To Lose My Life...
7.1
To Lose My Life...

Album de White Lies (2009)

"Let's grow old together / And die at the same time...".

Nous sommes en 2009. L'après-midi est plutôt brumeux. Je traîne sur Deezer à la recherche de sonorités excitantes et tombe soudainement sur « To lose my life », premier opus des White Lies. Appelons ça un réflexe d'habitué : il me suffit à ce moment de quelques secondes pour identifier le « produit » qui se présente devant moi. Une pochette sombre, une identité visuelle proche de celle des têtes d'affiche de la Factory presque trente ans auparavant... Ok, l'Angleterre nous a encore sorti un groupe revival. Ils sont d'ailleurs nombreux à se bousculer au portillon en ce début de 21ème siècle (qu'ils soient britanniques ou américains), si bien qu'on parle même de « post new-wave » : une mouvance qui englobe donc, pour les plus connus, Editors, Interpol, She Wants Revenge... Les White Lies font ainsi figure de petits derniers en émergeant si tardivement, parallèlement, cependant, à leurs homologues néerlandais des Customs. Toujours est-il que si cette nouvelle génération de corbeaux n'a pas inventé grand-chose, elle perpétue la tradition, dans l'ensemble, avec brio. Autant dire que notre trio ne déroge pas à la règle, et que pour un essai, ce fut un sacré coup de maître.
Pour les thèmes abordés dans les textes, pas besoin d'aller chercher bien loin. Il suffit par exemple de lire le nom de l'album : la mort et son cortège d'affres existentielles hantent la plupart des compositions, comme le single « Death » (« So frightened of dying / Relax yes I'm trying / This fear's got a hold on me... »), le morceau éponyme, ou encore « From the stars » (« I saw a friend that I once knew at a funeral... »). Etonnant que les journaleux ne nous aient pas encore refait, à grands renforts de raccourcis, le coup du groupe « gothique », surtout si l'on écoute un titre comme « E.S.T », plombé par des synthés surténébreux ; on ne s'en plaindra pas. Pour en revenir aux paroles, elles sont également dans la continuité des aînés des eighties, entre histoires d'amour mélancoliques et romantisme désabusé. Un combo qui fait toujours son petit effet.
Outre cette sensation apaisante de se retrouver en territoire familier, le gros point fort de ce disque, c'est son efficacité musicale. Et Dieu sait qu'il l'est diablement, efficace. Mélodiquement, nous sommes ici face à ce que la new-wave a pu engendrer de meilleur ; la leçon a été bien apprise, et elle semble récitée avec une facilité déconcertante, une puissance de tous les instants. Tous les singles, par exemple, exhalent ce parfum de « noirceur dansante » chère à Depeche Mode, au Cure des débuts ou à New Order, pour ne citer qu'eux. Et pour compléter le tout, on retrouve parfois dans le jeu de basse le groove étincelant d'une formation récente, les Killers (c'est assez flagrant sur « Farewell to the fairground » et « Unfinished business »). Bref, cet album, c'est du rock anglais à l'état pur : chant habité, quatre cordes lourde, guitares électriques tantôt rythmiques, tantôt filandreuses, batterie qui bombe le torse, dopée à la reverb et au chorus... Sans oublier les petites touches de clavier pour achever le travail. On distingue ici trois types de morceaux : certains sont immédiats, caractérisés par des rythmes péchus et imparables (« Death », « To lose my life », « A place to hide »...) ; d'autres sont plus progressifs et terminent souvent en apothéose (« Unfinished business », « From the stars », « The price of love »...) ; les derniers ont un tempo plus lent, une atmosphère plus chargée (« E.S.T » et « Nothing to give »). Notons que les deux dernières catégories prendront un ascendant significatif sur le deuxième album du groupe, « Ritual ».
Quoi qu'il en soit, si l'on ne devait retenir qu'une chose, c'est que celui-ci fut une entrée en matière plus que convaincante : carré, sans bavures, musicalement irréprochable. Il est toujours délicat de prétendre suivre les traces des légendes de la new-wave, et beaucoup y ont laissé des plumes. Retenons donc bien le nom des White Lies : le jour de la distribution du talent, les derniers arrivés ne furent pas forcément les derniers servis !
Psychedeclic
9
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le 22 déc. 2011

Critique lue 445 fois

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Psychedeclic

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