Commando Culotte
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Commando Culotte

Blog BD de Mirion Malle (2011)

Voilà j'ai terminé le blog... jusqu'à aujourd'hui. Je ne pense pas que je le suivrai, donc ma critique porte sur sa production depuis 2012 (car je n'arrive pas à afficher les pages de 2011 chez moi) jusqu'à la BD du 12 septembre 2016.


Ce qui fait la force et en même temps la faiblesse d'un blog, c'est qu'on voit toute l'évolution d'un auteur. Au début, Mirion mettait un peu de tout dans son blog, des histoires personnelles mais aussi pas mal de ses productions estudiantines. C'était pas terrible graphiquement. Même ses carnets de croquis pouvaient contenir du bon et du moins bon. Petit à petit, la dessinatrice va s'améliorer et sur ses dernières pages, force est d'admettre qu'elle dessine bien dans son registre. Et même en consultant ses tumblr et autres sites, on se rend compte qu'elle a bien progressé au cours de ses études et puis après aussi bien sûr. C'est donc chouette de voir le petit oiseau devenir grand. Mais c'est frustrant de devoir se taper des pages immondes tout au début, ça donne presque envie d'arrêter... Néanmoins, un gros problème de Mirion, c'est la mise en page : c'est souvent très bordélique. Déjà que dans ses idées, iol lui arrive de passer d'une idée à l'autre sans transition, de se perdre dans toutes les informations qu'elle doit fournir, alors si en plus elle ne parvient pas à capturer le regard du lecteur, ben on se sent perdu, et lire ses p'tits mickeys devient parfois très laborieux. Elle s'améliore sur la fin, et puis la colorisation a permis aussi de facilité la lecture, n'empêche qu'il reste des couacs ici et là. Et puis je reviens sur les dessins, j'aime bien ses tronches à la fin. Je signale que j'ai découvert son blog justement avec sa dernière page en date, puis seulement j'ai attaqué ses débuts et j'ai tout lu dans l'ordre ; ça a été amusant pour moi de voir la première fois qu'elle a dessiné sa bouche avec ses grosses joues, tout comme ça a été amusant de voir qu'au départ elle se représentait avec un gros pif (alors que son nez est tout-à-fait normal ; d'ailleurs elle se dessine plutôt ronde, avec des cuisses énormes alors qu'elles n'ont pas l'air si énormes que ça du peu que j'en ai vu, mais c'était ptet pas une photo récente) ; pour le reste, elle est très très mignonne et sa représentation d'elle-même est plutôt mimi aussi même si elle fronce très souvent les sourcils. J'aime bien aussi sa manière de désarticuler les personnages pour leur faire prendre des poses : ça non plus ça ne s'est pas fait en un jour, ce n'est que peu à peu qu'elle a rendu ses personnages toujours plus expressifs. J'aime bien son trait fin sur la fin aussi, ainsi que le canon des visages qui lui permet de placer beaucoup de détails et ainsi de diversifier facilement ses visages, ses personnages. Les décors sont très rares mais c'est tant mieux sinon ses BD deviendraient vraiment illisibles. Et puis dans ses Bd qui sont des travaux plus fictifs ou que c'est de l'auto-biographie romancée, que ce soit au début ou à la fin, c'est assez moche, son découpage n'est pas toujours efficace, le dessin pas toujours lisible.


