Samedi matin, Tom Smith ouvre son courrier. Depuis trois mois, le chanteur d'Editors s'est abonné à soixante dix-huit magazines musicaux, dont plus d'une quarantaine dans des langues qu'il ne comprend pas. Sans compter les newsletters qui encombrent sa boîte aux lettres électronique. Tom ne veut manquer aucune des critiques qui paraîtront sur le premier album de son groupe. Mais les choses ne se déroulent pas comme prévu. Affalé dans son canapé noir, une bière à la main, Tom est accablé: "Bordel de merde, est-ce que c'est ma faute si j'ai la même voix que le type d'Interpol?".
Effectivement, jusque dans la presse grecque, il n'est pas un article qui ne souligne cette identité vocale qui serait sans doute passée inaperçue si Editors n'occupaient très exactement le même terrain musical que les New-Yorkais susnommés. Eux qui ont si peu connu les années 80 ont gavé leur disque de plans pompés à Joy Division, aux Chameleons et à Echo And The Bunnymen. Tom sait pertinemment que l'affaire se serait mieux déroulée avec de vraies bonnes chansons en lieu et place des pauvres pastiches qui encombrent son disque. The Back Room compte tout de même une triplette de morceaux très efficaces à défaut d'être originaux: Munich, Blood ou All Sparks ont un son ample et dynamique, gonflés par la superproduction de Jim Abbiss, qui avait déjà dopé le dernier laborieux effort de Placebo. Le début d'une nouvelle internationale des petits corbeaux? (Magic)
Encore un groupe qui investit la back room du revival 80's. En 1998, Interpol avait déjà trouvé la clé de cette chambre où traînaient des restes new wave et les disques des traumatisants Joy Division. Depuis la rentrée, Editors, formé en 2003 et originaire de Birmingham est le colloc de The Killers ou Franz Ferdinand sur la bande FM. A peine ai-je posé l'album d’Editors sur la platine que la voix caverneuse de Tom Smith annonce la couleur : The Back Room est promis à un bel avenir dans la discothèque de ceux qui attendaient le prochain groupe qui siégerait au-dessus de Maximo Park pour leur hiver cold wave. Moins pop que Bloc Party et Cie, Editors s’avère être aussi plus hanté. Plus monotone aussi. Pour ne pas dire plus chiant. En effet quand le groupe se met aux ballades romantiques pesantes, avec une voix monocorde, pensant pouvoir concurrencer Echo and the Bunnymen... on ne peut que regretter la rythmique excellente de titres tels que "All Sparks". Le single "Munich" fait aussi resplendir toutes les capacités d'Editors à trouver une ligne de basse implacable et de bons riffs... Alors pourquoi des titres sans punch comme "Camera" qui semble pourtant vouloir faire effet sur les dancefloors : la batterie s'impatiente pendant deux minutes mais, après un semblant de décollage, retombe platement avec la voix qui veut se poser aussi impressionnante que celle de l'inégalable Ian Curtis et tourne ici presque au crooning. A retenir tout de même, l'excellent "Fingers in the Factories" avec l'osmose batterie martelée et paroles hachées où il chante "Keep with me, keep with me, keep with me"... il n'aurait presque pas besoin de supplier tellement ce titre est accrocheur.
