Le roi des rats

Je ne sais pas trop quelle (ré-)édition j'ai, je suppose que comme pour les Gaston Lagaffe, y a eu réorganisation des tomes étant donné que sur SC cet album est considéré comme le tome 1 alors que sur mon exemplaire il est indiqué tome 3... En tous cas, ce ne doit pas être d'origine étant donné qu'il a été publié dans les années 70 et qu'il y a même deux courtes histoires de Hubuc et Greg en plus.

"Chlorophylle contre les rats noirs" est plaisant pour sa simplicité : ça commence directement, pas de fioriture, la menace est immédiatement identifiée, les conflits abondent. De quoi tenir en haleine le lecteur. Les résolutions sont parfois un peu faciles et je ne suis jamais très fan de la technique qui consiste à faire chuchoter deux personnages échafaudant un plan, laissant le lecteur dans l'ignorance jusqu'à ce qu'on lui présente la solution après un bref suspens. Mais bon ça ne dérange pas trop.

Ce qui m'a un peu gêné, par contre, c'est le manque d'approfondissement des personnages. Les personnages vont et viennent, ce sont des enveloppes vide. En même temps, le récit ne laisse pas trop le temps de s'attarder sur l'un ou l'autre mais il m' a manqué, au cours des scènes d'action, une caractérisation des personnages qui aurait rendu plus unique chaque séquence. Ce manquement se ressent surtout dans la résolution finale, par cette rébellion pas du tout préparée et dont le mouvement semble donc venu de nulle part.

Graphiquement, c'est un peu rigide, le design des animaux est un peu bizarre (les oiseaux surtout), les pleins sont parfois un peu trop gros alors que les déliés sont très très fins : au fond c'est un dessin proche du dessin humoristique publicitaire des années 50, on y retrouve d'ailleurs la même rigueur, c'est juste dommage d'avoir un trait si gros dans certaines cases. Les compositions ne sont pas très esthétiques, le dessinateur se préoccupant avant tout de la lisibilité de l'action. Et pous ça il faut dire que, même si le découpage pourrait être mieux pensé, l'action ne souffre d'aucune chute de rythme, d'aucun problème de lecture.

Avant de lire cet album, j'ai lu un autre Chlorophylle dessiné par Dupa ("Panique au petit bois") ; je m'étais alors interrogé sur l’œil unique de Chlorophylle, me doutant qu'il s'agissait là d'un vestige de l'ancien dessinateur. Ma supposition se voit confirmée ici : en effet, Raymond Macherot ne dessine qu'un œil à ses créatures, l'autre étant caché par le bec ou le museau de l'animal. C'est logique au fond, et c'est dommage de ne pas avoir conservé la logique en reprenant la série (mais peut-être Raymond lui-même s'est trahi, il faudrait pour cela que je lise ses autres albums, sauf que je ne les ai pas, hélas).

"Cholorophylle contre Borborygme" est une autre histoire de tatane : cette fois c'est une bande de corbeaux qui embête notre héros affublé d'un side-kick. C'est plaisant à suivre, Chloro ne prend pas le temps de se battre directement, au lieu de ça, il échafaude un plan assez sympathique (à nouveau on a droit au secret mais c'est révélé dès la page suivante - pourquoi ce faux suspens alors ? peut-être à cause d'une parution coupée ?). Le récit n'est pas aussi palpitant que la longue histoire mais c'est autant divertissant tout de même. Le dessin de Hubuc fonctionne bien (seul Chloro n'a qu'un œil, déjà), on sent que nous ne sommes plus dans les années 50. Le découpage n'est pas beaucoup plus esthétique, mais l'action y est toujours aussi claire et rythmée.

"Chlorophylle et le gai séjour" est assez amusant, notre héros et son side-kick décidant de passer leurs vacances dans un camping imitant les humains. C'est assez rentre-dedans, les deux auteurs (Hubuc et Greg) sont à fond dans cette idée et dépeigne avec malice les travers du camping 30 ans avant le chef d'oeuvre de Fabien Onteniente pour le 7ème art. On se marre donc assez bien,l'album étant avant tout prétexte à des gags. Le dessin est toujours bon aussi.

Bref, cet album est fort plaisant à découvrir, les 3 histoire se valent, mais je n'ai pas ressenti la claque espérée (heureusement, ma copine est là pour ça).