No Man's Land - Y : Le Dernier Homme, tome 1 par Enlak

Un mystérieux fléau a éradiqué tous les mâles de la planète, laissant la lourde tâche aux femmes survivantes de gérer un monde dévasté. C’est avec cette audacieuse idée que débute la série « Y le dernier homme ».

Cette BD captive dès le début en montrant plusieurs protagonistes, avant l’événement fatidique. On y suit un jeune homme, Yorick, en pleine communication avec sa petite amie en Australie, sur le point d’aborder un sujet important, mais aussi sa mère, membre du congrès, en pleine discussion politique, une soldate israélienne sur le terrain, une docteur sur le point d’accoucher de son clone, et enfin une agent secret d’une organisation gouvernemental confidentielle en mission.
Le fléau surpris tout le monde, qui se retrouva ébahit et éberlué devant cette épidémie massive et foudroyante. Le monde allait être changé à jamais. Tous les hommes avaient péri. Tous sauf un, Yorick, pour des raisons aussi mystérieuses que le fléau lui-même…

La série raconte donc l’histoire de ce dernier homme, un road trip à travers les Etats-Unis, puis le monde, pour tenter de retrouver sa petite amie. Mais étant le dernier survivant masculin, ce qu’il représente et la responsabilité qui repose sur ses épaules vont bien au-delà de ses propres motivations. Les premières à apprendre son existence l’envoie donc auprès du docteur Mann, la spécialiste en clonage, pour tenter de comprendre les raisons de sa survie et trouver un moyen de repeupler la terre, escorté par la farouche et dévouée agent secret 355. Mais Yorick n’a rien d’un héros, il n’est ni fort ni spécialement intelligent, et se passerait bien de tout ce poids qui repose sur ses frêles épaules. De nature plutôt insouciante et désinvolte, il préfère feindre la légèreté et se conduire en toute imprudence, au grand désespoir de celles qui l’accompagnent. Mais comme les autres survivantes, le fléau le changera irrémédiablement.
Une impudence qui cause de nombreux problèmes, car le voyage sera celui de tous les dangers. Même si les hommes ne sont plus, la violence, le banditisme, la haine, les conflits entre nations n’ont pas disparus avec eux. Yorick et ses deux compagnes vont tour à tour affronter des folles pillant et tuant au nom de la lutte contre les derniers vestiges de la domination masculine, des soldats étrangères n’hésitant pas à combattre leurs anciens alliés pour mettre la main sur la ressource la plus précieuse de la Terre, des pirates trafiquantes de drogue, un gang d’adolescentes japonaises, ou encore une organisation secrète corrompue. En outre, certaines fonctions comme les pilotes d’avion étant occupés majoritairement par les hommes, ou encore les routes encombrés, ont sévèrement compromis les transports, quand des criminels ne bloquent pas les routes. Beaucoup de femmes meurent ainsi de faim, qui se tournent alors dans le pillage, la drogue ou la folie.

Toutefois malgré son concept similaire, « Y le dernier homme » n’a pas la noirceur de « walkind dead », que ce soit au niveau du dessin ou de la psychologie des personnages. Ce n’est pas le but affiché mais ça n’empêche pas d’accrocher à l’histoire pour autant. La raison ? L’intrigue évolue rapidement et le trio au centre de l’histoire reste rarement au même endroit. Ils font plusieurs rencontres, l’occasion de découvrir d’autres communautés ou individus qui essaient de survivre, et continuent ensuite leur chemin. Les conflits avec d’autres groupes se résolvent vite, sans laisser la situation s’éterniser ni provoquer l’ennuie. Tandis que l’envie d’avoir des réponses aux deux mystères que sont le fléau et la survie de Yorick alimentent l’intérêt. La psychologie peut paraître sommaire mais ce point là se rattrape par plusieurs flash-backs, et notamment le tome 4 avec une évolution notable pour le protagoniste. Les personnages finissent ainsi par devenir très attachants. Des rencontres passées reviennent sur le devant de la scène, comme Héro, la sœur de Yorick qui était dans la mauvaise pente, ou les soldates israéliennes, donnant une autre envergure à l’histoire qui ne se limite pas au trois personnages centraux.
Dès le tome 6 ils quittent le continent américain et l’histoire prend une allure plus internationale, l’occasion de découvrir la situation dans d’autres pays, comme l’Australie et le Japon.
Dans les 2-3 derniers tomes, Yorick, 355 et Mann se rapprochent de l’origine du fléau. L’origine n’est pas donné clairement, mais deux fortes pistes sont révélés, la vérité étant sans doute un mélange des deux. Le docteur étant, sans le savoir, directement concerné…
Forcément, des rapprochements ont lieu, mais racontés avec subtilité. Le jeune imprudent et la renfermée agent secret finissent par éprouver de l’affection malgré leurs différences, et le rapprochement s’effectue par étape. Yorick continue de penser à sa petite amie, même lorsqu’il a des aventures avec d’autres filles, et 355 tente de rester dans son rôle de protectrice.

Le dernier tome (10) offre une conclusion très émouvante. Après avoir affronté tant de dangers, le drame finit par survenir, et emporte un personnage que l’on avait finit par apprécier, surtout alors qu’une évolution intéressante apparaissait. L’histoire fait un bond dans le futur où l’on découvre comment l’humanité relève peu à peu la tête. Entrecoupés de flash-back, l’on rassemble les morceaux pour découvrir ce que sont devenus les différents personnages, comment ils ont fait face aux derniers événements.

Petit reproche au sujet de la cohérence de l’univers toutefois : le fléau est censé avoir tué tous les mammifères mâles. Il aurait donc du y avoir de profonds bouleversements écologiques, effondrements des écosystèmes et des cultures agricoles, graves perturbations de la chaîne alimentaire, ce dont il n’est jamais fait question. Il aurait été mieux, je pense, de limiter le fléau à l’humanité seule, mais ce n’est qu’un détail… Les idées déployées sont quand même bien trouvées et dans l’ensemble plutôt cohérentes.
Excepté que le concept d’un fléau un peu surnaturelle, l’étrange organisation dont fait partie 355 dont on ne sait strictement rien, donnent de prime abord un côté un peu mystique un peu dérangeant, d’autant que les réponses traînent un peu.

En bref, une histoire surprenante, qui évolue rapidement et qui ajoute régulièrement de nouveaux éléments, sans oublier les anciens événements. De quoi largement compenser les quelques reproches que l’on pourrait formuler au sujet du développement des personnages ou certains problèmes de cohérence. Et l’on tourne la dernière page du dernier tome, un sourire mi-triste mi-heureux.
Enlak
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le 7 mars 2015

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