Au niveau des histoires, j'ai accroché à presque aucune de ces histoires pour l'école. Ce qu'elle fait de mieux, ce sont ces critiques de films ou bien des représentations de la femme au travers des films et séries. Cela m'a fait penser à la chaîne Youtube "Feminist Frequency", sauf qu'ici ça passe un peu mieux. Peut-être le médium permet à l'auteur d'amener plus d'humour, de digressions, de distance. Donc ça passe mieux. N'empêche que dans l'élaboration de ces 'histoires' ou plutôt de ces exposés, c'est parfois un peu brouillon ; je pense que ce ne sont pas des cours de scénario qu'elle doit suivre mais des cours de français ou des cours de débat (en tous cas un cours qui lui permettrait d'apprendre à rassembler ses idées plus clairement à mieux chapitrer, segmenter etc.). On comprend tout de même là où elle veut en venir, c'est juste que ça manque de fluidité. Un autre problème c'est que souvent elle s'adresse à des gens qui connaissent les films et séries. La plupart des œuvres abordées, je ne les ai pas vues, et vu sa manière d'en parler, j'avais parfois un peu de mal à entrer de temps, parce que clairement elle s'adresse à ceux qui connaissent, ça lui évite ainsi d'entrer dans certains détails. Il faudrait donc qu'elle apprenne aussi à rendre son propos un peu plus abordable, sinon on ne retient de ses exposés que la critique du sexisme et c'est plus facile du coup pour ses détracteurs de se manifester. Ce qui est dommage aussi, c'est de n'opter que pour le point de vue féministe : elle précise dans un commentaire qu'elle est consciente de cela mais qu'en même temps les autres aspects ont déjà été abordés par plein d'autres critiques mieux placés qu'elle pour en parler (comme de la politique par exemple) ; c'est bien de reconnaître ses limites (elle le fait souvent), n'empêche que ça paraît un peu faible parfois de juger un film juste là-dessus. En plus, par moment, elle déborde, elle parle d'autre chose que du féminisme... donc elle ne respecte pas vraiment sa propre consigne. Mais là où son point de vue choque, c'est quand ça lui fait sortir des jugements de valeur, comme si au fond, tout ce qui compte c'est qu'un film véhicule de bonnes ou de mauvaises valeurs et non que ça raconte autre chose. Parfois elle parvient à prendre de la distance, en expliquant qu'au fond elle adore ce film tout de même, puis parfois non...


Je me suis déjà exprimé sur "Feminist frequency" au sujet du féminisme. Enfin le féminisme selon Anita. Mirion est fort proche de Anita, d'ailleurs ça ne m'étonnerait pas qu'elle suive son vlog (mais en même temps, si c'est bien le cas je suis surpris qu'elle ne l'ait pas cité). Je ne suis donc pas d'accord avec tout ce que dit Mirion. Je pense à nouveau que parfois, elle a tendance à décontextualiser certains faits, certaines situations. Je trouve ça d'ailleurs triste qu'une auteure qui a eu des cours de scénario puisse dire qu'il suffit de mettre plus de noirs et de gonzesses pour que ce soit mieux écrit. Clairement, ce n'est pas aussi simple, il faut aussi savoir de quoi on parle. Une des raisons pour lesquelles il y a si peu de femmes dans des histoires, c'est parce que c'est souvent écrit par des hommes et que les hommes ne savent pas comment gérer un personnage féminin puisqu'ils connaissent en général moins de femme que d'hommes. Ce n'est jamais que la réflexion de l'éducation reçue par le scénariste. Ce n'est pas le seul facteur, il y en a d'autres. Rien n'est simple. Mais Mirion, comme Anita, a tendance à laisser croire que c'est très simple.


Ou pas... parce que la bougresse écrit beaucoup de notes en accompagnement à ses BD. Des notes en réponse à des commentaires. Et ça, c'est une des grosses différences avec Anita (en plus des sources qu'elle cite, même si les sources ne sont pas toujours très sérieuses). Elle répond et nuance son propos. Non pas lâchement en retournant sa veste, non, en étant juste plus explicative, en apportant des détails. En prenant de la distance aussi. C'est là qu'on comprend qu'elle ne déteste pas autant que prévu les œuvres critiquées ou qu'elle ne juge pas une oeuvre que pour son sexisme. Comme ces notes font parties du blog, forcément, ça compte dans la critique de l'oeuvre. C'est d'ailleurs dommage si ces notes ne sont pas reprises dans la BD parce qu'elles apportent un gros plus à l'oeuvre, ça rend le tout nettement plus supportable, surtout que c'est grâce à ces commentaires, de ce que j'ai compris, qu'elle a amélioré certaines pages (en y intercalant quelques dessins plus nuancés).


