Max Richter. Élève de Berio, admirateur de Xenakis mais plus influencé par le minimalisme, il sortit son 1er album "solo" en 2002, Memoryhouse, qui lui apporta une reconnaissance supplémentaire après ses 10 années passées dans l'ensemble Piano Circus dont il est un des initiateurs. 4 autres opus et plusieurs bandes originales plus tard (dont Valse avec Bachir et Elle s'appelait Sarah), il signe pour Deutsche Grammophon et sa série "Recomposed" cette adaptation... étonnante.

S'attaquer à l'œuvre la plus populaire et rabâchée -jusqu'à saturation- de Vivaldi, il y avait de quoi être inquiet. Ou au moins suspicieux. Mais cette initiative prend tout son sens dès les premiers mouvements. Car ce n'est pas un remix modernisant branchouille inculte. Ni une chouette facétie à la De Courson tenant plus de l'exercice de style qu'autre chose, dont le O'Stravaganza (recommandé) abordait déjà Vivaldi. Non.

Ce "4 saisons" là est une œuvre à part entière, pleine d'émotion, de grâce et d'audace, que le prêtre roux n'aurait certainement pas reniée. Tantôt glassien (Summer 1), obsessionnel (Winter 1, Summer 3), lyrique (Spring 2), crépusculaire (Summer 2), mélancolique (Winter 3), Richter décompose les concertos et les traduit dans son langage. Mais il ne trahit jamais le matériau d'origine, bien au contraire ; les intentions demeurent, et l'essence est préservée, intacte : "Il cimento dell'armonia e dell'inventione" conserve tout son sens. Le compositeur allemand signe une œuvre organique, totalement cohérente, qui gagne en puissance à chaque écoute au point que cette recomposition devienne redécouverte.

Avec une prise de son fantastique, un Daniel Hope motivé, et un Konzerthaus Kammerorchester berlinois impeccable, il n'en fallait pas plus pour en faire le meilleur de la série Recomposed, de loin, et peut-être un des disques les plus intéressants de l'année. Carrément jubilatoire.

Les compositions de Richter sont déjà bien visibles (et réutilisées, de Shutter Island à Prometheus), nul doute qu'avec cet opus, il s'installera encore plus durablement dans l'environnement des mélomanes. À l'heure où Glass crée sa dixième symphonie à Aix-en-Provence, savoir que la maîtrise de ses "héritiers" grandit un peu plus est très réconfortant.
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le 19 sept. 2012

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