rien que dans le titre) de façon mesurée. Une façon énergique et satisfaisante de dire "Toujours Debout" (avec beaucoup plus de convinction que Renaud) et de conclure l'album.

La tracklist épuisée, que retenir de ce OK KO ? Deux choses. Premièrement, Superbus est enfin redevenu fun après des années d'errance. Deuxièmement : qu'il ne sera tout de même jamais comme avant : il est redescendu sur terre. Un peu comme Jennifer Ayache quand elle écrit sur les rupture. Un peu comme Superbus qui enchaîne les chiffres décevants. Mais surtout, beaucoup comme les fans qui adorent grandir avec eux. C'était simplement le moment de rehausser le sourire, et à ce jeu, cet album est une réussite.

Cet OVNI dans la carrière du groupe (album sans concept fort et dévoilé au compte-goutte) a des allures de condensé de la carrière du groupe, avec des appels du pied plus ou moins subtils à ses heures de gloire des années 2000. Malgré ce simili-retour dans le mainstream, Superbus ne peut pas se défaire de cette étiquette de "nostalgia act", d'où cette nécessité de l'embrasser via les deux reprises aux allures de bonus (OK KO est le premier album du groupe à faire plus de 12 chansons complètes) + un titre dédié à celles et ceux qui n'ont pas oublié le groupe. C'est sans doute trop pour leur propre bien, mais s'il faut ça pour passer à autre chose, je prends.