Un effet de mode bien dispensable.
Un engouement aussi absurde que celui qui a entouré—et entoure encore—l'un des groupes les plus médiocres de 2013, le très dispensable Fauve?
Sans doute. Et c'est bien là le problème. Stromae, qui est à la chanson française ce que KFC est à la cuisine gastronomique, s'immisce partout, fédérant aussi bien les consommateurs de musique en tout genre, que les commentateurs les plus avisés: il n'y a qu'à voir la place de choix que le belge occupe dans le top des albums 2013 des Inrocks (sans mentionner la critique très élogieuse de son dernier album commise par le dit magazine).
On peut tout à fait excuser un égarement passager venant d'un journal qui, la plupart du temps, est plutôt exigeant, et sait dénicher des pépites musicales d'envergure.
Il est en revanche tout à fait consternant de voir que Stromae devance le très puissant "AM" dans le top 2013 des albums, allant même jusqu'à côtoyer "Reflektor", dernier album au sommet des canadiens d'Arcade Fire. C'est un peu comme si l'on mettait Mick Jagger dans le même sac que les One Direction, et ça n'est pas vraiment rassurant: où la notion de "sens critique" perd un peu de son..."sens", justement.
Mais le point de non retour est très certainement atteint lorsque l'on voit que le nouvel album de Bertrand Cantat est purement et simplement absent de ce top. On peut dire que Bertrand Cantat reproduit parfois jusqu'à la caricature le personnage qu'il s'est lui-même construit. Sauf que ses textes resteront infiniment plus élaborés que ceux de Stromae, même s'ils sont parfois redondants. Bertrant Cantat touche à la poésie quand Stromae reste au niveau du slogan publicitaire pour adolescents et ménagères de moins de 50 ans. Son succès—éphémère, espérons-le—en faisant de l'ombre à nombre d'albums géniaux parus cette année (on pourrait aussi citer celui d'Alex Beaupain, absent de ce top), est incontestablement une très mauvaise nouvelle pour la musique francophone.