Slowly We Rot
7.4
Slowly We Rot

Album de Obituary (1989)

Du premier album d'Obituary, le préposé se souvient de cette introduction lugubre, de ce soupir malsain plongeant immédiatement l'auditeur dans l'univers sonore d'un film gore eighties ; avant ce choc, cette voix unique et écorchée sortie d'outre tombe. Découvert en retard, soit cinq années après sa sortie en 1989, ce disque au titre fleurant bon la décomposition, Slowly We Rot, fut le billet d'entrée du préposé pour le death metal, ou l'un des mouvements musicaux les plus bouillonnants que connut la musique underground à la fin des années 80 - début des années 90.


Détail pittoresque pour présenter cette époque turbulente, ce metal mortuaire adolescent trouve son berceau en un lieu précis, terre d'accueil des retraités étasuniens et plus populaire pour son soleil et son climat subtropical que pour sa musique extrême : La Floride. La ville de Tampa fut ainsi de manière surprenante à la fois le point de concentration de nombre de formations de ce mouvement naissant : Death, Obituary, Morbid Angel, Deicide, Nocturnus, Malevolent Creation, Atheist, Massacre, et également le point de ralliement de la scène nationale puis internationale avec les studios Morrisound Recording des frères Morris, véritable architecte sonore des premiers enregistrements du genre.


Formé en 1984 sous le patronyme Xecutioners, le groupe enregistre plusieurs démos avant d'être signé quatre ans plus tard par le label Roadrunner Records (à se demander si leur directeur artistique Monte Conner n'a pas signé au tournant des années 90 les trois quart des groupes de death metal du globe...). Désormais nommé Obituary juste avant la sortie du premier album en 1989, leur opus profite de l'engouement suscité par le second disque du Death de Chuck Schuldiner, Leprosy qui fut enregistré par trois membres de Massacre (Rick Rozz, Terry Buttler et Bill Andrews). Mais loin d'être de simples suiveurs, Slowly We Rot marque dès sa publication les esprits tant un nouveau cap semble franchi en matière de brutalité et d'extrémisme musical.


Direct, sans compromis, la musique de nos cinq rednecks se caractérise par une crudité héritée des précurseurs du black metal, Bathory et Celtic Frost, dont Obituary reprendra sur leur second LP leur chanson culte Circle of the tyrants. Lourd, rampant, leur son se démarque aussi du reste de leurs voisins. Proche cousin du sludge metal louisanien en devenir (Crowbar et Eyehategod se sont formés à la même époque), le death metal joué par Obituary, s'il n'est jamais à l'abri d'une accélération propre à déboîter quelques cervicales, se définit en premier par l'aspect poisseux de sa production.


Enregistré au culte Morrisound Recording par le débutant Scott Burns, dont il s'agit du premier effort, avant de devenir l'un des premiers producteurs attitrés du genre, Slowly We Rot s'inscrit comme l'un des classiques de l'année 1989, année faste pour le death metal avec Altars of Madness des floridiens Morbid Angel et Consuming Impulse des néerlandais Pestilence. Différence notable, le disque, du moins les huit premières plages, furent enregistrées sur un 8 pistes, conférant à l'ensemble un rendu purement Low-Fi. Nullement handicapé par cette économie de moyen, l'album peut au contraire se prévaloir d'une réelle âpreté et rugosité, qu'incarne parfaitement la voix unique de John Tardy. Passé définitivement de l'autre côté du Styx, son style si particulier et sa tessiture si inhumaine (loin des growls basiques de ses pairs) font de sa voix littéralement un cinquième instrument (de torture) au service des histoires macabres et sanguinolentes contés par ces cinq croquemitaines.


Si le disque se tasse vers la fin, Slowly We Rot n'en reste pas moins un concentré de rage morbide à l'image des Internal Bleeding, 'Til Death, Suffocation ou la terrible chanson éponyme.


Primaire, urgente, agressive, leur musique, bande son imaginaire d'un film gore synthétisait au mieux l'abécédaire du jeune death metal.


Culte.


http://www.therockyhorrorcriticshow.com/2014/07/slowly-we-rot-obituary-1989.html

Claire-Magenta
9
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le 28 juil. 2014

Critique lue 274 fois

5 j'aime

Claire Magenta

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