La nuance, c'est bien. Par contre j'ai été très déçu de ce dernier exposé sur l'impunité des stars. Alors qu'elle avait décrété il y a 2 ou 3 ans (je ne sais plus la date de cette publication) que tout n'était noir ou blanc (c'était à propos de l'éducation des enfants, comme quoi il ne fallait pas censurer, que les clichés avaient leur importance), elle se montre par contre totalement manichéenne dans ce post du mois de septembre : on ne peut pas être neutre face à des accusations sur la violence conjugale. Dans une affaire dont on ne connaît rien d'autre que ce que les médias nous en délivre, je pense au contraire que le mieux à faire est de rester neutre. Evidemment, ça fait sourire de voir comme les gens prennent la défense de Johnny Depp et, effectivement, les femmes qui mentent au sujet de violence conjugale sont minoritaires... mais est-ce une raison pour croire automatiquement la victime ? Non ! Justement, le devoir d'un justicier ou plus généralement d'un homme, c'est d'éviter de se prononcer avant d'avoir eu toutes les pièces du dossier. Il y a des choses qu'on ne sait pas, des exemples qu'elle donne où finalement peu d'éléments ont filtré. Et plus idiot encore, résumer une personne à ça : c'est-à-dire que si un homme a battu une femme alors il est définitivement perdu, il n'y a rien à sauver en lui, c'est un être totalement abject qui ne mérite pas qu'on s'intéresse à lui ni à son oeuvre. Mais pourquoi ? Les gens sont bien plus complexes que ça ! C'est amusant parce que souvent, ce sont les gens les plus anti-manichéens en matière de films qui sont eux-mêmes les plus manichéens dans la vie. Bon, le blog prouve bien qu'elle sait faire preuve de distance, mais dans ce dernier post, elle agit bêtement, se contentant de juger une vie entière sur un vice. C'est bien dommage. Je trouve la situation de Woody très glauque mais ça ne veut pas dire que ses films sont pourris pour autant. Il faut savoir séparer les deux. Et c'est encore plus dommage qu'elle aborde cela parce qu'elle sort du sujet initial, à savoir l'impunité des stars. On peut être la pire personne au monde et être capable de créer les plus belles œuvres au monde.


Bref, ce blog est intéressant à lire, mais aussi difficile à apprécier, parce que beaucoup de dessins sont moches au début, parce que ça part dans tous les sens (surtout au début), que ses exposés ne sont pas toujours très bien articulés, que sa mise en page est parfois trop lourde mais heureusement il y a des notes supplémentaires pour mieux comprendre l'autrice, pour mieux saisir son oeuvre et sa pensée, une belle utilisation des couleurs, un trait de plus en plus maîtrisé, des personnages expressifs, de l'humour (j'en ai pas parlé) qui fait un peu plus mouche sur la fin (parce que bon, j'avoue que les 4/5 de ses blagues m'ont à peine fait sourire). Je serais bien curieux de voir ses autres BD à l'occasion (ptet pas celle sur son voyage au Québec, car l'extrait donne plus l'impression de voir le journal intime d'une groupie qu'un bon travail de BD).


PS : comme pour "Feminist Frequency" je précise que ce n'est pas le féminisme que je note 5/10 mais bien la qualité du dessin et des histoires (ici des exposés) ; au final, chacun pense ce qu'il veut, toutes les opinions se valent, c'est plutôt la manière de les exprimer au travers d'un médium qui m'intéresse (comme le fait justement qu'elle use de ses notes comme un complément à ses histoires, pour moi c'est un + indéniable).

Fatpooper
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le 19 sept. 2016

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