Sur la pochette du disque, un édifice à la profondeur de champ infinie dans une atmosphère très sombre (qui rappellera les pochettes de Peter Saville pour les albums de... si vous avez suivi, vous avez deviné : Joy Division). Ce n’est pas cet album qui permettra de voir le bout du tunnel de cette atmosphère glaciale. Donc, si la manie du glauque ne vous fait ni chaud ni froid, vous êtes plus invités à vous tourner vers Art Brut, qui semble déjà plus prés du but.(Popnews)
Que peuvent bien avoir ces quatre Anglais de si original pour attirer nos oreilles en cette rentrée musicale, saturées qu’elles sont des découvertes dont on nous abreuve chaque année au moment de la rentrée ? Pas grand-chose, a priori, et c’est paradoxalement ce qui pousse à accorder une attention toute particulière à cette formation en provenance de Birmingham. Editors, c’est en quelque sorte la réponse (tardive) au rock ténébreux et planant d’Interpol, qui a remis au goût du jour cette noirceur si chère à Joy Division, ou la sombre mélancolie d’Echo and the Bunnymen. Un héritage qui, au moins, attire l’attention. Ces références lourdes, le groupe semble d’ailleurs les avoir ingurgitées à l’excès, tant l’ombre des pères de la new-wave plane sur certains des morceaux de ce premier opus. Et pour cause, puisque le groupe est signé chez Kitchenware, label phare des années 80 dont Prefab Sprout fut un des porte-drapeaux…"The Back Room" ne saurait cependant se résumer à un simple plagiat des références sus-citées. Le parti-pris de l’emphase et de la grandiloquence une fois accepté, le disque délivre à l’écoute une réelle profondeur, à commencer par les finesses des harmonies, comme sur Munich ou Fingers In the Factories, deux hymnes en puissance, qui, s’ils ne sont pas promis à un grand avenir dans l’Hexagone, devraient remplir les stades outre-manche. Soutenue par des guitares rythmiques atmosphériques (Lights) qui poussent les mélodies jusqu’à l’incandescence, le timbre chaud et élégant de la voix de Tom Smith procure à des morceaux comme Lights ou All Sparks une dimension quasi mystique. Toutefois, dans certaines chansons comme Bullets, qu’on croirait tout droit sorti du dernier Coldplay, ou Someone Says, dont la caricature new-wave appuyée par la ritournelle lancinante des claviers a tendance à agacer, l’alchimie du groupe semble s’évanouir, écraser sous la lourdeur des arrangements et de la production. Cela montre en tout cas que le groupe possède encore une importante marge de progression avant de réaliser un album plein et homogène. Mais à tout prendre, on se contentera aisément des quelques perles qui jalonnent cet album malheureusement sorti dans l’anonymat de la torpeur estivale, et destiné probablement à finir au fond des bacs de quelques disquaires hexagonaux poussiéreux. (indiepoprock)
Ce que c’est intense une production vibrante qui met en avant la musique au point qu’elle en devienne complètement spatiale. C’est ce petit artifice fantastique qui aide Interpol à être si pénétrant sur CD. C’est ce même artifice qui aide Editors à en faire autant. Ce groupe de Birmingham débarque tout juste avec son premier opus The Back Room. Les singles s’étaient enchaînés et l’album se faisait attendre. Aucune déception ! Ce premier long effort est d’excellente facture. Le quatuor puise ses inspirations chez Echo & The Bunnymen et Interpol, développant de surcroît une attitude ultra branchée, un style emprunté, mais tout à fait adapté. Très proche d’un groupe tout jeune aussi tel que The Departure, Editors a cet avantage peut-être d’être encore plus entêtant, encore plus vitalisant. Musicalement, ces Anglais maîtrisent parfaitement la structure d’un morceau, sachant savamment comment faire un tube en puissance, une urgence unique, un instant de frisson. “Blood” en est un exemple patent, tant la piste est un décollage sonique qui ne cesse de prendre de la vitesse. Ce que le groupe utilise le plus et le mieux, ce sont ces sons aigus, éthérés, possédés. Cette mécanique foisonne (“Lights”, “Munich”, “Camera” et dans un style plus posé “Open Your Arms”) et elle fonctionne toujours, parce que cela donne une puissance aérienne à ces morceaux. Ils sont transfigurés. La magie est alors doublée avec cette voix ahurissante de Tom Smith, qui semble sortie des enceintes de la lune, attirante et mystérieuse. Et irrésistible sur “Bullets” quand il répète jusqu’à la mort « You don’t need this disease ». Editors est un groupe illuminé dans le néant obscur, une litanie dramatique, reflet d’un malaise majestueux, enfantant souvent des mélodies électriques. Cet album est post-moderne, hyperactif et talentueux. Multipliant les pirouettes avec une indécence spectrale, Editors semble épouser l’acoustique d’un amphithéâtre grece comme certains subliment l’art du larsen. Ils poussent le vice sur “Distance” à bien indiquer cette lumière qu’ils sont, là-haut dans le ciel, à briller comme l’Etoile du berger. Notre point de repère. Interpol avait marqué un gros coup avec Turn On The Bright Light, il y a fort à parier que Editors est sur le point de suivre les traces du groupe new-yorkais avec The Back Room.(liability)